Les autres : Alejandro Amenabar réinvente le film de revenants
Bac Films

Nicole Kidman se fait peur, ce soir sur Arte.

Arte rediffusera à 20h50 Les autres, le troisième long-métrage du cinéaste espagnol d'origine chilienne Alejandro Amenabar (puis Watchmen, de Zack Snyder, à 22h35). Sorti en salles en 2001, il s'agit d'une adaptation lointaine du Tour d'écrou de Henry James. Le film marque la première collaboration d'Amenabar avec une star hollywoodienne, et pas n'importe laquelle puisqu'il s'agit de Nicole Kidman.

Co-produit avec la Weinstein Company et Tom Cruise, encore à l'époque l'époux de l'actrice, Les autres est un hommage au cinéma de genre s'inspirant de classiques comme Les innocents de Jack Clayton (lui-même déjà adapté de la nouvelle de James), très influencé par le cinéma d'Alfred Hitchcock dont le spectre plane au-dessus de ce thriller anxiogène et haletant. L'association des talents du réalisateur espagnol et de l'actrice hollywoodienne s'avérera finalement être la clé de voûte du succès du film, comme l'écrivait Première à sa sortie en salles : "Ils (Kidman et les enfants) sont les bougies du film et guident pas à pas le spectateur vers un troisième monde dont l'évocation puissante résume à elle seule l'identité de ce thriller: les limbes".

Resté célèbre pour son ambiance gothique et pour son twist virtuose, Les autres reste l'un des succès les plus éclatants du cinéma ibérique ces dernières années. En France, plus d'un million et demi de spectateurs se ruent dans les salles obscures alors que le film engrange à l'international plus de 200 millions de dollars. Consacré par sept Goyas, Les autres marqua la consécration du talent d'Alejandro Amenabar, cinéaste obsédé par la mort sous toutes ses formes, déjà présentes dans ses deux premiers films, Tesis et Ouvre les yeux.

Les Autres : un remake du film avec Nicole Kidman en préparation

Les autres marque aussi une date-clé dans l'histoire du cinéma d'horreur espagnol, appelé à devenir l'un des plus influents et les plus prolifiques dans les années qui suivirent. En allant s'attacher les services d'une immense star hollywoodienne et en obtenant des financements venus de Hollywood (le film est le premier de l'histoire de Goyas, les César locaux, à être nommé sans qu'un seul mot en espagnol y soit prononcé), Les autres a donné un coup de projecteur sur le vivier de cinéastes espagnols spécialisés dans le cinéma d'horreur ou fantastique et qui ont depuis obtenu une visibilité à l'étranger comme Juan Antonio BayonaPaco Plaza ou Jaume Balaguero.

Dans la foulée du film, l'Espagne devient même une terre d'accueil, hébergeant notamment le tournage de L'échine du diable du Mexicain Guillermo del Toro. Des années plus tard, l'Argentin Andrès Muschietti viendra également en Espagne pour réaliser son Mama, porté par une autre star hollywoodienne, Jessica Chastain. Et après avoir fait notamment tourner Rachel Weisz dans AgoraAlejandro Amenabar est revenu à ce genre horrifique avec Regression, dont Emma Watson et Ethan Hawke sont les rôles-titres. Mais surtout, Les autres a par sa manière d'aborder son thème, ouvert la voie à toute une mode du film de revenant, qui s'incarne notamment chez nous par le film et la série de Canal+ du même nom. Traitant avant tout de la question du deuil, de la culpabilité, de la coexistence entre morts et vivants et des apparences, le film revitalise un sous-genre et marque sa génération par son travail sur la lenteur, le silence et la suspension, des traits de caractère qui détonent des traditionnels jump scares du cinéma d'épouvante et qui ont contribué à faire la réputation d'un film qui, quinze ans après, n'a rien perdu de sa force visuelle.

L'histoire des Autres : Sur l'île de Jersey, en 1945, une jeune femme, Grace, attend le retour de son époux, parti à la guerre. Elle vit seule dans un manoir isolé, perdu dans la lande brumeuse, s'occupant de ses deux enfants photophobes, atteints d'une maladie génétique incurable. Un matin, surgissent de nulle part trois étranges personnages, Bertha Mills, Edmund Tuttle et Lydia, une jeune fille muette. Grace, que ses domestiques ont abandonnée quelques semaines plus tôt, accepte de les engager. Trousseau de clés en main, elle leur montre les lieux, leur donne les ordres - fermer toutes les portes à double tour, calfeutrer les fenêtres pour que les enfants ne voient jamais cette lumière qui pourrait leur être fatale -, puis leur présente sa fille, Anne, et son fils, Nicholas...