Toutes les critiques de Entre les murs

Les critiques de Première

  1. Première
    par Isabelle Danel

    De ce monde clos que chacun de nous connaît ou a connu, Laurent Cantet donne une vision à la fois synthétique et ouverte. Immense. En compagnie de son coscénariste (et monteur) Robin Campillo, il a gardé du texte initial l’essentiel et recréé une ambiance nécessaire aux improvisations dans le cadre d’ateliers théâtre. Au fil du temps, un groupe de vingt-quatre assidus s’est formé et des « caractères » ont émergé. Les improvisations ont été induites plus que dirigées par François Bégaudeau, ex-prof, écrivain, journaliste, coauteur du film et acteur à part entière. Sur l’imparfait du subjonctif, la question de l’autoportrait, le football, l’idée de la honte, la définition de l’insolence, la différence entre l’oral et l’écrit, ou le choix d’un prénom dans un exemple écrit au tableau, chacun y va de sa réaction. Il manque à ce film le silence pesant et l’ennui cuisant, mais les joutes verbales sont brillantes, les élèves d’une vivacité encourageante, et le prof manie la langue avec une ironie mordante et une certitude (feinte ?) qui le fait parfois déraper. Gentil, pas gentil ? Compétent et foutraque, tolérant et injuste, sûr de son bon droit et en proie au doute. Comme ses élèves, comme tout le monde, quoi. Portrait d’une humanité plurielle et imparfaite, état des lieux d’une démocratie à traiter avec vigilance, Entre les murs est un film plein, dense, qui questionne le monde.

  2. Première
    par Gael Golhen

    Une palme pour Entre les murs de Laurent Cantet ? On ne fera pas la fine bouche (le film le mérite amplement), mais dans un festival qui a proposé des objets cinématographiques audacieux (Il Divo ou Gomorra), on s’étonnera de ce choix minimaliste… Si Sean Penn avait prévenu (la palme 2008 sera politique ou ne sera pas), on reste surpris qu’un film sélectionné au dernier moment, traitant d’un micro sujet sociétal (la vie d’une classe de quatrième dans un collège difficile) s’en tire avec tant d’honneur. Entre les murs plante sa caméra dans la vie d’une classe de quatrième. Avec une approche résolument documentaire (DV, acteurs non-professionnels, regard objectif), Cantet écoute la parole des enfants et des profs, regarde vivre sa classe, dissèque les succès comme les échecs du système scolaire tout en évitant les pièges du manichéisme ou du didactisme. Dans le genre (docufiction édifiante), c’est un sans faute…

Les critiques de la Presse

  1. Elle
    par Anne Diatkine

    Lors de la projection à Cannes, on se demandait pourquoi le film de Laurent Cantet était aussi émouvant. C'est une comédie, certes, mais bouleversante à bien des moments. (...) le point de vue de Laurent Cantet n'est jamais nostalgique ni démagogue. Ni rêveuse, ni attendrie, sa caméra n'est pas démonstrative. A l'opposé du documentaire Etre et Avoir, qui pouvait nous ennuyer par son apologie d'une école à l'ancienne, Laurent Cantet ne plaque aucun à priori. Mais montre combien et comment l'extérieur résonne "entre les murs", et démontre que le vent de l'intelligence souffle pour tout le monde.

  2. Paris Match
    par Alain Spira

    La grande force de frappe de ce film est de nous faire vraiment entrer "entre les murs" d'une classe avec le réalisme d'un reportage, la puissance émotionnelle d'une récit romanesque et l'humour d'une comédie.

  3. Fluctuat

    L'adaptation du roman de François Bégaudeau est une réussite stimulante et souvent très drôle. Sans démagogie, ni affirmation péremptoire, Entre les murs porte un regard intelligent sur l'affrontement de deux mondes qui peinent à communiquer. Il confirme aussi l'intérêt de Laurent Cantet pour la place, ou la solitude, de l'individu au sein du groupe et son talent pour intégrer le réel dans une dramaturgie maîtrisée. Deux mondes, deux langagesEntre les murs commence par la présentation des enseignants dans la salle des profs. Animés de cette légère tension propre à chaque rentrée, ils y déclinent identité et qualités de la même manière que des élèves. Ils partent ensuite affronter leurs meilleurs ennemis : des enfants qui vivent dans un autre monde, ne possèdent pas les mêmes codes et, surtout, pas le même vocabulaire. Laurent Cantet met joliment en scène, d'une manière répétitive mais tout à fait justifiée, cet échec de la communication qui entrave, à la base, leur délicate mission. Comment expliquer une notion quand l'explication elle-même implique une précision de vocabulaire qui en appelle une autre, etc. Un cercle vicieux, réjouissant pour le spectateur, mais sans issue. Du coup, le prof ne répond plus vraiment : il interroge à son tour. Les joutes verbales qui naissent de ce dialogue de sourds soulignent de belle manière la vivacité et l'intelligence, si difficile à canaliser, de ces élèves de 4e d'un collège du XXe arrondissement (Paris). Elles traduisent aussi l'impuissance à convertir de façon positive une énergie qui se retourne trop souvent contre eux. Justesse de la mise en scène Grâce à un important travail préalable en atelier (une méthode également utilisée avec succès dans l'excellent prochain film de Karim Dridi, Khamsa), et un tournage effectué dans les conditions d'une classe normale, la fiction s'avère d'un réalisme troublant. Cantet explique avoir laissé le choix de la formulation, donc du champ lexical, aux apprentis acteurs qu'il guidait seulement avec des indications de ton, d'état d'esprit ou d'humeur. Une méthode qui créée une homogénéité de groupe, permet de conserver le naturel d'un vocabulaire propre aux élèves et capte merveilleusement bien leur spontanéité « armée ». En adaptant le roman éponyme de françois bégaudeau, le réalisateur continue d'explorer des thèmes déjà évoqués dans d'autres milieux (Ressources humaines, L'Emploi du temps) comme la difficulté à trouver sa place au sein d'un groupe normé et la solitude autodestructrice qui en découle quand les codes ne sont pas connus. D'une certaine manière, en remontant à l'âge scolaire, il vient puiser aux racines les problèmes d'adaptation et d'inégalité qu'il a pu traiter auparavant. Pour les mettre en lumière, il fait encore preuve d'un remarquable talent pour inscrire des éléments quasi naturalistes au coeur d'une fiction composée de micro-événements qui arrivent pourtant à poser des enjeux majeurs et soulever nombre d'interrogations sur le fonctionnement cloisonné d'une société borgne.Les pièges évités Un film avec des enfants qui suscite une quasi-unanimité critique a cependant de quoi provoquer une certaine défiance. Heureusement, le propos ne consiste jamais à prôner une méthode pédagogique, ni à mettre en avant un individu - à la différence du narrateur trop exemplaire du roman. Il ne s'agit pas non plus de glorifier un groupe d'habitude stigmatisé (la racaille des ZEP) puisque celui-ci se révèle capable, dès lors qu'il a trouvé une brèche, de s'attaquer bêtement à celui qui commençait à les séduire et gagner leur estime. Le véritable enjeu réside plutôt dans l'équilibre précaire du rapport transmission (du prof vers l'élève)/ reconnaissance (de l'élève par le prof). A tour de rôle, chacun parvient à toucher l'autre et le pouvoir vacille au rythme des certitudes ébranlées. Quant à savoir si ce prof est crédible, réaliste ou représentatif, on s'en moque un peu car, rappelons-le, il s'agit d'une fiction. Une fiction qui ne démontre rien, si ce n'est la difficulté, voire l'impossibilité, de faire fonctionner ensemble des bonnes volontés. Ainsi, du respect de la note d'intention - « un film dans l'école et non sur l'école » - émerge un constat, doté d'un point de vue, certes, mais qui ne donne jamais de leçon. C'est la grande réussite du scénario du binôme Bégaudeau/Cantet : montrer pourquoi il ne peut pas y avoir de vainqueur possible dans la lutte observée, mais seulement deux perdants, constamment renvoyés dos-à-dos, avec des responsabilités partagées. Le prof étant, pour toujours, le représentant d'un ordre établi, dont les élèves se sentent exclus et incompris.Entre les mursDe Laurent CantetAvec François Begaudeau, Laura Baquela, Nassim AmrabtSortie en salles le 15 octobre 2008Illus. © Haut et Court - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils festival de cannes, sélection officielle, adaptation sur le blog cinéma- Lire la critique de Ressources humaines

  4. Le JDD
    par Danielle Attali

    Dernier film français de la compétition, Entre les murs, de Laurent Cantet, a emballé les festivaliers. Porté par une formidable énergie, ce film "rend hommage à l'école" à travers une chronique de son quotidien, chaleureuse, émouvante, pleine de drôlerie, jamais sombre ni angélique.

  5. Le JDD
    par Danielle Attali

    Entre les murs, de Laurent Cantet, dresse le portrait de l'école, lui rend hommage, autant qu'à tous ces profs plein de mérite, à travers cette chronique d'une année scolaire. Jamais sombre, ni angélique, ce film qui ressemble à un documentaire, est une vraie fiction, chaleureuse, émouvante et drôle, adaptée du livre de François Begaudeau. On s'attache à ces "sales gosses" qui se révèlent des acteurs formidables face à Begaudeau, un professeur atypique.