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Ce film ne réconciliera en rien les anti- Lelouch avec son cinéma. Mais pour les autres, il marque un soulagement. Le retour en forme d’un réalisateur qu’on aurait pu croire définitivement perdu après deux films aussi vite vus qu’oubliés (La Vertu des impondérables qui n’avait même pas trouvé le chemin des salles et L’Amour c’est mieux que la vie) à des années- lumière des œuvres majeures qu’il a pu signer. Une œuvre comme un retour aux sources. Parce que son héros est le fils des personnages de Lino Ventura et de Françoise Fabian (qui reprend ici son rôle et qu’on se régale toujours de retrouver à l’écran) dans l’un de ses classiques, La Bonne année dont l’ombre et les images planent sur ce Finalement. Et parce que son récit dialogue avec celui d’Itinéraire d’un enfant gâté : un avocat qui plaque tout – boulot, famille, amis – pour se reconstruire après un burn out et entreprend une balade à travers la France pour y parvenir. Amour, hasard, coïncidences et aphorismes sur la vie et la mort comme seul lui peut les inventer sont ici au programme. Du Lelouch 100% pur jus donc. Mais ce qui change par rapport à ses deux films précédents, c’est son incarnation. De tout temps, de Trintignant à Belmondo en passant par Dutronc, Catherine Deveuve, Marlène Jobert, Serge Reggiani ou Michèle Morgan, les stars populaires font partie de l’ADN du cinéma lelouchien. C’est d’ailleurs en partie parce qu’il n’avait pas su attirer celles de l’époque (Sophie Marceau, Juliette Binoche, Emmanuelle Béart…) qu’il a connu un coup de mou dans la deuxième partie des années 90. Et ça paraît tout sauf une coïncidence si ses meilleurs films récents – Roman de gare, Salaud on t’aime, Un plus une et Les Plus belles années de notre vie – ont respectivement eu pour têtes d’affiche Fanny Ardant, le duo Johnny Hallyday- Eddy Mitchell, Jean Dujardin, et le couple Jean- Louis Trintignant- Anouk Aimée. Kad Merad appartient à cette famille- là. Et son enthousiasme à se trouver devant la caméra d’un cinéaste qu’il admire et sa dextérité à se glisser dans la peau de ce personnage au fil de ce voyage peuplé de musique et de chansons crèvent l’écran. Tout n’est pas parfait dans Finalement, loin de là. On y frise régulièrement le grotesque bien involontaire. Mais l’enthousiasme de gamin de Lelouch – qu’on peut mettre en parallèle avec le Coppola de Megalopolis - emporte bien des choses sur son passage. Son regard pertinent sur les comédiens aussi. Il offre ainsi son vrai premier rôle majeur sur grand écran à Françoise Gillard, sociétaire de la Comédie Française qu’il avait repérée dans un spectacle qu’elle avait créée autour d’Alain Souchon. Elle joue une agricultrice, mariée et mère de famille dont tombe amoureux l’avocat que joue Kad Merad. Un amour impossible façon Sur la route de Madison. Et son interprétation à fleur de peau justifie à elle seule la découverte de ce Finalement.