La 12e édition du festival de cinéma fantastique Même Pas Peur a démarré aujourd’hui. Monstres, sorcières et amazones sous LSD ont envahi le cinéma de Saint-Philippe, une petite ville du sud de l’Île de la Réunion !
Quand vous arrivez à la Réunion en février, un choix s’offre à vous : profiter des magnifiques randonnées qu’offre « l’île intense » à travers ses forêts primaires, ses vallées volcaniques et ses cascades... ou prendre la direction de Saint-Philippe, tout au sud, pour découvrir des dizaines de bobines fantastiques dans le festival de cinéma le plus austral de l’hexagone : Même Pas Peur !
A la tête de ces réjouissances, Aurélia Mengin, une comédienne, réalisatrice et programmatrice infatigable qui fait trembler l’île depuis maintenant 12 ans. « Saint-Philippe est niché au pied du Piton de la fournaise, un volcan qui rentre fréquemment en éruption. Les maisons ont été construites sur de la lave séchée et les habitants ont pris l’habitude de vivre en autarcie, alors que les coulées du volcan coupaient régulièrement les routes. Quel décor plus propice pour célébrer le cinéma fantastique ? », questionne cette native de la Réunion, qui se bat chaque jour pour faire exister cet événement totalement gratuit et « apporter du cinéma et de la culture loin des grandes villes, auprès des gens qui en ont le plus besoin ! » Le feu qui anime Aurélia lui permet chaque année de sélectionner un florilège de films et de court-métrages internationaux, avec la complicité de son co-organisateur, Nicolas.
Panique Académie
Coup d’envoi ce jeudi 17 février avec une séance de court-métrages dédiés aux collégiens, suivis de débats et d’échanges. La salle est comble. Sorcières, dinosaures, monstres au fond d’un puits… Rien n’est épargné aux enfants du coin qui sursautent à chaque jumpscares, frémissent à chaque goutte de sang et applaudissent à tout rompre entre les films. L’ambiance est électrique, ils en demandent toujours plus et hurlent de terreur devant The Tenant, un court espagnol franchement flippant, qui raconte la sale journée d’une femme dont une sorcière invisible s’est accrochée à la cheville. L’occasion pour les médiateurs d’échanger avec les enfants autour de la peur du noir et de la force de la suggestion au cinéma. Beaucoup d’enfant s’endormiront ce soir avec la lumière allumée, mais sans doute aussi, avec l’envie de grandir et d’affronter les monstres qui se cachent dans leur placard.
Bad Tripes
La soirée continue avec After Blue (Paradis Sale), le dernier OVNI de Bertrand Mandico qui vient répandre son lot de paillettes, de fluides et de couleurs vénéneuses. Dans ce second long-métrage, le plus arty des réalisateurs français délaisse l’île mystérieuse des Garçons Sauvages (en partie tourné à la Réunion), pour nous perdre sur After Blue, une planète fantasmagorique sur laquelle les femmes ont trouvé refuge, loin des hommes et de la technologie. Le fragile équilibre de cette société d’amazones est rompu lorsque la jeune Roxy croise la route de Kate Bush, une tueuse sans pitié dotée d’un organe qui n’a pas été vu depuis longtemps dans les parages. Roxy et sa mère se lancent dans un road-trip halluciné et érotique peuplé de sorcières, de femmes fatales et de monstres lubriques.
Nous voilà prévenus : il faut poser son cerveau gauche, siège de la logique et de la raison, à l’entrée de la salle. Bertrand Mandico lâche les chevaux et déploie sur plus de deux heures toute l’étendue de son univers organique et psychédélique. Comme un démiurge sous LSD, il soigne chaque plan, chaque lumière, magnifie ses actrices dans des tableaux kitchs et lascifs (Vimala Pons crève l’écran en artiste tueuse excentrique) et nous perd dans un déluge de doubles expositions et d’effets stroboscopiques tous réalisés sur le plateau. C’est une expérience totale qui est proposée ici, mais un buvard trop généreusement dosé mène souvent au bad trip ! Sursollicités en permanences, nos sens commencent par s’émousser et on fini par se perdre complètement dans l’intrigue de ce grand délire cosmique. Heureusement, les verres de rhum arrangé qui clôturent notre première soirée réunionnaise nous permettront de reprendre pied avec la réalité peu de temps après.
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