L'actrice-révélation de Jeune et Jolie s'est confié sur le film de François Ozon.
À Cannes, il n’y en a eu que pour Marine Vacth et Adèle Exarchopoulos, la châtain diaphane de Jeune & Jolie et la brune piquante de La vie d’Adèle. Deux styles, deux incarnations cinématographiques de l’adolescence et de la sexualité (cérébrale et cynique pour l’une ; physique et libératrice pour l’autre), deux révélations fracassantes qui ont enflammé l’imagination des chroniqueurs. "Il y a plein d’erreurs dans ma bio", s’empresse de préciser Marine Vacth à ce sujet, dans un sourire qui éclaire son visage un peu grave. Vraiment ? Primo, elle n’est pas née en 1990 mais en 1991. Secundo, son père n’a jamais porté plainte contre un magazine féminin qui aurait montré des photos d’elle un peu dénudées alors qu’elle était apprentie mannequin et mineure. Tertio, les relations avec ses parents ne sont pas si tendues qu’on a bien voulu l’écrire – elle n’approfondira pas. "Quand on met des phrases entre guillemets dans un portrait et que la nuance n’est pas faite, ça peut prêter à confusion", regrette-t-elle. "Par ailleurs, je n’ai pas mesuré l’impact des mots que j’avais employés lors de ma première grande interview (donnée à Next, fin 2011, ndlr)". Contrôle-t-elle mieux sa communication depuis ? "Pas spécialement... Ce n’est pas l’exercice que je préfère... Disons que je fais un peu plus attention", répond-elle, hésitante. Sa timidité est manifeste, vieux reste d’une adolescence interrompue à quinze ans lorsqu’elle fut repérée par un chasseur de têtes d’une agence de mannequins. "J’étais assez sauvage, pas du tout prête à faire carrière dans un univers qui ne me fascinait pas. Mais j’étais curieuse..." Le mystère Vacth réside dans ce grand écart permanent entre le désir et la retenue, entre la lucidité et une forme d’innocence, que la jeune femme résume par une distance qu’elle a depuis toujours par rapport aux choses. "Ça ne veut pas dire que je m’en fous mais, aujourd’hui, n’importe qui est surmédiatisé. Il faut relativiser... "
Actrice à plein temps
Fidèle à sa nature détachée, Marine Vacth n’a pas sauté au plafond lorsqu’elle a décroché le rôle de Jeune & Jolie. "Je suis passée par plein d’états différents en lisant le scénario. J’ai très mal dormi. Cette histoire tenait vraiment sur un fil, ça pouvait marcher ou pas. J’ai eu besoin d’être rassurée sur la façon dont je serais filmée, notamment pour les scène de nudité, et sur le fait que Jeune & Jolie ne s’apparenterait pas à un dossier sur la prostitution des jeunes car ce n’est pas quelque chose que j’aurais eu envie de défendre. Non seulement François a balayé mes doutes mais il a tout fait pour me protéger et me mettre en confiance en m’impliquant très tôt dans la fabrication du film." L’actrice presque débutante (deux seconds rôles dans Ma part du gâteau et Ce que le jour doit à la nuit) a ainsi eu son mot à dire sur le choix des costumes d’Isabelle, ado négligée occasionnellement femme apprêtée, ou sur la désignation de celui qui allait jouer son petit frère, personnage relativement clé de l’histoire... Jeune femme de caractère, Marine Vacth ne craint pas d’être prisonnière d’un rôle, mauvais sort que les Cassandre médiatiques réservent à celles qui se livrent corps et âmes à la caméra. Vous lui citez le cas Maria Schneider (Le dernier tango à Paris, puis l’éclipse), elle vous sort le contre-exemple Charlotte Rampling (Portier de nuit, formidable tremplin). "J’ai l’impression que, dans ce milieu, on s’inscrit dans quelque chose malgré soi, dit-elle. Personnellement, je ne me plie pas forcément aux envies des autres. Ce n’est pas ma vision de la vie." De plus en plus actrice, Marine Vacth compte prochainement tourner le premier film de Joan Chemla, dont le court métrage L’homme à la cervelle d’or avait révélé chez elle le goût du jeu. Fidèle, entière, déterminée, Marine vaque tranquillement à son destin. On prédit qu’il sera grand.
Christophe Narbonne
Bande annonce de Jeune & Jolie de François Ozon :
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