Culte, en crise, libre ou mal assorti : petite typologie du couple lelouchien.
Le plus culte
Jean-Louis Trintignant et Anouk Aimée. Un homme et une femme (1966).
Pas besoin d’en dire beaucoup sur ce couple iconique qui a imprégné l’imaginaire mondial. Lelouch le pressentait-il quand il a choisi, avec une folle assurance, d’intituler simplement son film « Un homme et une femme » ? Manière d’annoncer ses visées universelles, son geste définitif de représentation de la relation homme-femme à l’écran ? La classe de Trintignant, les regards d’Anouk Aimée, la caméra tournoyante sur la plage de Deauville, chabadabada. Il n’en fallait pas plus – et c’est d’ailleurs sans doute parce qu’il n’y a pas beaucoup plus dans cette œuvre, essentiellement composée de visions, d’instants immédiatement iconiques que Lelouch a su capter entre ses acteurs, qu’Un homme et une femme a fait le tour du monde. Les yeux parlent une langue universelle.
Le plus en crise
Yves Montand et Annie Girardot. Vivre pour vivre (1967)
Après la reconstruction par l’amour, Lelouch filme la destruction d’un couple. L’homme amoureux mais volage, la femme trompée. Yves Montand, reporter de guerre qui profite de ses voyages aux quatre coins du monde pour vivre des aventures extraconjugales, face à Annie Girardot meurtrie. Silencieuse. Jusqu’à cette séquence dingue où elle confie sa douleur face caméra. Il la quitte. Puis revient. Mais elle a refait sa vie. Ce n’est plus la passion qui naît mais l’amour qui s’étiole que filme Lelouch dans ce drame romantique auquel Montand et Girardot, presque confondus dans leurs rôles, donnent une rare puissance. Et la musique de Francis Lai, encore, sublimement mélancolique.
Rencontre croisée entre Jean Dujardin et Claude Lelouch
Le plus mal assorti
Lino Ventura et Françoise Fabian. La bonne année. 1973
Le film français préféré de Stanley Kubrick, qu’il montrait paraît-il à ses acteurs avant un tournage et notamment à Tom Cruise et Nicole Kidman avant Eyes Wide Shut, est un film de casse doublé d’une romance. Entre un petit gangster peu raffiné, macho de la vieille école et une belle antiquaire cultivée et indépendante. Lino Ventura et Françoise Fabian. Après deux love-story intemporelles, Lelouch filme un couple en prise avec son époque et commence à envisager les relations homme-femme à l'aune des évolutions de la société.
Le plus « bro »
Jacques Villeret et Charles Denner. Robert et Robert. 1978
Quand il filme deux hommes à la recherche de l’amour, outre sa critique en règle des agences de rencontres, Lelouch capte en fait une super « bromance » : l’amitié naissante entre deux hommes misérables et solitaires, qui faute de trouver une femme trouve en l’autre son âme sœur. Avec Charles Denner et Jacques Villeret, qui se révèle devant la caméra de Lelouch et remporte d’ailleurs un César pour ce rôle qui ne force pas sa nature, le cinéaste de l’amour prouve qu’il sait filmer les hommes comme personne.
Le plus libre
Le quatuor Francis Huster-Alessandra Martines / Fabrice Luchini-Marie-Sophie L. Tout ça... pour ça. 1993
Francis est marié à Alessandra mais entretient une liaison avec Marie, mariée à Fabrice. Ils partent tous les quatre pour une ascension du Mont Blanc au cours de laquelle les deux amants tenteront de se débarrasser de leurs conjoints respectifs en les poussant dans les bras l’un de l’autre. Quand ils rentrent de vacances, Fabrice et Marie, tous deux avocats, doivent plaider plusieurs affaires devant Francis, juge. Ces récits finissent par se confondre avec leurs propres aventures dans un grand procès de l’amour et de la monogamie. Etrange film choral, impudique, qui ressemble à l'oeuvre de la crise : comme souvent chez Lelouch, tous les personnages portent leur propre prénom mais ici, en plus, défilent les ex compagnes du cinéaste (Marie-Sophie L., Evelyne Bouix et Alessandra Martines, sa femme de l’époque).
Un + Une, le nouveau Claude Lelouch avec Jean Dujardin et Elsa Zylberstein, sera diffusé ce soir sur TF1 :
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