A l’occasion de la sortie des Cinq légendes, le dernier joyau du studio DreamWorks, nous avons rencontré Julien Bocabeille, Pierre Perifel, Alexis Wanneroy et Laurent Caneiro. Quatre Français qui font partie de l’équipe d’animateurs de la boîte de Jeffrey Katzenberg et qui ont occupé une place de choix dans la conception des Cinq légendes -où, rappelons-le, le Père Noël, le Lapin de Pâques, le Marchand de sable, Jack Frost et la Fée des dents affrontent le Croquemitaine. Dans les studios californiens de Glendale, où nous avions parlé avec le producteur Guillermo Del Toro et le réalisateur Peter Ramsey, nous avons aussi rencontré le carré d’as frenchy de DreamWorks. Propos recueillis par Sylvestre Picard.Si j'ai bien compris, vous êtes la bande des Gobelins de Dreamworks ?Pierre Perifel : J’ai été repéré par DreamWorks au jury de fin d’année des Gobelins. Je ne pouvais pas bosser tout de suite pour eux, mais je suis revenu à Glendale deux ans après et, six mois plus tard je commençais. C’était début 2008. J’a commencé par de la 2D sur des DVD, puis Shrek 4, Kung Fu Panda 2, et enfin Les Cinq légendes.Julien Bocabeille : Pareil pour moi. DreamWorks était au jury des Gobelins, ils m’ont proposé tout de suite de bosser pour eux et de monter l’antenne du studio en Inde. Pendant un an. Après je suis venu rejoindre Laurent sur Dragons 3D. Beaucoup de projets.Alexis Wanneroy : J’ai fait aussi les Gobelins. Original, hein ?Laurent Caneiro : Je suis l'anomalie du groupe; le seul à ne pas avoir fait l’école des Gobelins (rires). J’ai étudié l’animation traditionnelle au LTAM du Luxembourg. J’ai bossé sur Numéro 9, pour le studio des Schtroumpfs en Belgique, puis Planète 51 en Espagne... J’ai postulé chez DreamWorks pour Dragons 3D et ils m’ont pris.Pourquoi l’animation US recrute-t-elle autant en Europe ?Pierre : Il n’y a même pas un animateur sur deux qui soit américain ici.DW a une relation privilégiée avec l’Europe. Le studio s’est monté à partir d’anciens de chez Disney et des animateurs du studio de Spielberg à Londres. Beaucoup d’européens dans les équipes. Ils ont l’habitude de faire des visas.Alexis : Les cadres de DW ont été les premiers a envoyer des talent scouts dans les jurys des écoles d’animations européennes. Maintenant, tout le monde le fait.Guillermo Del Toro m'expliquait tout à l'heure que Les Cinq légendes était un gros risque pour DreamWorks ?Julien : OK, en tant que Français on est plus sensibles à Dragons ou aux Cinq légendes. Mais il faut être réaliste. Sans Shrek, on ne serait pas là. Il y a le public pour ça. Tu prends des risques avec ce style de films, comme Dragons, qui mélange l’enfantin et l’adulte et qui ne sont pas des sequels ou des spin offs de gros succès.Pierre : Ce n’est pas parce qu’on fait des comédies potaches et des références pop tout le temps que c’est mauvais. Ca a été malheureusement l’axe principal de DW depuis le succès de Shrek. Sur les 12 films du line up DW jusqu’en 2016, il y a 4-5 suites. Tout le reste est original. Turbo, The Croods, Me And My Shadow…Del Toro a-t-il vraiment bossé sur Les Cinq légendes ? Julien : Il a surtout bossé sur le montage, l’histoire, le background des personnages… Mais pas sur le character design ni sur l’animation.Alexis : Del Toro nous a surtout fait changer le personnage du Lapin de Pâques. Au départ il était très proche du bouquin de Bill joyce : un scientifique à lunettes. GDT est revenu à l’essence du personnage, le symbole du printemps et de la renaissance proche de la nature. Et le transformer en même temps un gros guerrier ninja avec des boomerangs, mais bon, ça c’st son trip (rires).Pierre : Il n’avait pas besoin d’être là pour qu’on se permette des trucs. Par exemple, j’étais responsable du Père Noël. Pour trouver l’attitude, le ton du personnage, on s’est inspiré de Boris le hachoir [Rade Serbedzija] dans Snatch. On a refait toutes les scènes de Boris dans Snatch avec notre personnage. Voir le Père Noël dire "motherfuckers" et tabasser des mecs, ça n’a pas de prix. On devrait faire la version uncut des Cinq légendes.Alexis : Pour Pitch Black [le bad guy du film], on est allés super loin, il était vraiment flippant à l’origine. Trop pour les enfants. On a dû se calmer là-dessus, DW nous a fait supprimer un moment où Pitch chuchote à l’oreille d’un gamin endormi qui était vraiment hard…Vous voyez comment le futur de DreamWorks face à la concurrence : Sony (Hôtel Transylvanie), Fox/Blue Sky (Age de glace), et évidemment Disney/Pixar ?Julien : La recette Pixar s’est largement diffusée : les idées visuelles de dingue, un rythme de narration… Tout le monde en fait.Pierre : Pixar étaient des précurseurs. Ils ne trichent pas. Mais là, pour le coup, ils n’ont que des suites en chantier… ils deviennent des suiveurs, pour le coup. Leurs équipes créatives ne se sont peut-être pas assez renouvelées. Les animateurs de Disney sont des vieux, mais ils sont très forts. Et surtout chers.Laurent : Cars 2, c’était pas si génial quand même.Alexis : Marquer sa différence avec l’emploi de VIP. Roger Deakins [grand directeur de la photographie, des films des frères Coen ou de Skyfall, NDLR] a été embauché sur Dragons, il a bossé sur la lumière des Cinq légendes… Même Wally Pfister, le chef op de Dark Knight, est venu un jour.
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Les Cinq légendes : rencontre avec les animateurs français de DreamWorks
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