Tous les matins, entre le film, l'interview et la star du jour, le point à chaud en direct du 74e festival de Cannes.
Le film du jour : Les Olympiades de Jacques Audiard (Sélection Officielle)
Jacques Audiard n'est jamais là où on l'attend. Après un vigilante en banlieue parisienne (Dheepan Palme d'or 2015), il était parti faire son western avec des stars américaines (Les Frères Sisters). Il revient aujourd'hui en France pour un marivaudage ultra moderne, simple et très doux. Les Olympiades, c'est la carte du tendre du XXIème siècle. Co-écrit par Céline Sciamma et Léa Mysius, le film suit le parcours de quatre personnages. Il y a Emilie (Lucie Zhang), une jeune femme agitée par des vents contraires, qui se cherche sur tous les plans (sexuel, personnel, professionnel). Camille (Makita Samba) est un jeune prof de lettres qui va bientôt tout envoyer balader ; Nora, elle, vient de quitter Bordeaux pour se reconstruire et par une suite de hasards, elle tombe sur une camgirl qui lui ressemble beaucoup, Amber Sweet (Jhenny Beth).
A la fluidité du désir de ses personnages s'oppose la rigidité du bitume des Olympiades. Et dans une mise en scène aérienne (tout est là : la caméra en liberté, les musiques flash), le cinéaste cherche à se confronter à cette jeunesse qui a fait de l’identité sa quête suprême. Il est donc beaucoup question de gaze (male et female), de fluidité et... d'isolement. Car Les Olympiades raconte la solitude de ses héros. Dans un Noir & Blanc qui rappelle en vrac Happy Together de Wong Kar Wai, les plus beaux Antonioni ou le Manhattan de Woody Allen, Audiard regarde donc son quatuor essayer de construire des relations amoureuses sur des fondations mouvantes et instables. L'ennui c'est que sa manière de traiter ces amours à l'ère snapchat est un peu désincarnée, trop didactique. Et les creux du script, tout comme certains dialogues trop professoraux, étouffent parfois les sentiments.
La star du jour : Mathieu Amalric (Tralala des frères Larrieur en Séance de minuit et Serre- moi fort en section Cannes Première)
Voilà deux jours, il campait un commissaire amateur de gastronomie d’Ennui-sur-Blasé pour Wes Anderson. Et ce n’était qu’un tour de chauffe ! Car, dans la foulée, on le retrouvait “banjolélé” (mix de banjo et de yukulélé) en bandoulière dans Tralala des frères Larrieu qu’il accompagne depuis des années. En clochard céleste qui part pour Lourdes en quête d’une jeune femme croisée dans Paris et y trouve une mère qui croit voir en lui son fils disparu vingt ans plus tôt, sa fantaisie naturelle et son regard malicieux donnent le ton de cette comédie musicale dont on ressort emballé. Et hier soir, c’est avec la casquette de réalisateur qu’il présentait Serre moi fort où à partir d’un point de départ simplissime - une femme part un matin et laisse derrière elle mari et enfants - il élaborait un récit d’une puissance scénaristique et visuelle renversantes. Avec en filigrane cette croyance dans le pouvoir de la fiction capable de guérir les douleurs les plus insoutenables.
La révélation du jour : Simon Rex dans Red Rocket de Sean Baker
Simon Rex aka Dirt Nasty pour les intimes aka Mikey Saber dans Red Rocket présenté en sélection officielle. L’homme de 46 ans n’est visiblement une révélation que pour nous. Porn star gay durant les nineties, il était notamment au générique des sagas Young, Hard & Solo et des Hot Sessions (pas vu). Sur le net, son nom est immédiatement associé à des marqueurs forts : Simon Rex net worth (nous ne sommes pas allés voir), Simon Rex Scary Movie (l’acteur est adepte des films parodiques) ou encore Simon Rex Meghan Markle (une ex donc !) On a même trouvé une vidéo où le beau gosse – mannequin et journaliste à ses heures perdues – interviewe 2 Pac ! Dans le merveilleux Red Rocket de Sean Baker, il est Mikey Saber, un acteur porno en disgrâce qui retourne dans le Texas de sa jeunesse où il n’a pas laissé que des bons souvenirs. Simon Rex avec ses dents blanches, sa gueule d’ange, son corps bien sculpté et son anatomie plus que généreuse, campe avec générosité cet homme-enfant insupportable, incarnation vivante d’une certaine idée de la vitalité américaine. Grand Rex donc.
L'interview du jour : Noémie Merlant (réalisatrice de Mi Iubita, mon amour, Séance spéciale)
Le coup de chaud du jour : Denis Podalydès séducteur (dans Tromperie présenté en Cannes Première)
C’est le tombeur de la croisette ! Anaïs Demoustier, Léa Seydoux, Valérie Bruni Tedeschi, Emmanuelle Devos, Madalina Constantin et même Alexandre Steiger lui courent après et quémandent ses faveurs. Poda ne sait plus où donner de la tête. Son truc à lui, on le sait, c’est le côté écrivain velours-côtelé des beaux quartiers. La calvitie, à peine masquée par quelques cheveux savamment ébouriffés, ajoute au sex-appeal estampillé Gallimard. Dans Les Amours d’Anaïs de Charline Bourgeois-Tacquet (Semaine de la Critique) comme dans Tromperie d’Arnaud Desplechin (Cannes Première), on voit son personnage écrire (un peu) et coucher (beaucoup). Et s'il n'écrit pas dans Les Oranges sanguines, il drague. Dans tous les cas, il parle. Beaucoup. Et pour dire des choses tellement belles et profondes que ces proies se noient dedans. Poda s’en étonne à peine. Soit verbe et tais-toi.
La citation du jour : Yves Montand dans Montand est à nous d'Yves Jeuland"Je voulais être acteur, moi. J'ai jamais voulu être chanteur ; pour moi les chanteurs c'étaient des invertébrés"
La photo du jour : Spike Lee fête le 14 juillet
Le cocktail caribéen du jour : Freda de Gessica Geneus (Un Certain regard)
Port-au-Prince, 2018. Freda habite dans un quartier populaire et sa famille survit grâce à une petite boutique de rue. La violence monte en Haïti, le pays se divise : faut-il rester malgré tout ou partir ? Gessica Geneus (venue du documentaire, ça se voit) filme sans fioritures les ambitions brisées et les combines plus ou moins louches. Et surtout des destins de femmes, dont les envies de liberté et d'émancipation se fracassent contre des enflures qui ont l'argent pour les faire sortir de leur condition... On y réfléchit aussi à la colonisation, au poids du passé et à un possible avenir. Pas révolutionnaire (quoique) mais Freda est un instantané d'Haïti assez saisissant.
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