Affiches sorties de films du 27 juillet 2022
Tandem/ Ad Vitam/ Rezo Films

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
MI IUBITA, MON AMOUR ★★★☆☆

De Noémie Merlant

L’essentiel

Inspirée par ses histoires d’amour et d’amitié, Noémie Merlant signe un premier long métrage attachant, dont même les défauts nourrissent le charme fou qui en émane

C’est l’histoire d’une jeune femme qui, partie enterrer sa vie de jeune fille avec des amies en Roumanie, y tombe amoureux d’un garçon qui fait imploser ses certitudes. Cette histoire, Noémie Merlant (qui signe son premier long tout en y tenant le rôle central) a expliqué lors de sa présentation à Cannes en 2021, qu’elle était la sienne. Romancée bien sûr mais fidèle à ce coup de foudre passionnel qu’elle a pu vivre. Tourné en 14 jours avec des comédiens faisant partie de son cercle proche, Mi iubita n’a rien du film de vacances entre potes. S’il souffre de maladresses, l’envie de cinéma de Noémie Merlant renverse bien des montagnes. Elle fait dialoguer les cultures françaises et rom en faisant valser les clichés, elle sait insuffler du désir comme de la pudeur dans des scènes d’amour d’une grande délicatesse. Il y a de l’énergie, des couleurs et du bon son à revendre dans ce cri du cœur. Comment ne pas succomber ?

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A ADORE

SUNDOWN ★★★★☆

De Michel Franco

C’est un film si mutique et mystérieux qu’il veut mieux en savoir le moins possible à son sujet avant de s’asseoir devant. Contentons-nous de dire que Tim Roth y joue un homme en vacances avec sa sœur et ses neveux dans un hôtel mexicain ultra-luxueux. Un événement imprévu oblige la famille à rentrer précipitamment chez elle, à Londres, mais notre héros va trouver un prétexte bidon pour rebrousser chemin à la dernière minute. Alors, sous le soleil de plomb d’une plage d’Acapulco, il va se laisser dériver, organiser le minutieux dérèglement de son existence… Michel Franco parvient à créer du suspense, une très grande tension, grâce à son extraordinaire gestion de la durée, sa maitrise du non-dit, construisant patiemment une sorte de puzzle existentiel, gorgé d’humour noir, et porté par la puissance d’incarnation d’un Tim Roth vraiment génial. 

Frédéric Foubert

PREMIÈRE A AIME

MARCEL ! ★★★☆☆

De Jasmine Trinca

Une petite fille insomniaque. Sa mère artiste de rue qui l’aime certes mais maladroitement et lui préfère... son chien (et partenaire de spectacle) Marcel ! Voici le point de départ du premier long de la comédienne Jasmine Trinca, inspiré du rapport singulier et passionnel qu’elle a entretenu avec sa propre mère. Et plus que par son récit souffrant ici et là de trous d’air, c’est par l’aspect volontiers baroque de sa mise en scène, son jeu avec les couleurs vives (créées avec Daria D’Antonio, la chef op’ de La Main de Dieu de Sorrentino) pour contrecarrer la noirceur et la douleur de certaines situations que Marcel ! vous emporte. Ses plans ressemblent à des tableaux qui s’animeraient au rythme du merveilleux duo qu’elle a réuni à l’écran : la jeune surdouée Maayane Conti et Alba Rohrwacher qui, à chaque rôle, paraît se réinventer. On parie que Jasmine Trinca n’en restera pas là. 

Thierry Cheze

BECOMING FATHER ★★★☆☆

De Tetsuya Mariko

Arrivée en force sur notre sol du tonitruant cinéaste japonais Tetsuya Mariko, avec les sorties conjointes de ses deux premiers longs-métrages : Destruction Babies (2016), sur l’itinéraire d’un bagarreur compulsif (cf ci- dessous) et ce Becoming Father (2018), pas forcément plus apaisé que le précédent. Tetsuya remarqué notamment au Festival de Locarno et formé par Kiyoshi Kurosawa, adapte ici un manga populaire au Japon. Le héros, un cadre sans envergure, déploie une agressivité insoupçonnée pour les beaux yeux de sa belle. A travers cette évolution, le cinéaste démontre la façon dont la société nippone créait des monstres de frustration en forçant ses ouailles à rester dans le rang. « Vois le monde entier comme ton ennemi. », entend-on ici. A ce pessimisme, la mise en scène tout en grâce de Tetsuya Mariko apporte un salvateur contre-poids.

Thomas Baurez

DESTRUCTION BABIES ★★★☆☆

De Tetsuya Mariko

Des guitares saturées en guise d’ouverture. Une ville portuaire au Japon. Un gamin de 18 ans se fait lyncher par une bande. Voix-off : « Ce jour-là mon frère a disparu. Il n’est jamais réapparu. Je demande où il est passé... Vu son tempérament bagarreur, ça n’a surpris personne. » La caméra de Tetsuya Mariko va bien-sûr suivre à la trace ce « frère disparu ». Taïra est incarné par Yagira Yûya, Prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes pour Nobody Knows d’Hirokazu Kore-eda en 2004. On reconnait la finesse de ses traits, moins sa grâce juvénile, puisque son personnage s’amuse à tabasser celles et ceux qui ont le malheur de croiser sa route. Pas de morale, ni de quartier ici, c’est un Japon désorienté, orphelin et malade de lui-même que filme avec fermeté Tetsuya Mariko. Impressionnant.

Thomas Baurez

KRYPTO ET LES SUPER- ANIMAUX ★★★☆☆

De Jared Stern et Sam Levine

Vous saviez que Superman avait un chien ? Ce n'est pas une invention opportuniste : Krypto le super-chien est apparu en 1955 dans une aventure de l'Homme d'acier quand il était ado. Très populaire -et déjà héros d'une série télé animée en 2005- le voici à la tête de son film, et le résultat est vraiment chouette. D'accord, ça ressemble à une version super-héroïque de Comme des bêtes avec sa bande d'animaux chelous bardés de super-pouvoirs (une tortue capable de filer comme Flash, un hamster style Akira) et vivant une aventure parallèle à celle des humains, mais le plaisir est là : celui de regarder une solide comédie familiale visuellement bien foutue (la ville de Metropolis est top), parvenant à se moquer gentiment de toute la bande de super-héros DC. Mention spéciale à Batman doublé par Keanu Reeves en VO, qui parvient le temps d'une apparition à donner une autre vision du Chevalier noir. Hilarante, évidemment.

Sylvestre Picard

COSTA BRAVA, LEBANON ★★★☆☆

De Mounia Akl

On se souvient en France à l’annonce du premier confinement de la course effrénée de Parisiens affolés se précipitant sur les routes pour rejoindre un havre de paix à la campagne. Et si l’intrigue de Costa Brava, Lebanon est censée se dérouler dans un futur proche, elle évoque bien notre passé récent. Soraya et Walid (Nadine Labaki et Saleh Bakri), un couple avec enfants a décidé de se retirer loin du tumulte de Beyrouth et sa vie accélérée. Dans leur bicoque 100% responsable, tout est beau et bio. Sauf que des tractopelles investissent bientôt le terrain voisin pour y creuser une décharge écolo. Nos bobos soudain sortis de leur confort solitaire, perdent leur calme. A l’aide d’une mise en scène inspirée et d’un scénario plus complexe qu’il n’y parait, Mounia Akl réussit un premier long stimulant, tout en tension.

Thomas Baurez

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

UN ETE COMME CA ★★☆☆☆

De Denis Côté

L’ombre du Déclin de l’empire américain de Denys Arcand, immense succès du cinéma québécois en France dans les années 80 (plus d’1,2 million de spectateurs réunis en 1987) plane sur ce nouveau film de Denis Côté (Vic + Flo ont vu un ours) mais sans l’écraser. Les deux compatriotes partagent ce goût et ce talent pour parler de sexe, avec une crudité assumée mais sans jamais verser dans la vulgarité. Ses héroïnes sont trois jeunes femmes invitées en maison de repos pour explorer leurs troubles sexuels sous la supervision d’une thérapeute allemande et d’un travailleur social (Samir Guesmi, dont on ne célèbrera jamais assez les qualités d’interprétation). Et tout ici passe donc par les dialogues puisqu’aucune plage de silence n’existe au fil des 137 minutes de son récit. Ceux- ci savent trouver le parfait équilibre entre facétie et sérieux. Mais à l’inverse du cinéma d’un Abdel Kechiche qui fonctionne sur un certain épuisement en faisant des dialogues un moteur – lui, inépuisable - de sa narration, ce ping- pong permanent peine ici à tenir la distance. Car Côté ne trouve jamais vraiment le moyen de les mettre en scène, tant du côté de celles qui s’expriment que de celui de ceux qui écoutent. Et le charme culoté de la première heure laisse place à un sentiment d’ennui qui finit par occuper tout l’espace jusqu’à nous étouffer.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

LE RAPPORT AUSCHWITZ ★☆☆☆☆

De Peter Bebjak

Déportés à Auschwitz en 1942, Alfred Wetzler et Walter Rosenberg, deux jeunes juifs slovaques, ont réussi à s’enfuir le 10 avril 1944 pour sauver leur peau mais surtout révéler au monde ce qui se déroulait réellement dans ces camps de la mort. C’est de cette histoire vraie que Peter Bebjak (Leçon de classes) a décidé de s’emparer, dans un travail de mémoire qu’il juge encore plus indispensable aujourd’hui alors que l’extrême- droite a fait une entrée en force dans le Parlement de son pays. L’intention est louable mais le résultat laisse perplexe. Les débats critiques violents autour de La Liste de Schindler et du Fils de Saul l’ont montré, la représentation du quotidien des camps sur grand écran pose souvent question. Ici, Bebjak a choisi de ne jamais montrer les chambres à gaz et les fours crématoires car Wetzler et Rosenberg ne les ont jamais connus directement. Mais cela n’empêche pas d’éprouver une certaine perplexité devant la manière dont il met en scène le suspense dans ces camps de l’horreur. Sa réalisation est certes réfléchie et travaillée – de la caméra à l'épaule dominante pour accompagner ses personnages quand ils se planquent et s’enfuient au plan séquence de 13 minutes final quand ils se retrouvent face aux hommes de la Croix Rouge pour raconter leur difficulté à se faire entendre – mais elle a un côté trop visible, façon éléphant dans un magasin de porcelaine, pour qu’elle ne nous fasse pas sortir à intervalles réguliers du récit. La marche était sans doute trop haute pour lui.

Thierry Cheze

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