Les stars se sont bousculées à Cannes qui célébrait hier sa 75e édition. On a aussi vibré pour la perf de Pierfrancesco Favino dans Nostalgia de Mario Martone.
Le film du jour : Tori et Lokita de Jean-Pierre et Luc Dardenne.
Avec les frères belges, ça marche (presque) à tous les coups et lorsqu’ouvrira un musée « croisette », une pièce leur sera à coup sûr dédiée. Il faudra au moins ça pour faire entrer : deux Palmes d’or (Rosetta et L’enfant), un Prix du scénario (Le Silence de Lorna), un Grand Prix (Le gamin au vélo) et les archives des neuf (!) montées des marches. 9, qui dit mieux ? Loach, 14. Les frères sont à l’image de leur cinéma - et plus sûrement de leurs personnages - les traces de l’âge n’ont pas de prises sur eux. 2022 : voici donc Tori et Lokita, soit un gamin (avec un vélo) et une jeune fille. Ils s’aiment comme des frères et sœurs qu’ils ne sont pas vraiment. Ils viennent tous les deux d’Afrique et vivent dans un foyer à Liège (ce n’est pas vraiment dit mais on se demande pourquoi diable les Dardenne iraient voir ailleurs). Pour obtenir ses papiers, Lokita accepte presque sans broncher des agressions sexuelles répétées d’un pizzaiolo et bientôt de s’enfermer dans un sous-sol pour cultiver du cannabis. A l’aide d’une mise en scène tout en plans serrés, les belges signent un véritable thriller social avec des courses poursuite, des portes dérobées, des fuites désespérées en rase campagne... La mise en scène, elle, est sans faux col. La vie reconstituée semble battre au diapason d’un réel que Jean-Luc et Pierre auscultent avec la patience des documentaristes qu’ils ont (toujours) été. Cela n’empêche bien sûr pas la fiction. Bien au au contraire. Si les artifices ne s’affichent pas comme tels, il y a bien un système à l’œuvre. Et que ce système parvienne toujours autant à émouvoir et toucher juste, continue de sidérer même le plus aguerris des festivaliers (du moins l’espère-t-on). Quant à celles et ceux qui verraient ça pour la première fois (il y en a peut-être dans le jury), ils découvriront ébahis qu’ici plus qu’ailleurs, la pureté s’immisce avec force dans les méandres d’un monde atroce.
L'interview du jour : Cédric Jimenez pour Novembre
Un an après BAC Nord, Jimenez revient à Cannes avec un film d’action qui se concentre sur les enquêteurs des attentats du 13-Novembre. Cinq jours "embedded", entre fausses pistes, urgence et puzzles de preuves. Une fois de plus, la mise en scène impressionne et le cinéaste nous explique ici les tenants et les aboutissants de son thriller.
La perf du jour : Pierfrancesco Favino dans Nostalgia de Mario Martone
Retour à Cannes mais aussi et surtout à Naples pour Pierfrancesco Favino. Magnifique « Traître » pour Marco Bellocchio en 2019, le voilà de nouveau dans une position inconfortable vis-à-vis de la mafia dans Nostalgia de Mario Martone, en compétition officielle. Faviano, 52 ans, incarne un napolitain ayant quitté sa ville natale à l’âge de 15 ans pour revenir 40 ans plus tard. Oh surprise, rien n’a changé et les blessures qui l’ont poussé à partir sont toujours ouvertes. Bon sang ne saurait mentir. Pierfrancesco Favino avance dans le film avec un air de nounours adorable et fatigué. Son personnage est en transit de lui-même. La puissance qui émane de ce physique ne se donne pas tout de suite. Peu à peu, le feu intérieur rejaillit à la surface. Ce charisme-là pourrait tout bouffer si la part ultra-sensible de l’acteur ne le pousser à s’écarter. Dans ce Nostalgia, la ville de Naples, même en lambeaux, reste fière. Favino la regarde avec des yeux d’enfant blessé. Le Prix d’interprétation pour Le Traître lui avait échappé. Il faut corriger ça tout de suite.
La musique du jour : Le score de Serge Gainsbourg pour Si j’étais un espion de Bertrand Blier (1967)
Cannes Classics proposait aujourd’hui une rareté, le premier long-métrage de fiction Bertrand Blier, tourné quatre ans après son docu choc, Hitler, connais pas. Si ce petit thriller paranoïaque avec papa Bernard en héros hitchcockien traîne un peu la patte, le score minimaliste de Gainsbourg arrangée par Michel Colombier, est une pure merveille. L’instru entêtante rythmée comme un morceau d’électro avant l’heure avec son orchestration chiadée, évoque le travail de François de Roubaix. Chaque fois que la musique parait, le film sort de sa torpeur trop inquiète et libère le futur cinéaste de Valseuses des contraintes d’une mise en scène un brin figée.
La montée du jour : le 75ème anniversaire
Isabelle Huppert, Sophie Marceau, Jake et Maggie Gyllenhaal, Léa Seydoux et tout le jury présidé par Vincent Lindon était là. Rassemblés pour fêter le 75ème anniversaire, toutes ces stars ont formé la montée la plus sexy de tout le festival !
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