Martin Bourboulon et Romain Duris entrent en scène, Tatiana de Rosnay s'inspire de la série de Nic Pizzolatto et la productrice flashe sur la révélation de Sex Education.
Cet article a été publié initialement dans le Première n°517 (avril 2021).
Une aventure faite de stop-and-go incessants durant un quart de siècle, et une issue heureuse : Eiffel, grand film d’amour sur fond de construction de la célèbre tour, a pu voir le jour sous la direction de Martin Bourboulon.
Alors qu'il sort enfin en salles cette semaine, voici le récit de son incroyable épopée.
Par Thierry Cheze
Eiffel : un grand film populaire [critique]Les premières parties sont à lire ici et là
Nous sommes en 2018 et c’est là que Martin Bourboulon entre en scène, quand son père Frédéric évoque son nom à Vanessa van Zuylen. « Immédiatement, j’ai un flash, explique la productrice. Je voulais un réalisateur à la Gustave Eiffel. Quelqu’un d’audacieux qui allait devoir inventer un défi nouveau. » Bourboulon a un coup de foudre immédiat pour cette histoire et un seul nom pour incarner Eiffel : Romain Duris. Le nouvel attelage se met donc en mouvement. Non sans tensions, entre une scénariste qui ne veut pas se laisser déposséder du projet d’une vie et une productrice et un réalisateur qui ont aussi leur vision. Le projet pliera mais jamais ne rompra car tous ont le même but : que le film se fasse. Ce qui n’est pas encore gagné quand Thomas Bidegain vient prêter main-forte au scénario en travaillant avec Caroline Bongrand et Martin Bourboulon. En parallèle, il faut évidemment trouver celle qui campera Adrienne. Une comédienne française fait savoir qu’elle est intéressée mais ses hésitations inquiètent. Jusqu’au jour où Vanessa van Zuylen regarde Sex Education. « Et là, je vois notre Adrienne : une punk avec des piercings et un accent cockney. A priori, rien à voir. Mais j’ai un autre flash ! » Elle découvre que la jeune comédienne parle français. En une semaine, Emma Mackey dit oui et Vanessa van Zuylen part avec Martin Bourboulon à Londres la rencontrer. Leur enthousiasme contamine Pathé. Tout roule donc enfin. À ceci près que les dates de tournage de la saison 2 de Sex Education tombent. Et comme elle doit ensuite enchaîner avec Mort sur le Nil, Emma Mackey n’est plus libre avant... mars 2020. « Alors j’ai bluffé, avoue la productrice. J’ai fait croire que tout roulait. »
Pourtant, en parallèle, le film subit un nouveau coup d’arrêt. Le 15 avril 2019, Pathé retoque le scénario. Vanessa van Zuylen décide alors de contacter son amie Tatiana de Rosnay qui accepte une consultation. « Elle me dit : “Eiffel doit être un thriller à la True Detective. Il ne faut pas savoir d’emblée qui est Adrienne.” » Elle a donc l’idée du récit en flash-back que Nathalie Carter vient rendre concrète à l’écriture. Le tout à un rythme soutenu pour avoir au plus vite le feu vert de Pathé, alors que les mauvaises nouvelles se succèdent. TF1 dit non, France Télévisions aussi. Reste M6 mais les espoirs sont vite douchés. « Ils me disent qu’ils adorent mais ne font plus de films historiques ni de drames », explique la 30 productrice. « Sauf que Vanessa ne lâche jamais rien » insiste Martin Bourboulon qui construit l’univers de son film avec en tête First Man. « J’avais adoré la manière dont Chazelle nous emmenait tout autant dans la conquête de l’espace que dans l’intimité de son personnage central. C’est exactement ce que j’ambition- nais pour Eiffel. » En parallèle, Pathé valide le scénario. En juin, tous les voyants passent au vert. M6, l’Île-de-France... même les dates d’Emma Mackey !
Emma Mackey, l'atout Eiffel : "Mon envie de cinéma français était de plus en plus forte"Grande fresque populaire
La première partie du tournage se déroule de fin août à octobre 2019. La deuxième est calée pour le 17 mars 2020. Mais le samedi qui précède, Emmanuel Macron annonce le confinement généralisé du pays. « Là, je me dis que le film est mort, avoue Vanessa van Zuylen. Puis je me ressaisis et je décide de reprendre le combat. » Elle se bat alors pour redémarrer dès que possible. Elle jongle avec les assurances, les exigences sanitaires, les nouvelles dates à trouver pour Emma Mackey. Et rien ne sera vain. Le tournage de la deuxième partie reprend le 1 er juin 2020 pour cinq semaines. Débute alors une longue phase de postproduction car le film peine à trou- ver son équilibre. « On avait de belles images, des acteurs magnifiques mais trop peu d’émotion », résume Bourboulon. Mais au bout de trente-six semaines de montage, Eiffel existe bel et bien dans toute son ambition de grande fresque populaire. Sa sortie est prévue pour le 5 mai. Une date qui sera reportée en août, puis au 13 octobre. Cette fois, c'est la bonne, Eiffel sort enfin au cinéma, après vingt-quatre ans de rebondissements.
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