Retour sur les trois films, diffusés cette semaine sur France 3 et C8, où le comédien a campé le héros créé par Georges Simenon
Maigret tend un piège de Jean Delannoy (1957)
L’histoire : A Paris, Maigret enquête sur une série de meurtres commis selon le même mode opératoire et ayant eu pour victimes quatre femmes. Certain d’avoir à faire à un coupable très susceptible, le commissaire fait croire à son arrestation pour le pousser à sortir du bois
La petite histoire : Le commissaire Jules Maigret est né en 1931 sous la plume de Georges Simenon. Héros de de 75 romans et 28 nouvelles entre 1931 et 1972, il a aussi eu à de nombreuses reprises les honneurs du grand écran. Jean Gabin est ainsi le huitième comédien français à l’incarner, après notamment Pierre Renoir (La Nuit du carrefour), Harry Baur (La Tête d’un homme) et Michel Simon (Brelan d’as). Et connaît bien l’œuvre du Simenon pour avoir déjà joué dans trois de ses adaptations : La Marie du port, La Vérité sur Bébé Donge et Le Sang à la tête. Simenon approuve ce choix et derrière la caméra on retrouve Jean Delannoy qui a déjà dirigé Gabin à deux reprises dans La Minute de vérité et Chiens perdus sans colliers. Au scénario, on retrouve la patte de Michel Audiard qui prend sciemment pas mal de libertés avec le roman. Et le public est au rendez- vous. Plus de 2,6 millions de spectateurs se déplacent voir ce film qui offre à Gabin son deuxième succès en quelques mois avec Les Misérables de Le Chanois où il campe Jean Valjean.
Maigret et l’affaire Saint- Fiacre de Jean Delannoy (1959)
L’histoire : Maigret retourne dans sa ville natale où la comtesse de Saint-Fiacre a reçu une lettre anonyme lui annonçant qu'elle mourra le mercredi des Cendres... Une prophétie qui se révèle exacte et dont le commissaire va tenter de retrouver l’auteur.
La petite histoire : Ni Jean Gabin, ni Jean Delannoy n’avaient le projet ou l’envie de tourner un deuxième Maigret. Mais l’insistance des producteurs ont eu raison de leurs réserves. Et comme on ne change pas une équipe qui gagne, Michel Audiard est aussi de nouveau de la partie pour les dialogues de l’adaptation de ce roman particulier dans la saga Maigret : celui où on explore son passé puisque son père a travaillé comme régisseur du domaine des Saint- Fiacre, alors que lui était enfant. Le travail d’Audiard et les libertés qu’il prend avec le roman originel hérissent une fois encore les puristes. Mais ses mots qui chassent un à un ceux de Simenon expliquent cependant une fois encore le succès populaire de ce Maigret. La comédie et la truculence bousculent ici l’introspection du commissaire qui dominait le livre. Plus de 2,8 millions de spectateurs seront cette fois- ci au rendez- vous. Le troisième volet devient donc inévitable
Maigret voit rouge de Gilles Grangier (1963)
L’histoire : Maigret poursuit des gangsters américains cherchant à récupérer à Paris un témoin gênant, protégé par le FBI.
La petite histoire : « Gabin a fait un travail hallucinant. Ca me gêne du reste un peu parce que je ne vais plus pouvoir voir Maigret que sous les traits de Gabin ». Georges Simenon apparaît à travers ces mots plus que jamais enthousiaste mais quelque chose semble cassé. La Nouvelle Vague est passée par là et renvoie ce nouvel épisode de Maigret (adapté de Maigret, Lognon et les Gangsters publié en 1952) au « cinéma de papa » dépassé dont ses thuriféraires sont les grands pourfendeurs. Et ce alors que, dans les librairies, Frédéric Dard devient l’auteur de langue française le plus vendu, ringardisant un temps Simenon dont le lectorat a vieilli. Gabin impose ici à la réalisation Gilles Grangier qui l’a déjà dirigé à neuf reprises depuis La Vierge du Rhin en 1953. Et côté écriture, Michel Audiard laisse la place à Jacques Robert, l’auteur de Marie Octobre (porté à l’écran par Duvivier en 1958) ou encore de l’adaptation de la série des Gorille, successivement incarné par Lino Ventura et Roger Hanin. Maigret voit rouge a beau réunir 2 millions d’entrées, Gabin décide de remiser au vestiaire le costume de Maigret. Et aucun comédien français ne l’a, depuis, réincarné sur grand écran. Sans doute parce qu’à la télévision, Jean Richard puis Bruno Cremer ont, l’un après l’autre, durablement lié ce personnage à leurs visages.
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