En 2016, Paul Greengrass revenait aux affaires avec Matt Damon en tentant de faire de Bourne un héros de son époque.
Mise à jour du 5 septembre : Jason Bourne revient ce soir sur France 2. Que vaut cette suite de la saga portée par Matt Damon ? Voici notre verdict, publié à sa sortie, en 2016.
On avait quitté Jason Bourne alors qu’il avait enfin récupéré la mémoire. On le retrouve loin de tout, retiré dans un pays de l’Est, éloigné du marigot de la CIA et bien décidé à mener une vie paisible. Mais quand Niki découvre que son père a joué un rôle obscur dans la conception du programme Treadstone, Jason va être obligé de reprendre du service et affronter deux ennemis redoutables. The Asset, un tueur joué par Cassel et un ponte de la CIA incarné par Tommy Lee Jones. Près de 10 ans ont passé depuis que Matt Damon et Paul Greengrass ont rendu leurs badges.
Dix années pendant lesquelles le monde et le cinéma ont complètement changé. Damon s’est imposé comme une star A list qui n’a plus besoin de saga pour cartonner ; le film d’action (plus industrialisé et dopé aux superhéros) n’a plus grand chose à voir avec ce que Greengrass avait contribué à calibrer avec ses deux opus. Et la paranoïa post-11 Septembre a laissé place à une crise économique doublée d’un terrorisme aveugle qui frappe partout et n’importe comment.
La saga Jason Bourne passée au crible
Efficace et percutant
Il fallait donc choisir : changer de style pour se couler dans les nouveaux horizons esthétiques du blockbuster (voire les modifier de nouveau) ou remettre à niveau la dimension politique de la série. Greengrass et Damon ont visiblement privilégié la première. De manière très symbolique le script est signé par le monteur et le réalisateur comme s’ils assumaient consciemment de plaquer leur histoire sur leur style, qui pour le coup n’a pas changé. Percutante, réaliste et viscérale, la caméra de Greengrass colle toujours aux personnages et aux lieux qu’elle capture à la volée.
C’est impressionnant. Très. Surtout dans la séquence de début où Bourne tente de fuir un tueur au milieu d’une manif. Mais le pendant, c’est cette impression de voir un film de 2004 qui couvrirait l’actualité de 2016. Car Greengrass et Damon ont donc tenté de rendre un peu de pertinence à l’agent amnésique des 00’s. Bourne se retrouve dans une manif anticapitaliste en Grèce, affronte un mogul de l’ère Post-Snowden et doit se battre avec une clique de fonctionnaires qui font alliance avec un gourou des médias.
Le résultat est un peu étrange : toujours aussi efficace et percutant (le combat dans les égouts contre Cassel et Damon est un sommet de la série par sa brutalité nette, sa rapidité d’exécution et le refus de toute virtuosité ou la course poursuite à Vegas monstrueuse, encore plus que la scène à Moscou de Supremacy), le film ressemble à un spectre revenant hanter une autre époque. Impossible de ne pas penser à une réplique balancée à l’autre super espion : "je pense que vous êtes un dinosaure, 007", une relique d’un autre temps. Et c’est exactement ça : Jason Bourne ne veut surtout pas changer, mais tente de se réinventer. Pour ne pas finir amnésique ?
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