Avec son prochain film First Love, Le Dernier Yakuza, le réalisateur veut montrer que "même un outsider peut avoir une belle histoire d’amour."
"Mon style, c’est de ne pas avoir de style." Le ton est donné dès le début de la masterclass donnée par le réalisateur à l'occasion du Festival du Film International de Singapour, dans des propos rapportés par The Hollywood Reporter. Takashi Miike, auteur prolifique s’étant principalement fait connaître avec des films de yakuza dès les années 90, comme Les Affranchis de Shinjuku, s’exprimait récemment sur son œuvre. Pour lui, pas de doute : ce qui prime dans ses longs-métrages, c’est le côté romantique. Et par-dessus tout, il ne supporte pas d’être cantonné à un seul genre.
"Certaines personnes ont des réalisateurs iconiques en tête," affirme-t-il, "ou veulent que les auteurs se concentrent sur des genres de films qu’elles ont déjà vus avant. J’estime que c’est une perte de temps et d’énergie. Je pense que la manière qu’ont les gens de voir ma filmographie dépend avant tout de quels films ils ont déjà vus. Ce sera chaque fois différent et les opinions divergent toujours." Et cette filmographie peut être en effet attaquée sous de nombreux angles, tant elle est vaste. Depuis ses débuts, Miike a dirigé une soixantaine de longs-métrages, en plus de 23 films réservés au V-Cinéma (V étant pour Video, les œuvres en question ne passant pas par la case cinéma.)
Festival Lumière 2019 : Bong Joon-ho s'est exprimé sur son cinémaEt au milieu de ce maelstrom de créations, ressort toujours la touche Miike, une excentricité folle et parfois – souvent – gore. Son style, il ne l’applique à ses scénarios qu’au moment du tournage : comme il l’explique dans sa masterclass, il accepte de nombreux scénarios, prend le temps de signer les contrats, et c’est seulement lorsque la production est prête à être lancée… qu’il rajoute sa touche personnelle. Comme pour l’affrontement final de Dead or Alive, lorsque les deux personnages se font face et abandonnent le duel initial au pistolet pour passer au bazooka et aux boules d’énergie. Un combat aboutissant à l’anéantissement du Japon et d’une bonne partie des pays alentours…
"Ces deux acteurs étaient particulièrement populaires, alors je me suis dit, pourquoi se contenter d’une scène trop courte ? Leur énergie à l’écran était énorme, je ne me voyais pas passer à côté et manquer l’opportunité de faire quelque chose de spectaculaire. C’est cette scène qui m’a appris qu’il faut être divertissant." Et ce n’est pas la seule fois que Takashi Miike ajoutera du temps d’écran à ses comédiens. Le réalisateur tient à ce que chaque personne travaillant dans son film ait son moment de gloire : "Je veux qu’ils se sentent bien dans leur peau. Je veux qu’ils rentrent chez eux et se disent "Cette bière a un meilleur goût qu’hier.""
Pour autant, un tel cinéma peine à se faire une place dans le pays dont est originaire l’auteur, qui se sent exclu, préférant rester du côté de ses personnages et scénarios excentriques : "En ce moment au Japon il y a deux tendances. D’un côté, on trouve les blockbusters, de l’autre les comédies romantiques légères qui vous font beaucoup pleurer. Du coup, mes récits d’outsiders sont en quelque sorte chassées des cinémas. Mais je veux montrer que même un outsider peut avoir une belle histoire d’amour." Et justement, son dernier long-métrage porte cette volonté jusque dans son titre : First Love, le dernier yakuza est attendu dans les salles françaises pour le 1er janvier 2020.
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