De Smaug à Krokmou en passant par Falkor et Mushu, Première survole les plus beaux dragons du cinéma.
Créature mythologique, le dragon est un gardien sévère ou un symbole du mal, une créature démoniaque. Puissance céleste, marine ou terrestre, c’est aussi une formidable machine à fantasmes dont le 7e art s’est emparé très tôt. Au moment où Dragons 3 : Le Monde caché débarque sur les écrans, en février 2019, Première revenait sur les vingt dragons les plus fous, flippants, drôles ou simplement saisissants, que l’on ait vus au cinéma. Un top à retrouver au sein du n°493 (avec Captain Marvel en couverture), que nous mettons en ligne pour rêver un peu en cette période de fêtes.
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Le Zouwu (Les Animaux fantastiques : Les Crimes de Grindelwald, David Yates, 2018)
C’est le dernier qui nous vient en tête (et c’est aussi le dernier du classement), sans doute parce qu’on vient de le découvrir sur grand écran, apparaissant en plein Paris face au magizoologiste Norbert Dragonneau dans la suite des Animaux fantastiques. Ce dragon chinois – ou plutôt comme le décrit J. K. Rowling, un chat de la taille d’un éléphant bariolé comme il faut et à fourrure de lion – est une créature inédite dans l’univers de Harry Potter dont le bestiaire est pourtant bien rempli. On ne le voit qu’un instant, il ne fait pas avancer l’intrigue, mais il est suffisamment flamboyant pour marquer les esprits. Le principe essentiel du dragon.
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Elliott — (Peter et Elliott le dragon, Don Chaffey, 1977)
Certes, le film est un semi-navet, une aberration du catalogue Disney irregardable aujourd’hui et bourré de chansons insupportables. Mais tous les gamins qui ont grandi devant peuvent témoigner qu’à l’époque les apparitions d’Elliott le dragon tenaient de la pure féerie – le mélange d’animation et de prises de vues réelles avait alors une qualité quasi hallucinatoire auprès des kids. Dessiné par les génies Don Bluth et Ron Clements, Elliott ne ressemblait pas à grand-chose avec ses petites ailes roses, sa touffe de poils sur la tête et ses grognements de gros toutou. Mais on l’aimait.
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Le mutant — (Willow, Ron Howard, 1988)
Le « dragon » du film de Ron Howard n’est pas techniquement parlant un dragon : il s’agit à la base d’un troll qu’un sort du (petit) héros a transformé en ce qui se rapprocherait davantage d’un léviathan bien crade à deux têtes – mais qui crache quand même du feu. D’une certaine façon, il incarne l’apothéose dégénérée du design de monstre de fantasy 80s qui ne fait même pas l’effort d’être un peu travaillé.
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Jabberwocky — (Jabberwocky, Terry Gilliam, 1977)
Hommage cintré aux films de chevalier et à l’univers d’héroïc fantasy, le premier film de Terry Gilliam abrite la créature la plus bizarre de sa création, un dragon à la fois flippant et grotesque, le « Jabberwocky », qui semble avoir été conçu un soir de beuverie par Stan Winston et Jim Henson. La bataille finale a beau être un sommet de kitsch, elle hante encore de façon inattendue la mémoire de ceux qui l’ont vue.
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La dragonne — (Shrek, Andrew Adamson & Vicky Jenson, 2001)
Il faut la voir battre des cils avec une précision comique chirurgicale pour draguer l’Âne, avant de lui lancer au visage un cœur de fumée. Antagoniste, love interest, puis héroïne quand elle dévore Farquaad dans la scène du mariage : la dragonne joue tous les rôles dans Shrek. Le premier dragon genré de l’histoire du cinéma.
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Madame Mim — (Merlin l’enchanteur, Wolfgang Reitherman, 1964)
Climax de ce film initiatique, le duel de magie entre Merlin et Madame Mim, observé de loin par Moustique changé en oiseau, a terrorisé des générations d’enfants en raison de la transformation subite de la sorcière en dragon hideux – sur le point de prendre le dessus sur son rival. Musique tonitruante et couleurs vives accentuent le côté effrayant de la bête dont la laideur n’est rien à côté des pustules, provoquées par un Merlin transformé en virus, qui finiront par recouvrir son corps. Dégoût assuré.
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Taro — (Le voyage fantastique de Sinbad, Gordon Hessler, 1974)
Certes, il ne squatte pas les écrans de longues minutes mais ce saurien cracheur de flammes au savoureux look à l’ancienne n’en marque pas moins les esprits! Et vient pimenter les aventures du célèbre marin en route vers l’île de Lémuria où il devra faire face aux noirs desseins d’un sorcier empêcheur de tourner en rond. Logique : cette créature est l’œuvre du magicien des effets spéciaux Ray Harryhausen, déjà présent pour Le Septième Voyage de Sinbad (premier volet de cette trilogie) et dont l’hydre créée pour Jason et les argonautes a aussi marqué l’histoire du 7e art.
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Le Magyar à pointes — (Harry Potter et la coupe de feu, Mike Newell, 2005)
Si l’on voit finalement assez peu de dragons dans la saga de J. K. Rowling (une poignée en dix films), celui de La Coupe de feu est très impressionnant avec ses pointes et ses dents affûtées. Crachant des flammes gigantesques contre Harry, il s’envole sur les toits de Poudlard au beau milieu de l’épreuve (les concurrents doivent voler son œuf), ce qui donne lieu à une course-poursuite mémorable autour du château.
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Dragon — (Les peureux chevaliers de la table ronde, Fritz Freleng, 1958)
Il n’y a pas que les créatures démoniaques ou effrayantes... Bienvenue dans le monde merveilleux des cartoons Looney Tunes. Dans cette parodie inspirée des Chevaliers de la Table ronde avec le bondissant Bugs en bouffon du roi, on trouve un dragon plutôt patraque, bien « enrhubé » et dont chaque éternuement éteint la flamme censée sortir de sa gueule. Il est là pour aider son maître, Sam le Pirate, à rattraper Bugs Bunny venu dans leur château voler... une « épée qui chante ». On lui aurait bien donné l’oscar du dragon le plus empoté. Ces Peureux Chevaliers recevront en 1958 celui du court métrage d’animation.
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Falkor — (L’histoire sans fin, Wolfgang Petersen, 1984)
On a vu un dragon à tête de lion, on verra bientôt celui à tête de chat, et voici celui à tête de chien. S’il peut sembler vieillot aujourd’hui, Falkor, le fidèle ami et portebonheur d’Atreyu dans L’Histoire sans fin, a fait rêver des générations de spectateurs en s’envolant avec flegme et humour vers l’aventure, au-delà des nuages, en direction d’un monde où l’imagination est reine.
L’Histoire sans fin dans Première : "Quand un réalisateur allemand ose se lancer sur les traces de George Lucas"10
Le dragon — (La légende de Beowulf, Robert Zemeckis, 2007)
On peut reprocher beaucoup de choses au deuxième film de Robert Zemeckis en performance capture, mais certainement pas celui d’avoir joué « petits bras » avec son dragon. Archétypal, chtonien, son monstre est impressionnant. Si tous les autres personnages ont l’air plus morts que vivants, le cœur de la créature bat si fort à l’écran qu’il oblige Zemeckis à sublimer sa mise en scène pour lui donner la puissance visuelle qu’elle mérite (les ruptures d’échelle dans la scène du « vol » et celle de sa mise à mort sont époustouflantes). Douze ans plus tard, c’est toujours aussi beau et effrayant.
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Le grand dragon — (Excalibur, John Boorman, 1981)
Ici, pas de marionnette géante en caoutchouc et en mousse pour représenter le Grand Dragon invoqué par le sorcier Merlin (Nicol Williamson, goguenard). À la place du monstre, on ne verra que son souffle. Soit une immense traînée de brume tentaculaire qui permet de cacher une armée, ou de galoper dans les airs pour atteindre un donjon. Le dragon qui n’en est pas un. Une des (nombreuses) très belles idées de cinéma de la vision du mythe arthurien par John Boorman.
08
Mushu — (Mulan, Tony Bancroft & Barry Cook, 1998)
« Mes ancêtres ont envoyé un lézard pour me sauver ? » Même s’il est minuscule, Mushu est bien un dragon. Un dragon génial, vraiment génial, se présentant devant l’héroïne en être de feu surpuissant avant de lui dévoiler sa vraie nature. Censé être un protecteur indestructible, il est surtout l’élément comique ir résistible de cette production Disney. « Y a pas d’lézard ! », assure-t-il à Mulan avec (en VF) la voix de José Garcia.
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Maléfique — (La belle au bois dormant, Wolfgang Reitherman, Eric Larson, Les Clark & Clyde Geronimi, 1959)
Dernier Disney à être porté par une authentique vision arty, le très stylisé La Belle au Bois dormant renferme le plus grand vilain du studio, en l’occurrence une vilaine : Maléfique. Lors du fabuleux combat final contre le prince charmant, la sorcière prend l’apparence d’un immense dragon crachant des gerbes de feu verdâtres semant la désolation autour d’elles. Mieux qu’un dragon, une incarnation du mal absolu, le réceptacle de nos peurs primitives qu’on dirait sorti d’une gravure du XIXe siècle.
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Vermithrax Pejorative — (Le dragon du lac de feu, Matthew Robbins, 1981)
Un classique du genre et le premier à utiliser le go motion, une variante de la stop motion où les mouvements du dragon étaient programmés par ordinateur. Une réussite technique et cinématographique : le plan de l’apparition de Vermithrax Pejorative (son petit nom) au milieu des flammes a nourri l’imaginaire de nombreux cinéastes. « Le meilleur dragon du cinéma » selon l’écrivain George R. R. Martin et « peut-être le design de créature le plus parfait de tous les temps » pour Guillermo del Toro. Rien à ajouter.
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Le dragon — (Les Nibelungen, Fritz Lang, 1924)
Ici, le dragon n’apparaît que dans une scène. Mais une scène chez Fritz Lang dans ce diptyque de cinq heures vaut un film entier chez d’autres. Avec Thea Von Harbou, Lang revisite les grandes légendes germaniques et scandinaves. Et pour s’éloigner de la version wagnérienne, il met les arts plastiques au centre de sa mise en scène. Avec en point d’orgue ce dragon de seize mètres animé par huit hommes placés dans ses entrailles. Monumental, effrayant, primitif. Archétypal, comme ce film controversé.
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Les dragons — (Le règne du feu, Rob Bowman, 2002)
Difficile de mettre en avant un dragon particulier dans Le Règne du feu, série B quasi parfaite peuplée de créatures cracheuses d’un feu apocalyptique. Qu’ils détruisent un château médiéval ou traquent Christian Bale et Matthew McConaughey dans les ruines de Londres, chaque apparition de ces monstres est l’occasion de se souvenir à quel point le film était en avance sur son temps. Terrifiant, crédible et mortel : le dragon numérique séminal date de 2002 et a toujours une gueule de premier de la classe.
03
Haku — (Le voyage de Chihiro, Hayao Miyazaki, 2002)
Tour de force technique et artistique au service d’une histoire dominée par les puissances de l’irrationnel, Le Voyage de Chihiro explore par les yeux d’une petite fille un monde parallèle peuplé d’animaux, de fantômes, de sorcières et de dieux difformes. Au cours de ce fastueux cauchemar, l’héroïne découvre Haku, un esprit qui s’est incarné dans le corps d’un gamin de 12 ans, qui travaille pour la sorcière Yubaba et se transforme à volonté en dragon. Mais pas n’importe lequel : il est le grand dragon blanc de la mythologie japonaise, un Ryu au corps de serpent, à la gueule de loup et à la crinière verte... aussi bref soit-il, son déploiement céleste en font l’une des créatures volantes les plus fascinantes de l’univers de Miyazaki. Et du cinéma en général.
02
Smaug — (Le Hobbit : la désolation de Smaug, Peter Jackson, 2013)
Avant d’être détourné en personnage comique ou en grosse peluche attachante, le dragon était un symbole de force et de destruction dans l’imaginaire populaire. En partie grâce à Smaug, créature terrifiante du Hobbit de Tolkien, prête à dévorer toute personne s’approchant trop près de son trésor. La vision de Peter Jackson illustre magnifiquement cette puissance à l’aide d’une performance capture de qualité. Entendre Benedict Cumberbatch menaçant Bilbo (Martin Freeman, son complice de Sherlock) de sa voix caverneuse avant de voir Smaug déployer sa splendeur en attaquant Lacville est un sacré spectacle.
01
Krokmou — (Dragons 3 : le monde caché, Dean Deblois, 2019)
Jusqu’alors, les dragons étaient le seul problème de cette franchise freudienne (le parcours d’un gamin qui, à la mort du père, devient roi et doit assumer une charge trop lourde pour son âge). Dean DeBlois avait réussi à créer un univers épique, sombre et somptueux, mais ses créatures fantastiques n’étaient pas vraiment satisfaisantes. La faute à un design simpliste et enfantin. Mais dans ce dernier chapitre, toujours aussi spectaculaire et poétique, Krokmou a désormais fière allure. Sa silhouette impressionne, sa noirceur ténébreuse hypnotise et sa maladresse (dans les incroyables scènes de séduction) émeut vraiment. Ce n’est pas seulement dû aux progrès techniques. Le film réussit à mettre en scène la vraie puissance symbolique du dragon, celle que Rilke avait su percevoir : « Tous les dragons de nos vies, écrivait le romantique autrichien, sont peut-être des princesses qui attendent de nous voir beaux et courageux. Toutes les choses terrifiantes ne sont peut-être que des choses sans secours, qui attendent que nous les secourions. » Au fond, chez le poète comme dans cette saga, les vrais dragons ne viennent pas du ciel ou de la terre. Ils sont d’abord en nous, reflets de nos peurs et prolongement de nos fantasmes.
Dragons : L'amitié entre Krokmou et Harold en trois scènes craquantes
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