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Trois ans après Galveston, Mélanie Laurent revient derrière (et devant) la caméra en travaillant pour la première fois pour une plate- forme. On pourra gloser sur le regret de ne pas pouvoir admirer au cinéma le beau travail sur la lumière de Nicolas Karakatsanis, le directeur de la photo très éclectique de Triple 9, Moi, Tonya et Cruella. Mais au moins, le film existe dans les conditions qui ont permis à la cinéaste de s’emparer à sa main du roman de Victoria Mas, Prix Renaudot des Lycéens 2019 et inspiré de faits réels qui se sont déroulés au 19ème siècle. Ce « bal des folles » avait en effet lieu chaque année au cœur de l’hôpital Salpêtrière à l’initiative du docteur Charcot qui invitait le tout- Paris à venir contempler ses patientes comme on irait au zoo. Certaines étaient réellement malades mais la plupart bel et bien saines d’esprit et internées de force par des proches effrayées par leur liberté ou leurs dons surnaturel. A l’image de l’héroïne de ce récit, Eugénie, capable de communiquer avec les défunts, trop lumineuse et passionnée pour ce monde écrasé par la domination masculine. Jamais écrasé par la reconstitution d’une époque, Mélanie Laurent filme ce chœur des femmes à bonne distance. Et prend garde à raconter cette histoire par le prisme d’un groupe (via un casting épatant : Lou de Laâge, Lauréna Thellier, Alice Barnole, Coralie Russier…) et non d’une individualité unique. Comme pour offrir enfin la parole à ces voix bafouées, muselées, étouffées, avec un réel talent à créer la montée en puissance d’une tension dont l’explosion ne déçoit pas. Une réussite.