Première
par Thomas Baurez
Attendu comme le loup blanc au dernier Festival de Cannes après la déconvenue anglo-saxonne de Ma vie avec John F. Donovan, Xavier Dolan revenait en costard sur des bases plus modestes. Matthias & Maxime est vendu comme un film de potes, un Petits Mouchoirs propre à faire le point sur la vie et les blessures intimes qui vont avec. Dolan, derrière et devant – c’est là aussi un retour, six ans après Tom à la ferme –, apparaît sur l’écran avec une tache de vin sur le visage dans une sorte d’hommage inattendu à Mikhaïl Gorbatchev. Elle est là, cette tache, voyante mais sans trop. Disons qu’elle revendique d’emblée quelque chose. Maxime a des failles intérieures qui bientôt s’étaleront sur toute la surface du cadre. Pour l’heure, il aime confusément son pote Matthias (Gabriel D’Almeida Freitas) à la faveur d’un baiser de fiction arraché sur le tournage d’un court métrage. Maxime ne se cache pas trop. Matthias semble l’aimer en retour mais n’assume pas. Ici la tendresse prend des formes agressives dès lors que les sentiments débordent. Du 100 % Dolan donc, mais sans l’énergie fragile et assumée qui fait que, in fine, on se laisse emporter par le flot (le fameux effet Mommy). Ici, le coup semble déjà joué d’avance et la sincérité qui accompagne les gestes ne suffit pas (plus !) à émouvoir. Témoins ces scènes avec l’immanquable mère larguée et injuste envers son rejeton, posées là comme une signature au bas d’un croquis pour prévenir de la contrefaçon. Matthias & Maxime a l’allure juvénile et maladroite d’un premier film. Sur ce point, il en serait presque touchant.