Première
par Damien Leblanc
On sait combien François Ozon aime, depuis maintenant vingt-cinq ans qu’il officie au cinéma, observer les failles et culpabilités humaines en passant malicieusement de la comédie à la tragédie. Après la tonalité drôle et ludique de Mon Crime, le cinéaste revient ainsi à une intrigue criminelle en privilégiant cette fois les zones d’ombre, l’ambiance dramatique et les couleurs grises de l’automne. Marqué par son envie de filmer « des actrices d’un certain âge » et de saisir la beauté mystérieuse des rides sur leurs visages, Ozon raconte l’histoire d’une grand-mère qui mène une retraite en apparence paisible en Bourgogne. Lors des vacances de la Toussaint, un empoisonnement aux champignons, dont on ne sait pas s’il est volontaire, déclenche pourtant tout un engrenage qui mènera à une enquête de police. Avec cette question : l’octogénaire a-t-elle voulu tuer sa propre fille, avec qui elle entretient des rapports complexes ? Si le scénario prend plaisir à laisser planer les non-dits, le rythme souffre précisément de cette indécision qui nous laisse entre deux feux et cadre assez mal avec l’ambition d’un thriller vénéneux. Car plutôt que de nous inciter à remplir émotionnellement les hors-champs, ces ellipses narratives limitent la possibilité de ressentir un authentique vertige. Reste un honorable casting, porté par l’ambivalente Hélène Vincent et l’écorché Pierre Lottin, qui forment une famille recomposée et dysfonctionnelle face à laquelle on aurait adoré être encore davantage troublés.