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Le film offre d’emblée son tempo et sa problématique le temps d’une première séquence, où Toni (Camille Cottin) au volant d’une voiture voit toute sa smala composée de cinq ados, s’entasser dans l’habitacle. C’est joyeux, plein d’énergie, volontairement idéalisée, puis le ton change doucement. A la radio une chanson résonne, vieux tube dont on comprend qu’il illustre l’heure d’une gloire éphémère pour Toni, jadis vedette de la chanson. Les enfants chantent ce morceau qu’ils connaissent forcément par cœur, comme un morceau d’héritage intime qui organise immédiatement une fusion. L’animateur rompt brutalement l’enthousiasme général et balance un commentaire sur le caractère censément ringard du titre en question. Sur le visage de Toni, s’imprime une douleur, celle du temps qui a passé et la renvoie à ce rôle de mère solo, recroquevillée (effacée ?) sous le poids de sa progéniture. Toni en famille entend, on s’en doute, raconter comment cette super héroïne du quotidien va essayer de réapprendre à rêver pour elle. Le cinéaste qui raconte ça a seulement 23 ans et c’est déjà son deuxième long métrage après Les Drapeaux de papier (2018) qui faisait déjà de la cellule familiale un refuge et une prison. Ce nouveau film parvient avec délicatesse à faire exister et coexister cette myriade de personnages et de cerner leurs préoccupations communes. C’est donc au milieu d’une relatif tumulte que Toni doit retrouver une place. L’intelligence du cinéaste est de croire jusqu’au bout que cette émancipation ne s’oppose pas forcément à cette idée de groupe.