Pupille retrace la procédure de l’adoption avec une précision chirurgicale et une intensité émotionnelle inouïe.
De Jeanne Herry, réalisatrice du bancal Elle l’adore, on n’attendait pas ça. Pas ça ? Du réalisme documentaire, de l’ambition formelle, un découpage audacieux, des contre-emplois emballants (Gilles Lellouche en parent d’accueil, renversant)... Tout ça est dans Pupille, récit à quatre voix sur la façon dont est encadrée en France une adoption d’enfant abandonné à la naissance : de la mère biologique en détresse à la mère adoptive en attente, en passant par les assistants sociaux rigoureux et les héroïques familles d’accueil par intérim, tous les acteurs concernés ont droit à leur arc narratif, où priment concision et humanité. « L’adoption, ce n’est pas seulement la rencontre de trois personnes – la mère, le bébé, l’adoptant(e) –, c’est la rencontre de trois histoires », dit l’évaluatrice à celle qui est sur le point d’abandonner son enfant sans un mot. La parole est ainsi au coeur de l’action de chacun des protagonistes qui doivent convaincre de leurs motivations pour les uns (les mères, biologiques et de cœur) et du bien-fondé de leurs jugements pour les autres (le personnel administratif). Herry montre parfaitement l’extrême professionnalisme à l’œuvre à tous les stades du processus et son corollaire, le manque d’empathie, qui peut s’immiscer malgré lui. La concurrence entre services sociaux et hospitaliers, voire entre agents d’un même service, est également pointée du doigt sans qu’à aucun moment, ce didactisme n’altère la générosité du regard de la réalisatrice sur ses personnages.
Pupille, en salle le 5 décembre 2018
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