De Porco Rosso en passant par Les Mutants de l’espace et Ma vie de Courgette.
L'an dernier, le Festival d'Annecy n'a pas pu fêter ses 60 ans comme il se doit à cause de la crise sanitaire. Qu'à cela ne tienne, le "plus beau des festivaux" est de retour en 2021, et il n'est pas trop tard pour célébrer l'histoire de cet évènement qui a aidé à donner à l'animation ses lettres de noblesses. La preuve avec ces dix chefs-d'oeuvres qui ont, chacun à leur façon, révolutionner le genre.
Porco Rosso de Hayao Miyazaki (Cristal du long-métrage 1993)
L’animation japonaise était encore sous-estimée au milieu des années 90. Elle fait une entrée folle avec cette fable qui raconte les combats d’un cochon antifasciste écumant le ciel à bord d’un hydravion rouge. Beauté des plans, souffle épique, surréalisme métaphysique. L’un des plus beaux films du maître. Donc du monde.
A voir sur Netflix
L’homme qui plantait des arbres de Frédéric Back (Cristal du court-métrage 1987)
Après son Oscar pour Crac en 1982, l’illustrateur québécois Frédéric Back décide d’adapter à l’écran une nouvelle de Jean Giono qui raconte la vie d’un berger décidant, juste avant la Première Guerre mondiale, de planter des arbres dans une région déserte. Ce manifeste écolo, salué pour la beauté de son animation et la qualité des voix – Philippe Noiret en VF – valut à Back sa deuxième statuette et un triomphe à Annecy qui découvrait là le lyrisme et le panthéisme d’une œuvre essentielle.
Le Vieil Homme et la Mer d'Alexandre Petrov (Cristal du court-métrage 2000)
Délaissant quasiment les pinceaux, le dessinateur Alexandre Petrov, secondé par son jeune fils Dimitri, a peint du bout des doigts, dans des dégradés de couleurs et camaïeux de bleu, ces tableaux qui composent les vingt minutes d’un film mêlant avec adresse force créatrice et prouesse technique. De 24 images par seconde, l’animation passe au rythme de 24 peintures par seconde.
La Vieille Dame et les Pigeons de Sylvain Chomet (Cristal du court-métrage 1997)
Avant Les Triplettes de Belleville et L’Illusionniste, Sylvain Chomet se faisait la main avec un court métrage aussi fascinant qu’absurde, où un policier se déguise en pigeon pour être nourri par une vieille dame. Tout Chomet est déjà là, dont son obsession pour les « gueules » et les personnages bizarroïdes. Avec, ici, une petite touche de cruauté qui rapproche La Vieille Dame et les Pigeons d’un conte de Grimm.
Les Mutants de l’espace de Bill Plympton (Cristal du long-métrage 2001)
Le sacre de la contre-culture et de la dissidence. Avec ce long métrage, l’infernal Bill Plympton, punk de l’animation, signe une parodie de la parodie Mars Attacks ! ou des originaux La Guerre des mondes et Independence Day. Style crayonné et anguleux, animation réduite, furia anti-establishment... dans son film, Plymton délaisse vite la satire pour un shoot de surréalisme dont le but est clair : tourner en dérision la conquête de l’espace et plus globalement le libéralisme yankee.
À voir en VOD sur Orange et Univers Ciné
Renaissance de Christian Volckman (Cristal du long-métrage 2006)
Un projet fou à l’époque qui impressionne par l’ampleur de ses visions 3D. Ce polar d’anticipation qui convoque autant Metropolis que Blade Runner entend tirer l’animation vers le haut en ne reculant devant aucune difficulté ; Volckman ose l’innovation technologique (la 3D, la motion capture balbutiante), et allie pari technique et cinéma grand spectacle. Un manifeste de l’animation tricolore resté bizarrement sans héritier.
Coraline de Henry Selick (Cristal du long-métrage 2009, ex aequo avec Mary et Max)
Une dose de Lewis Carroll, un soupçon de G.K. Chesterton et surtout, un style brut et terrifiant : cette déclaration d’amour à la culture gothique – et aux films d’animation des pays de l’Est – subjugue par son sens du détail et sa créativité. Henry Selick prouvait aussi que le cinéma d’animation américain, loin des mièvreries Disney de l’époque, pouvait encore concilier radicalité artistique et visions adultes.
Ma vie de Courgette de Claude Barras (Cristal du long-métrage 2016)
Sur un scénario de Céline Sciamma, qui adapte ici le roman Autobiographie d’une courgette de Gilles Paris, Claude Barras regarde le monde à hauteur d’enfant. Un film très tendre sur l’abandon, poétique et social à la fois, capable de faire oublier la complexité de son dispositif et de distiller de l’émotion brute à travers ses marionnettes filmées en stop motion. Après ça, l’animation européenne ne sera plus jamais la même.
À voir en VOD sur Orange, FilmoTV, MyTF1 VOD, Bbox VOD, Rakuten TV, Canal VOD et iTunes
Fantastic Mr. Fox de Wes Anderson (Cristal du long-métrage 2010)
En 2009, Wes Anderson passe à l’animation avec cette adaptation d’une nouvelle de Roald Dahl. Comme les productions en volume de Burton, Mr. Fox synthétise toute l’œuvre et toutes les thématiques de l’auteur de La Vie aquatique. Très éloignée des canons hollywoodiens, son esthétique paraît plus marquée par les grands maîtres russes et doit également beaucoup à Tati. Une merveille lo-fi, parsemée de références musicales et cinéphiliques pop, rappelant que l’animation peut aussi être un terrain de jeu alternatif pour les plus grands cinéastes live.
À voir sur Amazon Prime Video et en VOD
Kirikou et la Sorcière de Michel Ocelot (Cristal du long-métrage 1999)
Un premier film d’animation, inspiré d’un conte africain avec des personnages à moitié nus ? À l’époque personne n’y a cru, et Michel Ocelot a dû se battre pour imposer sa vision et mener à bien cette merveille à l’inspiration et au design touchés par la grâce. Devenu culte avec les années, ce film qui triompha à Annecy marquait surtout la naissance d’une troisième voie entre la vague des dessins animés américains et les œuvres japonaises. Le made in France venait de trouver son maître.
À voir sur Netflix, OCS et en VOD
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