En septembre, la fréquentation dans les salles a connu un rebond et un sursaut est attendu pour le dernier trimestre. Mais 2025 ne sera pas une bonne année. L’addition est salée et la question brûlante : s’agit-il d’un simple accident de parcours ou d’une panne plus profonde pour le secteur ?
Août aura donc transformé les salles obscures en terrains vagues. Moins de 10 millions de billets vendus, en chute de 29,4 % par rapport à 2024 : le pire été depuis les années 90. Sur les huit premiers mois de 2025, le compteur accuse déjà 18 millions d’entrées de retard. Et septembre n’a rien arrangé : le mercredi 10 plafonnait à 1,1 million d’entrées, pire score depuis 2020... même si le bilan de ce mois de rentrée est finalement plutôt bon. En janvier, la FNCF, le regroupement syndical des pros du ciné, pariait encore sur 180 millions d’entrées. "On sera plutôt autour de 160 millions, pas vu ça depuis trente ans", explique Thierry Lacaze, le patron de la distribution France de StudioCanal. Et clairement, il ne s’agit pas que d’un trou d’air estival. La question est sur la table (et dans toutes les conversations du congrès des exploitants qui se déroulait à la mi-septembre) : le problème est-il conjoncturel ou structurel ?
L’offre, pourtant, était là. Le public non. 13 jours, 13 nuits a englouti 30 millions d’euros pour finir sous les 500 000 spectateurs. Alpha n’a pas enflammé Cannes (private joke pour nos lecteurs les plus attentifs), ni les spectateurs français. D’autres films ont osé 400 ou 500 écrans pour plafonner in fine à 200 000 billets. Lacaze tranche : "500 copies pour 200 000 entrées, ça ne va pas. L’offre était bien présente, ce n’était pas le problème." Le problème ? L’incapacité à générer du désir.
Désir émoussé, attention dispersée : pour Lacaze, ce qui se joue dépasse les flops de l’été. "Le cinéma ne fait plus partie d’une discussion sociétale comme auparavant. Tout se vaut. Le cinéma devient un produit parmi d’autres." Blockbusters américains en demi-teinte, marketing événementiel des plateformes, séries survendues comme des films : plus rien ne se distingue. Au point que certains spectateurs se demandent si Les Orphelins avec Alban Lenoir est une production Netflix ou une sortie en salles.
Certes, la fin d’année promet son défilé de "grosses machines" : Kaamelott 2, Chien 51, la dystopie burnée de Cédric Jimenez, sans oublier Avatar 3 ou le nouveau Paul Thomas Anderson, Une Bataille après l'autre (carton en France dès son premier jour d’exploitation France, NDLR). De quoi faire du bruit, peut-être, mais pas de quoi combler le gouffre. Pour atteindre 160 millions, il faudrait 13 millions d’entrées par mois d’ici décembre. "Il faut que distributeurs et exploitants fassent des choix. On ne peut pas tout programmer en même temps", prévient Lacaze, ressortant le serpent de mer : trop de sorties tuent les sorties. Voilà le paradoxe : jamais autant de films, jamais aussi peu de spectateurs. Si la panne était seulement conjoncturelle, il suffirait d’un succès surprise à la Intouchables pour rallumer la machine. On attendait des vacances incandescentes. On n’a même pas eu un "été bof" comme aux États-Unis, mais plutôt l’été de tous les dangers.
ERRATUM : dans le magazine actuellement en kiosque, nous avons trop vite qualifié Thierry Lacaze de "patron de StudioCanal". Il est directeur de la distribution France. C'est bien Anna Marsh qui est la directrice générale de la société de production et de distribution. Qu'ils acceptent tous les deux nos excuses.







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