Après le poignant Grâce à Dieu, François Ozon s’offre une parenthèse estivale mais pas si lumineuse.
Sorti au cinéma à l'été 2020, Été 85, de François Ozon, arrivera ce dimanche à la télévision. Première vous le conseille.
Il est des livres qui marquent une adolescence. La danse du coucou d’Aidan Chambers a bouleversé celle de François Ozon. Un garçon de 16 ans a commis un délit ; il doit comparaître devant un juge. Nous sont alors livrées, à la première personne, les pensées, les remords qui racontent son histoire d’amour avec un jeune homme qui l’a sauvé d’un naufrage. Avec Eté 85, Ozon livre une adaptation assez fidèle de ce roman initiatique. Transposé sur la côte normande, il met en scène Alexis, 16 ans, un lycéen fasciné par la mort et issu de la classe ouvrière face à David, 18 ans, un orphelin de père qui a repris avec sa mère le business familial. Pour Alexis, David représente tout ce qu’il n’est pas : l’aisance, le charme absolu, la vitesse… Leur histoire d’amour a le charme et la gravité des premiers émois adolescents. François Ozon reprend ainsi tous les codes du teen movie – du clin d’œil à La Boum- avec le walkman sur les oreilles- aux images d’Epinal du jeune couple vivant sa love-story cheveux au vent. Il en ressort une sensation de déjà-vu. On a également le sentiment que le réalisateur ne sait pas trop comment se dépêtrer de sa voix off. Présente par éclipses, elle vient alourdir le film plus qu’elle l’élève. Il aurait été préférable d’étoffer les dialogues des garçons qui parfois sonnent un peu creux et d’enrichir les relations avec les personnages secondaires comme les mères.
Ce qui est fort bien traité, en revanche, c’est l’ambiance du film. Cette impression qu’une chose grave peut se passer à tout moment. François Ozon maîtrise le suspense comme personne. Eté 85 n’est d’ailleurs pas sans rappeler Dans la maison, un thriller où un élève se rapprochait dangereusement de son professeur. Le sujet ici -et c’est aussi le cas dans le livre d’Aidan Chambers- n’est pas l’homosexualité, même si certains dialogues laissent entendre que la relation est taboue. La véritable problématique du film, c’est la force du premier amour, la possessivité, et l’exaltation des sentiments. Félix Lefebvre (Alexis) et Benjamin Voisin (David) sont magnétiques, fougueux et complexes. On espère être amené à revoir très vite ces jeunes comédiens. Leur interprétation nuancée donne un piment particulier à leurs scènes d’intimité et en fait un des plus beaux couples de l’été. Felix Lefebvre livre par ailleurs une composition mémorable sur « Sailing » de Rod Stewart dans une des scènes clés du film.
Eté 85 – Benjamin Voisin : François Ozon, c’est "la dictature et l’écoute"
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