Toy Story 4
Disney/Pixar

Les créateurs du film Pixar reviennent sur la genèse du projet et l’avenir du studio d’animation.

Deux semaines avant sa sortie officielle, Toy Story 4 faisait l’événement au Festival international du film d'animation d’Annecy. Rencontre sur place avec le réalisateur Josh Cooley et les producteurs Jonas Rivera et Mark Nielsen. 

Toy Story 4 évite le piège du film de trop [critique]

La conclusion de Toy Story 3 était une telle réussite que l’annonce d’un quatrième volet a été une surprise pour les fans. À quel moment cette suite a commencé à être imaginée ?
Mark Nielsen : L’idée est venue d’Andrew Stanton, qui a travaillé sur tous les Toy Story. Alors qu’on terminait le troisième film, il a imaginé un tout petit pitch du quatrième : pour lui, ce n'était pas fini, il restait un chapitre à écrire avec Woody, même si le 3 était la conclusion de l'histoire entre Andy et Woody. Tout le monde a été surpris. Mais Andrew est tellement bon qu'à force de l'entendre en parler, il a réussi à nous convaincre. On ne s'était jamais demandé ce que serait désormais la vie de Woody chez un autre enfant où il ne serait plus le jouet préféré. Comment allait-il gérer cette situation ? C’était passionnant.

Josh Cooley : Après ça, on a réalisé que la bergère Bo pouvait revenir et montrer à Woody que le monde ne se limite pas une chambre d’enfant. C’est là qu’on a su qu’on tenait un film.

Toy Story 4 a de nombreux niveaux de lecture mais quel est selon vous la thématique centrale ?
Josh Cooley : Qu'on ne tient pas qu’un seule rôle durant toute sa vie, qu'il faut apprendre à saisir les opportunités qui s’offrent à nous. Et il y a aussi cette thématique du changement et de la transition qui revient régulièrement : Gabby Gabby ne peut pas aller de l’avant, elle est bloquée dans le temps ; Duke est traumatisé par son passé ; Bonny ne veut pas aller à la maternelle et Forky ne veut même pas changer, il rejette carrément l'idée ! Tout le monde galère avec ça… à part Bo, qui a réussi à se construire une autre vie. Ce qui va questionner Woody sur son avenir.

L’idée de la transition est aussi applicable à Pixar.
Jonas Rivera : C’est vrai.

Le studio est à une période cruciale de son histoire et va devoir se réinventer dans les années à venir. Sauf que réaliser un film d’animation prend du temps, et qu’entre deux Pixar passera certainement par des moments compliqués…
Mark Nielsen : On en parle tout le temps entre nous. Mais en ce moment, on voit une nouvelle génération d’animateurs et de scénaristes débarquer chez nous. Le niveau de ces jeunes et hallucinant. Il y a des plans géniaux dans Toy Story 4 qui ont été réalisés par des stagiaires arrivés quelques mois plus tôt ! Donc c’est un saut dans l’inconnu, mais on est tous enthousiasmés par ce changement. Pete Docter, qui a réalisé plusieurs des grands films de Pixar, est désormais à la tête du studio (il remplace John Lasseter, accusé de harcèlement sexuel, NDLR). On fait confiance à son instinct : c’est un type qui y va avec ses tripes, et c'est ce qu'il impulse.

Jonas Rivera : Il fait vraiment confiance aux réalisateurs, il leur laisse beaucoup de liberté. C’est rafraîchissant. Cette nouvelle ère de Pixar s’annonce passionnante.

Cette idée de la liberté créative semble infuser partout dans l’industrie de l’animation : Sony et Netflix en font carrément leur mantra…
Josh Cooley : C'est une formidable période pour l’animation. Ce qui est vraiment super avec les plateformes de streaming comme Netflix et Disney+, c’est qu’on peut y raconter des histoires de la longueur qu'on souhaite. Il n’y a pas de format établi, c’est libérateur. Mais j’espère qu’on continuera toujours à faire ce qu'on sait faire chez Pixar : des films de très grande qualité, pour tout le monde. Évidemment, c’est plus facile à dire qu'à faire (Rires.)

Jonas Rivera : Les films qui touchent les gens dans leur humanité auront toujours un public.

Mais comment s’assurer de ne pas dénaturer l'ADN de Pixar ?
Mark Nielsen : Je crois qu'on y revient organiquement. On est en Californie du Nord, un peu à l'écart d'Hollywood. Depuis l'époque Steve Jobs, on a toujours été la version punk de Disney. Et j'ai l'impression que c'est l’état naturel du studio, même s'il a évidemment beaucoup grandi et qu'il est plus structuré qu’à l’époque. Les artistes qui gravitent autour de Pixar et qui nous intéressent ont cet esprit. Ce n'est pas comme si on essayait de se souvenir d'être cool.

Josh Cooley : Moi je le fais, tous les matins !

Mark Nielsen : Le studio est ce qu'il est grâce aux gens qui y travaillent. Pas l’inverse.

Jonas Rivera : Et puis on connaît la chanson. On sait d’avance que pour chaque nouveau projet, on va se taper la tête contre les murs : l’histoire va faire plein de détours, se retrouver dans des impasses… Jusqu’à ce qu’on trouve la solution qui en fait un film Pixar.

Josh Cooley : Sur Toy Story 4, je me suis littéralement tapé la tête contre les murs ! (il enlève sa casquette et montre son crâne dégarni) Avant, j’avais une magnifique chevelure. Tout a disparu à cause de ça !

Toy Story 4, en salles le 26 juin. Bande-annonce :