La réalisatrice de Jeune femme raconte sur plus de 30 ans le quotidien d'une mère de famille ivoirienne et de ses deux fils arrivés en France en 1989, avec un remarquable trio de comédiens : Anabelle Lengronne, Stéphane Bak et Ahmed Sylla.
Cinq ans après sa Caméra d’Or pour Jeune femme, le deuxième long de Lénor Serraille est forcément attendu. Et nulle question ici de bégaiement puisqu’elle a cette fois- ci choisi de raconter la chronique d’une famille ivoirienne (une mère célibataire venue s’installer en banlieue parisienne avec ses deux enfants) des années 80 à nos jours. Et le résultat se révèle à la hauteur de l’ambition affichée. Car au- delà de l’aspect politique et social d’une telle entreprise, Un petit frère se vit d’abord comme un film de personnages, loin du banal film à sujet. Une femme tout sauf soumise qui, en dépit des obstacles, entend vivre sa vie comme elle l’entend. Un grand frère mu par une rage intérieure qui va devenir explosive quand il comprendra qu’il ne parviendra jamais à habiter le destin qu’il s’était imaginé. Et un petit frère qui va, lui, tenter de tirer les leçons de toutes ces péripéties souvent tragiques pour mener sa barque en dépit des tempêtes. Le tout encapsulé dans un geste scénaristique virtuose où la cinéaste place tour à tour à tour chacun de ces trois regards au centre de son récit chapitré, dans une fluidité jamais prise en défaut et en faisant débouler auprès d’eux des personnages secondaires surgissant comme on saute dans un manège avant qu’on fasse petit à petit connaissance avec eux. Ajouter à cette virtuosité de l’écriture un casting dément - porté par Annabelle Lengronne impressionnante dans son premier grand rôle et Stéphane Bak qui confirme sa montée en puissance – et vous obtenez l’un des films français les plus passionnants de ce début 2023.
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