Woody Allen à Scarlett Johansson (Match Point) : "Ton sex-appeal me rappelle Marilyn Monroe"

Match Point revient ce soir sur Arte. Ce polar londonien de Woody Allen, sorti en 2004, fut illuminé par la sensualité torride de Scarlett Johansson. Une débutante à la beauté du diable…

Août 2003. Dans son appartement new-yorkais donnant sur Central Park, Woody Allen peaufine le scénario de Match Point, le prochain film qu’il projette de tourner à Londres. Le réalisateur en parle comme "d’un mélodrame bourgeois et cynique sur l’irrésistible ascension sociale de Chris Wilton, jeune professeur de tennis, au sein de la haute société londonienne." Joué par Jonathan Rhys-Meyers, le beau tennisman tombe amoureux d’une comédienne, Nola Rice, ce qui contrarie son mariage avec une riche héritière anglaise.

Kate Winslet doit à l’origine incarner le personnage de Nola. Une semaine avant le tournage, coup de théâtre : Winslet, qui veut s’occuper de son bébé, se désiste. Woody Allen accueille la nouvelle avec un calme olympien, il a remarqué dans Lost in Translation une certaine Scarlett Johansson, actrice de 19 ans à l’aura sensuelle explosive. "Une chance : elle était libre ! Je lui ai envoyé le scénario, deux jours après, elle était là." Lorsqu’elle débarque sur le plateau pour sa première scène autour d’une table de ping-pong, Scarlett porte une jupe blanche de tennis très étudiée qui laisse deviner ses formes. Son côté femme-enfant, ses regards brûlants et sa voix rauque troublent jusqu’aux techniciens. Allen jubile : le vieux maître de l’humour juif new-yorkais est conquis : "Tu dégages une innocence très sexuelle. Il suffit que tu débarques sur le plateau pour que l’atmosphère change. Ton sex-appeal me rappelle Marilyn Monroe."

En grand perfectionniste, Woody Allen ne va pas se contenter de filmer sagement cette bombe humaine, il va la sublimer, en révélant son aspect sulfureux : "Je veux que les spectateurs te voient au zénith de ta beauté", murmure-t-il, lors d’une pause, à la comédienne qui écrase un sourire gourmand. Pour la rendre encore plus désirable, Allen demande à son chef opérateur de changer ses filtres et de modifier ses lumières. Puis, il impose à Scarlett Johansson des heures interminables de maquillage et de coiffure. En vrai Pygmalion, il veut que la chrysalide se transforme en papillon. Pour lui, Scarlett ne rime pas avec "Starlette" et il ne laisse rien passer à la comédienne : "Sur le plateau, il m’a fait recommencer des scènes des dizaines de fois. Woody savait exactement ce qu’il voulait, des intonations de ma voix aux plus petits détails de mes tenues" se souvient-elle, impressionnée.

Le résultat de ce travail de préparation abouti à la séquence, désormais culte, où Scarlett Johansson, sous une pluie battante, fait fougueusement l’amour avec un Jonathan Rhys-Myers en transe. Lors de cette prise, tournée dans des décors naturels, la jeune comédienne américaine, maculée d’herbe et de boue, déborde d’une sensualité ravageuse. À la fin de la scène, Woody Allen, tout sourire, lâche, de sa petite voix nasillarde, à l’actrice épuisée et ruisselante : "Tu étais simplement ravissante à regarder. Tu feras une longue et grande carrière…"