Du moins dans les conditions idéales.
Hier sortait en salles le nouveau long-métrage d’Ang Lee, Un jour dans la vie de Billy Lynn, film révolutionnaire dans sa technique de réalisation puisque tourné en 4K, en 3D et en HFR, en 120 images par secondes (la norme est à 24, certaines copies du premier Hobbit était à 48 images par secondes et James Cameron espère tourner à 60 dans les suites d'Avatar). Une sorte de Graal technologique qui permet un rendu à l'écran plus vrai que nature, en décomposant scrupuleusement chaque mouvement. Déstabilisant pour certains (le cerveau humain n'est pas habitué à autant de détails), totalement génial pour les autres.
Problème : cette prouesse technique, une première dans l’Histoire du cinéma, personne ne pourra la voir, ou presque, en France et dans le reste du monde. Seules cinq salles sur la planète sont équipées pour diffuser Un jour dans la vie de Billy Lynn dans ce format, et aucune dans l'Hexagone. Le film sort bien chez nous mais dans une version en 2D classique, à 24 images par secondes, et il n'est projeté que dans seize cinémas à travers toute la France. On n'est pas loin d'une sortie technique.
L’explication ? Le long-métrage a fait un immense bide à sa sortie en décembre dernier aux États-Unis (1,7 million de dollars) et la marque Ang Lee n'est certainement pas assez forte pour lui éviter le même sort sous nos latitudes. Dommage, car si la puissance du film reste énorme en 2D, le spectacle semble total en 4K, 3D et 120fps. Notre confrère des Inrocks Jean-Jacky Goldberg, qui a pu le voir dans ce format lors d'une avant-première ("à moitié vide") à Los Angeles, écrit sur le site Chaos Reigns s'être trouvé face à "un outil génial (…) Certes, il y a une question d’habitude qui entre en jeu" mais "ce qui m’a le plus frappé (…) c’est la bizarrerie du film. Bizarrerie accentuée par les choix de cadrage, inhabituellement frontaux, qui accentuent l’inconfort. Je crois que l’œil, en fait, n’est pas habitué à voir autant de détails et de profondeur que dans ce film. C’est particulièrement frappant dans les scènes de stade ou de banquet : on distingue chaque spectateur, et on est comme forcé à le faire, alors qu’en réalité, l’œil ajouterait du flou et il faudra faire un effort pour distinguer les détails. Dans Billy Lynn, la réalité s’offre à nous dans sa totalité, et donc dans son obscénité (…) Là, c’est comme si on enlevait tous les filtres, et qu’on était forcé d’être dans les yeux de ce soldat qui a vu trop d’horreurs. On est tous atteints de PTSD. C’est la réalité nue, full frontal, toutes lumières allumées ; pornographique".
Un jour dans la vie de Billy Lynn devrait sortir en Blu-ray 3D et 4K dans quelques mois, mais évidemment pas en 120fps. C'est pourtant sûrement installé confortablement dans son salon qu'on pourra le plus se rapprocher de l'expérience imaginée par Ang Lee. La bande-annonce du film :
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