Catastrophe sanitaire aux Etats-Unis dans les années 1990 et 2000 , la crise des opioïdes est racontée de manière minutieuse dans cette mini-série à la fois bouleversante et choquante.
Vous ne prendrez plus un comprimé de paracétamol à la légère après avoir vu ça ! Le créateur d'Empire, Danny Strong, et le réalisateur Barry Levinson (Good Morning Vietnam, Rain Man) retracent dans Dopesick (qui sort aujourd'hui sur Disney + en France) le scandale sanitaire qui secoua l'Oncle Sam au début du XXIe siècle, connu sous le nom de "crise des opioïdes". Ou comment un médicament anti-douleur soi-disant "miracle" a rendu des centaines de milliers d'Américains accros aux pilules. Une catastrophe à l'origine d'une flambée spectaculaire des overdoses, et initiée en toute légalité par un labo... avec l'aval de l'Agence américaine de santé publique.
Dans la veine d'un drama à la Erin Brockovich, cette série limitée en 8 épisodes n'y va pas avec le dos de la cuillère pour pointer du doigt les responsabilités et dérouler sa diatribe anti-système. Le message est martelé avec de gros sabots, dans une mise scène manichéenne parfois grossière. Il n'empêche, Dopesick fait mouche. Parce que Strong et Levinson ont eu la bonne idée de morceler le récit, faisant des allers-retours dans le temps entre trois époques distinctes.
La première, certainement la plus passionnante, nous ramène au milieu des années 1990. On y suit une petite communauté de mineurs, dans un bled des Appalaches. Le Dr Samuel Finnix est le médecin de Finch Creek et fait face quotidiennement à la souffrance de ses voisins et amis, perclus de douleurs après des années à extraire le charbon à la sueur de leurs fronts. Jusqu'au jour où un représentant d'un labo pharmaceutique débarque, pour lui présenter ce comprimé magique. Un antalgique, hyper efficace, et sans dépendance, assure-t-il. Quelques années plus tard, au début du XXIe siècle, une agent de la DEA découvre, au hasard d'une descente, cette drogue "légale", qui envahit les villes et fait des ravages. Envers et contre tout, elle va mener son enquête. La troisième timeline suit la procédure légale entamée par le Département de la Justice contre Purdue Pharma, le groupe accusé d'avoir menti sur son médicament et d'avoir empoisonné des millions d'Américains.
Une histoire vraie à peine croyable, racontée sous différentes perspectives, du créateur machiavélique au consommateur lambda. De cette narration à tiroirs naît un certain déséquilibre. Si la poursuite de Purdue Pharma et les bisbilles de la richissime famille Sackler aux commandes ne manquent pas d'intérêt, c'est surtout l'approche intime de Dopesick qui lui confère toute son âme. La dissection au microscope de cette Amérique rurale, croyante et dévouée, est tout bonnement passionnante. Bouleversante par moment. Parce que Michael Keaton est parfait en médecin de campagne compatissant, gentil et naïf. Parce que Kaitlyn Dever (déjà époustouflante dans Unbelievable sur Netflix) fait une jeune mineuse de fond terriblement attachante. Enfin parce que Will Poulter est fantastique en vendeur de médicament dépassé par les événements. L'occasion de mieux comprendre comment fonctionne ce système de santé américain et comment les fameux "Sales Rep" (ces visiteurs des groupes pharmaceutiques) nouent des relations intéressées et corrompues avec les docteurs, pour qu'ils prescrivent tel médoc au lieu de tel autre. L'industrie de la santé est un business qui pèse des milliards et qui génère naturellement des dérives incroyablement dangereuses. Celle racontée dans Dopesick fait véritablement froid dans le dos.
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