Indéniablement, la série est en progrès. Plus spectaculaire, plus dramatique aussi, elle est cependant encore loin de rivaliser avec les films du Seigneur des Anneaux. La faute à une litanie de personnages soporifiques.
Des anneaux en forme olympique, enfin ? Deux ans d'attente, et voici la saison 2 de la série la plus chère de tous les temps. Les Anneaux de Pouvoir débutent leur nouveau chapitre sur Prime Video à partir d'aujourd'hui. Huit nouveaux épisodes qui s'égrèneront jusqu'en octobre et qui raconteront la montée en puissance de Sauron et du Mordor. Attention, spoilers !
Dans la foulée de la révélation Halbrand, le légendaire seigneur noir de Tolkien avance désormais à visage découvert et se présente comme le protagoniste inattendu de cette saison 2, anti-héros abîmé et complexe, bien loin de la figure démoniaque insaisissable de Peter Jackson. "Sauron pense vouloir le bien de la Terre du Milieu en rassemblant les peuples derrière lui ! Il veut les unir en un sens", décrypte dans Première la réalisatrice Charlotte Brändström (dans le n°554 du magazine actuellement en kiosque). Une approche étonnante, presque humaine, du grand vilain du Seigneur des Anneaux, qui danse avec Celebrimbor le forgeron et manipule son monde avec une malice assez jubilatoire. Là réside l'intérêt central de cette nouvelle salve d'épisodes, qui commence d'ailleurs par une grande séquence d'introduction réjouissante : un flashback nous ramenant à la fin du Premier Âge, juste après la chute du maître de Sauron, le Vala (figure divine chez Tolkien) nommé Morgoth.
Les fans de l'auteur britannique apprécieront cette digression dans le lore tolkienien, qui constitue en fait l'essence même de la série. Les Anneaux de Pouvoir n'est pas directement adaptée d'un roman mais s'apparente à un agrégat de références piochées dans le Silmarillion et autres annexes de l'œuvre du créateur. Une extrapolation soignée des pistes données par l'écrivain dans ses écrits, qui offre ainsi un regard intéressant sur Sauron et la création des anneaux au beau milieu du Deuxième Âge.
Le hic, c'est que Sauron est globalement le seul personnage à surnager dans cette Terre du Milieu revisitée. Gravitant autour du Mal grandissant, Galadriel, Elrond ou le prince Durin n'existent pas vraiment. Plombés par des dialogues extraordinairement soporifiques, les héros des Anneaux de Pouvoir ne dégagent rien. Jamais. À l'image de la Galloise Morfydd Clark, tellement puissante dans Saint Maud mais complètement engoncée dans son armure elfique, aucune émotion ne transpire de cette immense fresque de fantasy, qui n'arrive décidément pas à passer au niveau supérieur : celui de la grandiose saga épique qui met les poils, quand Aragorn sort son épée ou que Gandalf hurle "Vous ne passerez pas !"
D'autant que les atermoiements politiques autour des anneaux sont beaucoup trop pauvres pour nous embarquer et titiller la justesse d'un House of the Dragon en la matière. Indéniablement, la série Prime Video est encore loin des sommets dramatiques des références du genre... Mais il y a quand même du mieux ! Par rapport à une première saison désespérément plan-plan, cette saison 2 a trouvé du rythme. Un certain style, qui mise sur une esthétique plus sombre, plus sale. Moins lisse et plus spectaculaire, Les Anneaux de Pouvoir met enfin son (très gros) budget à l'écran en multipliant les séquences impressionnantes, jusque dans un final qui envoie vraiment du lourd (on n'en dira pas plus).
Reste qu'on se demande comment la série va pouvoir tenir trois saisons de plus après ça, pour arriver à la fameuse bataille de Dagorlad - celle racontée en préambule du Seigneur des Anneaux par Peter Jackson - qui montrera la chute de Sauron contre l'armée d'Elendil. Le point de mire déjà annoncé des auteurs au bout de la saison 5. Ont-ils l'intention de nous conter méticuleusement la chute de Númenor et la création de la Comté par les Hobbits, en suivant pas à pas le lore de Tolkien ? Cette mise en image des livres d'Histoire de la Terre du Milieu réjouira sûrement les fans, mais risque aussi d'assommer tous les autres au passage. "Tous ceux qui errent ne sont pas perdus..." écrivait l'Anglais. Espérons que ça vaudra aussi pour les scénaristes des Anneaux de Pouvoir.
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