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Bonne nouvelle pour tous ceux qui en ont marre des thrillers aseptisés : Amer envoie bouler les codes du genre en préférant utiliser une
machine à remonter le temps plutôt qu’une photocopieuse. Principale étape : le giallo, ce polar italien des années 70 sadique et ultrastylisé, influence directe de Cattet et Forzani. Mais on croise aussi, dans Amer, les ombres du cinéma expérimental – de Chris Marker à Kenneth Anger –, le Surréalisme belge ou la Nouvelle Vague japonaise. Le couple de réalisateurs digère ces inspirations, non pour les pasticher mais pour retrouver leur essence commune : le ressenti. Impossible cependant de le réduire à un vain exercice de style fétichiste quand le duo réactive les passionnantes audaces formelles et psys d’un cinéma d’avant-garde moribond.
Toutes les critiques de Amer
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Amer défie les goûts du public, Amer défie la critique, Amer défie le monde ! Amer est-il alors une sorte de "masterpiece" ? Comme on n'a rien à perdre, disons "oui"!...
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Hélène Cattet et Bruno Forzani, déjà connus des festivals pour leur passion du giallo (les films de Dario Argento, Bava ou Fulci), vont, autour de ce biopic inventé et romancé, réorganiser les figures de style du genre pour les combiner à leur manière, les décliner, les réinterpréter et les appliquer à un matériau plus quotidien (une vie) que les enquêtes policières auxquelles s’attachait le giallo cinématographique traditionnel – lui-même descendant bâtard et bis à la fois du fantastique et du giallo littéraire, l’équivalent italien de la série noire française. Quelles sont ces figures ? Elles appartiennent à la mémoire commune de tout spectateur de cinéma, qu’il ait vu ou non des films d’horreur pure, car elles incarnent des fantasmes visuels et sonores universels, des phobies ancestrales : l’œil qui regarde à travers une serrure, une lame qui s’enfonce dans la peau, des ombres, des animaux (chats, volatiles, insectes et reptiles), des gants de cuir noir, de la dentelle rouge, une carrosserie qui rutile, un mort qui sourit, une jeune femme sensuelle, des ongles trop longs, le vent qui souffle, une porte qui claque, une moto qui freine, des lunettes noires, une lame de rasoir bien effilée, des ongles trop rouges, la sueur sur la peau tannée, un sourire ironique, une voix d’outre-tombe, etc. Amer est un précis de décomposition du crime et du cinéma de crime sexuel, une sorte de Fragments d’un discours cinématographico-sadique.
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Explorant le fantasme au féminin, le film se révèle particulièrement réussi dans son versant le plus sensuel, l'intrigue se réduisant au minimum syndical. Les fans du genre se régaleront, les autres trouvant avec Amer une entrée en matière des plus hypnotisantes.
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(...) au titre d'un brillant coup de force formel, Amer devrait se ranger au côté de ces oeuvres singulières qui émergent depuis une dizaine d'années aux marges d'une production française par ailleurs beaucoup plsu standardisé qu'on ne veut bien le dire.
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Pour peu que l'on ait été amateur d'un certain cinéma italien des années 1970, ces thrillers érotico-horrifiques que l'on appelle les gialli, les premiers sons et les premières images d'Amer ne peuvent pas manquer de rappeler un certain nombre d'impressions. Pour les autres, le plaisir ressenti durant la vision du film de Bruno Forzani et Hélène Cattet, pourvu qu'on s'y laisse entraîner, se double d'une sensation inédite. Car, à l'issue de la projection, le spectateur n'est pas vraiment certain de s'être vu conter une histoire, d'avoir suivi le fil d'un récit.
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Au final, Amer, avec ses formules expérimentales à la Grandrieux (absence partielle de dialogue, travail de photographie et de cadrage abyssal), risque bien plus de dérouter que de charmer. Mais avec autant de talent mis en place, on ne peut qu’applaudir cette démarche extrême que même les gialli, pourtant souvent fantasques dans leur réalisation, intuitifs et virtuoses, n’approchent pas autant dans la dématérialisation du récit. Donc avertissement aux amateurs qui pourraient bien être surpris par cet hommage qui sait prendre ses distances pour se singulariser.
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Si le film épouse au cordeau la charte visuelle du giallo, cette agréable sensation de déjà-vu qui se profile à chaque scène se dissout dans une totale absence de recul. Un exercice de style virtuose mais vain.
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Les réalisateurs de ce premier film sont des fétichistes du giallo (polar italien des années 1960 et 1970) et ça se voit. Erotisme vénéneux, couleurs psychédéliques, cadrages baroques : tous les ingrédients de ce genre sont utilisés pour évoquer la sexualité d'une femme à trois moments clés de sa vie. La partie enfantine, la plus fantastique, la plus angoissante aussi, a de quoi intriguer. Mais le passage à l'adolescence, puis à l'âge adulte provoque l'agacement. L'esthétique pub et la mise en scène tape-à-l'oeil - qui multiplie les morceaux de bravoure à la Dario Argento -, ça séduit pendant vingt minutes. Pendant une heure et demie non stop, ça fatigue.
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En attendant que les jeunes duettistes mettent leur sensibilité au service d'une véritable histoire, avec des personnages, des enjeux et des rebondissements, mieux vaut se replonger dans Six femmes pour l'assassin, L'Oiseau au plumage de cristal ou Les Frissons de l'angoisse dont les moments de grâce fulgurants n'empêchaient pas une construction dramatique solide, bien au contraire.