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Du film choral français où tout le monde se croise, le réalisateur d’Impitoyable (1992) tire une rêverie jazzy pleine de hasards et de coïncidences. Il en émerge parfois de jolis moments, des passages étonnants (un désastre fi lmé à hauteur d’homme) ou une note émouvante (le dîner entre Matt Damon et Bryce Dallas Howard). La plupart du temps, on retombe néanmoins dans un méli-mélo sentimental qui prend deux heures et des poussières pour en arriver à la conclusion que les vivants sont plus importants que les défunts. Et le grand film agnostique sur la mort de se dérober comme la lumière au bout du tunnel. Dur. La cerise sur le gâteau ? Pour le public français, les fausses émissions de nos chaînes hertziennes auront un vague air de téléfilm fauché. On pourrait gloser longtemps sur les défauts de cet Au-delà, mais Eastwood est une icône du 7e Art. Comme à son habitude, il a essayé de filmer à l’instinct quelque chose de différent. Cela a souvent donné des chefs d’oeuvre. Pour cette fois, ça n’a juste pas fonctionné.
Toutes les critiques de Au-delà
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Au-delà démontre une nouvelle fois la maîtrise du vieux réalisateur dans tous les registres. Au début du film, Eastwood donne à voir une reconstitution d'un tsunami impressionnante de force. Plus tard, il offre une séquence pleine de drôlerie et de sensualité à l'occasion d'un cours de cuisine italienne dispensé sur fond d'opéra (...) Au fond, Clint Eastwood, par-delà les thèmes obsessionnels qui se dégagent de son oeuvre, est sans doute le grand mélodiste du cinéma contemporain.
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Au-delà est le mélodrame le plus abouti d'Eastwood, si l'on accepte la définition de genre pas Serge Daney, selon lequel le spectateur s'identifie non pas avec un personnage mais avec le réseau symbolique dans lequel les personnages sont pris. La toile mélodramatique de Morgan attrape davantage de pans de réalité que la plupart des docus-fictions, et l'oeil d'Eastwood pour les détails empêche ce film passionnant de sacrifier le présent à la mort (...)
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par Yann Lebecque
Il tire ici partie de toute cette expérience acquise pour jouer de la corde sensible sans fausse note, sans forcer sur les arrangements non plus, sur une ligne qu'illustre parfaitement sa musique faite de petites notes de piano solitaires qui, peu à peu, se rapprochent, se touchent, font un bout de chemin ensemble et nous emportent dans une ballade émouvante qui refuse les effets tire-larme et préfère nous laisser un sourire aux lèvres.
Sur un scénario que n'aurait pas renié Marc Lévy, Clint Eastwood tente un mélo paranormal entre Thaïlande, Paris, Londres et San Fransisco. Et surprise, loin du nanar redouté après le faiblard Invictus, il ne s'en sort pas trop mal. Malgré un sentimentalisme parfois lourdaud, grâce à une foi inébranlable dans son récit et un grand Matt Damon, Au-delà trouve son fragile équilibre.
La tonalité du film, au sujet pourtant morbide, restera celle de cette paisible fugue parmi les morts, aux teintes fantastiques.
Ainsi le jeu de Cécile de France, filmée dans les studios de France Télévisions, a beau être à la limite de la fausseté, ses tirades être bardées d'invraisemblances (« Personne n'a écrit sur la face sombre de Mitterrand ! »), Eastwood réussit à en faire un étrange personnage entre deux eaux, engourdi par la vie et fasciné par la mort. Par contraste, Matt Damon qui a plus que jamais La Mort dans la peau, incarne superbement la rationalité du prolo doué pour le paranormal, à ses dépends : les scènes de blind test gastronomique avec Bryce Dallas Howard, drôles et émouvantes, comptent ce que le film a de plus juste, et sa logique rencontre avec la rescapée Cécile de France, de plus beau. Sans doute trop conscient de la nature un peu fleur-bleue de son sujet, Eastwood semble s'en excuser (avec humour), prenant soin de brocarder les impostures propre au milieu de la voyance - le voyant Matt Damon lui, retrousse littéralement ses manches pour mettre les mains dans le cambouis télépathique -, sans pour autant perdre de vue la croyance générée par sa mise en scène : panotant certes trop lourdement entre ciel et terre, le cinéaste aborde la mort sous un angle plus frontal qu'à l'accoutumée (entrevu avec les fantômes dans Invictus), sans perdre de vues ni ses obsessions comme le poids de la culpabilité et du secret, ni sa science du storytelling. Et si Clint Eastwood, ce grand sentimental octogénaire, n'a pas toujours la main légère sur les violons, on retiendra d'abord d'Au delà son étrange sérénité, son goût pour les fantômes calmes cohabitant avec un réel violent (tsunamis, terrorisme) qui le rapprochent, du moins en esprit, de Weerasethakul et Shyamalan. Qui l'eut cru.
Film choral scénarisé par Peter Morgan entremêle trois déstinées (...) malgré de belle prestations d'acteurs, ce mélodrame ésotérique est alourdi par une narration trop démonstrative, un montage balourd et de très grosses ficelles à tirer les mouchoirs. On ne s'ennuie pas, mais on attend mieux d'un maître du cinéma américain. Après le discutable "Invictus", souhaitons que le talent de Clint ne soit pas en état de mort imminente.
C'est du cinéma à grand spectacle parfaitement maîtrisé, qui réussi à faire ressentir au spectateur la force des éléments et le bruit fou de cette catastrophe mortelle. Malheureusement, ça s'arrête là ou presque car Eastwood, qui mêle trois histoires dans trois lieux différents - San Francisco, Londres et Paris -, s'emmêle les pinceaux à vouloir les réunir dans une scène improbable. Il est question de parler avec les morts dans l'au-delà, ce serait bien de communiquer ici-bas avec les spectateurs aussi...
(...) cet Au-delà est très en deçà de ses meilleurs productions. Si le cinéman d'Eastwood a toujours souffert d'un certain classicisme confère ici à l'ennui. Le film pâtit, en outre, de la comparaison avec certaines oeuvres ayant naguère abordé la même thématique (...) Du coup, son long-métrage ressemble à un produit... sans âme !
Film choral + récit ésothérique : Clint Eastwood a pris beaucoup de risque sur son nouveau long-métrage, qui confronte trois destins aux prises avec la mort. (...) Côté casting et direction d'acteur, rien à redire, chacun joue sa partition avec émotion et sobriété. Une qualité que l'on ne retrouve ni dans le scénario (étire et parfois répétitif) ni dans la mise en scène, qui flirt avec le sentimentalisme.
Pour chaque partie, le cinéaste semble avoir adopté un genre ou un style proche du pays où il tourne : film de couple se déchirant à Paris, ambiance dickenso-loachienne à Londres, classicisme eastwoodien à San Francisco, la ville d’Harry. Mais à la place du flic solitaire, un ouvrier droit, honnête, cultivé, sorti d’un film de Ford ou d’une chanson de Springsteen, personnage émouvant excellemment joué par Matt Damon.
Si Eastwood finit par relier ces trois parties de manière un peu forcée et pas franchement nécessaire (les trois volets dialoguaient très bien par le seul effet du montage, sans avoir besoin de ce nouage final à la Lelouch), et si la partie française paraît plus artificielle à nos yeux de Français, Clint aura néanmoins pianoté ses gammes de cinéaste avec son aisance et sa fluidité habituelles, captant l’attention pendant plus de deux heures avec une amplitude de geste qui fait oublier les scories et les imperfections constatées çà et là.
Eastwood est encore loin d’être mort.
Les destins de ce trio vont s'entremêler devant la caméra du réalisateur de Gran Torino, qui livre un film fascinant et mortifère quoiqu'un un brin fumeux. Les passages se déroulant en France tendent à prouver que le cinéaste est plus à l'aise dans le monde anglo-saxon que dans un studio de télé parisien. Malgré ce travers et un mysticisme appuyé, Au-delà reste séduisant dans la façon dont un réalisateur vieillissant taquine la mort comme pour la défier.
Disons le net : Au-delà n'est pas le meilleur film de Clint Eastwood, même si l'on y trouve des passages de haute volée. La séquence catastrophe du tsunami est impressionnante, les jeux d'approche entre les apprentis cuisiniers donnent lieu à une scène de test gustatif assez érotique, et, de loin le plus émouvant, l'épisode se déroulant dans un district ouvrier de Londres s'offre une scène de panique dans le métro suivie d'un attentat qui prouve que le cinéaste n'a rien perdu de sa maîtrise.
Le problème principal est l'épisode parisien. Coulisses de la télé, discussions chez un éditeur : la reconstitution sonne faux. Peu à l'aise, affublée par la costumière de tenues caricaturales (dont un foulard Hermès) et lâchant des répliques ridicules (en particulier celle concernant l'urgence d'écrire un livre qui dévoilerait enfin la face obscure de François Mitterrand !), Cécile de France ne rend pas crédible son personnage de star du petit écran touchée par la grâce. On n'est pas fou non plus des effets (flashes de lumière, vrombissement sonore) qui accompagnent les moments où Matt Damon convoque les fantômes.
Arrive le moment où ces destins se croisent et se dénouent, de manière un peu forcée, mais tout de même émouvante. On aurait sans doute préféré qu'Eastwood maintienne ces lignes de vie en parallèle, telles quelles, erratiques, comme suspendues. Des correspondances avec Minuit dans le jardin du bien et du mal (1997) affleurent parfois, un même sens de la divagation, une même obsession du passage, basculement soudain ou franchissement en douceur. On ne s'ennuie pas, on se laisse transporter. Moralité : pour du Eastwood, cela ressemble à une parenthèse (la première excursion en Europe du maître), une flânerie aux trois coins du monde ; comparée au tout-venant, ça mérite le détour.
A la fois comble et symbole de ce triste ratage, le traitement de l'argument fantastique finit de plomber l'ambiance, les séances de spiritisme étant décrites comme de vulgaires conversation téléphoniques, avec en guise de combiné le personnage de Damon. Pour la portée métaphysique, on vous conseillera plutôt de visionner en boucle le trailer de The Tree of Life de Terrence Malick, dont la puissance d'évocation écrase en 130 secondes les deux balourdes d'Au-delà.
Le thème est ambitieux, le résultat, dénué d'âme, n'est pas à la hauteur du réalisateur, dont on attend avec impatience le film sur Edgar Hoover.
La première scène, où une journaliste française en vacances à Phuket échappe de peu à un tsunami, pourrait être signée Roland Emmerich. La partie emmenée par Matt Damon, en médium malgré lui, évoque le M. Night Shyamalan d’"Incassable". Enfin, avec le segment londonien du film, sur un gamin qui perd son frère jumeau, on se croirait chez Ken Loach. Et Eastwood, dans tout ça ? Ben…
Noyé sous des flots de musique, le film passe d’un pays et d’un personnage à l’autre sans jamais palpiter vraiment. Si Cécile de France et Thierry Neuvic font un couple charismatique, les dialogues et les situations de la partie parisienne sonnent faux. Au final, malgré de jolies idées — le médium privé de vie amoureuse, par exemple —, « Au-delà » reste en deçà de ce que l’on attend du réalisateur de « Gran Torino »
Clint Eastwood donne dans le surnaturel mou. Essai raté.
En terme de réalisation pure, la "surprise" d’Au-delà est sans doute le réalisme de la scène d’ouverture où le réalisateur parvient à nous faire revivre le tsunami de 2004 avec force réalisme. Ça bluffera sans doute les amateurs de films catastrophes. Les autres savent que le cinéma de Clint Eastwood n’a jamais eu besoin d’une débauche d’effets pour tout emporter sur son passage.
(...) le réalisateur de Gran Torino signe un gros nanar où se croisent une survivante d'un tsunami, un Américain en contact avec les morts et un petit garçon endeuillé. (...) Quelque chose de moins mièvre ce serait bien. Sénile, le Clint ?