Première
par Thierry Chèze
C’est un film d’une ambition inouïe mais jamais pris en défaut sur un sujet qu’on pourrait pourtant croire épuisé par le cinéma : les premières amours adolescentes. Découvert avec Les Démons, chronique fascinante sur l’enfance, Philippe Lesage fait mieux que confirmer tous les espoirs placés en lui. Sa foi dans le cinéma lui permet de faire fi de toute référence écrasante, de faire imploser son cadre narratif. Sa fresque en trois actes suit dans un premier temps Guillaume, grande gueule tumultueuse de 16 ans (Théodore Pellerin, stupéfiant) amoureux de son meilleur ami, et sa demi-soeur aînée (Noée Abita, saisissante) en quête d’aventures sans lendemain après que son petit ami a souhaité faire évoluer leur relation vers une plus grande liberté. Avant de laisser place à un épilogue à la fois totalement indépendant et parfaitement complémentaire où son jeune héros des Démons (Édouard Tremblay-Grenier, bouleversant) vit un coup de foudre dans un camp de vacances. Lesage filme trois jeunes gens qui ont en commun de se livrer aux passions amoureuses sans chercher à se protéger. Des âmes téméraires dont sa caméra tout à la fois caressante et brutale accompagne aussi bien les coups de cœur que les coups au cœur. Genèse est une œuvre sous tension permanente, au plus près de personnages totalement livrés à leur aveuglement amoureux. D’une sensualité à fleur de peau, ses images célèbrent aussi bien les mots que les regards échangés qui disent si bien le trouble, l’envie, la jalousie ou la rage. Un des plus beaux films d’amour(s) de ces dernières années.