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Vous aurez reconnu le pitch : Laisse-moi entrer est le remake américain de Morse, le sublime film de vampires suédois de Tomas Alfredson. Il fallait être kamikaze pour s’attaquer à un tel projet à peine un an et demi après la sortie de ce classique instantané. Matt Reeves (Cloverfield) ne s’est pas dégonflé. S’il y a des choses à admirer dans sa relecture – l’interprétation troublante de Kodi Smit-McPhee (le gamin de La Route), la mise en scène élégante, la magnifique bande-son de Michael Giacchino –, c’est presque ce qui énerve le plus. Pourquoi avoir mis toutes ces compétences au service d’un film qui ne trouve jamais sa raison d’être, si ce n’est celle de permettre au public américain, allergique aux sous-titres, d’avoir accès à cette histoire ?
Toutes les critiques de Laisse-moi entrer
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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En situant le récit au début des années 1980 et en adoptant l'esthétique visuelle de l'époque, le réalisateur de Cloverfield rend aussi hommage au cinéma de son adolescence, de Poltergeist (1982) à Vampire, vous avez dit vampire ? (1985). Son film s'impose alors comme un travail de reproduction très inspiré.
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Pour porter ces interrogations métaphysiques, Matt Reeves dispose d'un interprète étonnant. On a déjà vu Kodi Smit-McPhee dans The Road, d'après Cormac McCarthy. Il incarnait alors la dernière bribe d'innocence dans un monde perdu. Il est ici demandé beaucoup plus au jeune garçon. Parfaitement ambigu, un instant image parfaite du désespoir enfantin pour devenir au plan suivant un quasi-monstre en proie à ses pulsions, le jeune acteur fait peur, à proprement parler.
Le centre de gravité du film s'en trouve déplacé. D'autant que Chloe Moretz n'est pas une vampire tout à fait convaincante. C'est une plante trop vivace pour donner une idée de cet entre-deux entre la vie et la mort, de cette éternité passée chez les mortels. La jeune fille (...) ne fait pas oublier Lina Leandersson, la créature spectrale qui hantait Morse.
Quant à la mise en scène, qui reprend parfois des séquences entières du film de Tomas Alfredson, elle dégage pourtant une atmosphère sui generis, faite de la déprime qui saisit les États-Unis à l'orée de la décennie 1980, des contradictions de la psyché américaine, entre ferveur chrétienne et paganisme de l'espace. -
Morse d’Alfredson, admiré par Audiard et couronné de prix, souffrait déjà d’un académisme froid, quand le scalpel devient un crayon trop appliqué – il est difficile de filmer cliniquement les choses.
Ce remake par le réalisateur de Cloverfield ajoute au glacis prévisible d’inutiles explications. -
Transposé de la Suède au Nouveau-Mexique, le remake de « Morse » est une adaptation réussie, plus nerveuse et marquée par la religion que l’original mais qui change de l’ordinaire des films américains.
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Le remake de Morse conserve toutes les morsures sensibles de la pépite suédoise originale, mais n’offre aucune surprise. Alors, exercice inutile ? Pas forcément... (...) Beaucoup trop peu de gens ont vu Morse, Grand Prix de Gérardmer, primé un peu partout dans le monde, et férocement défendu par la presse de l’époque (2008 en fait, pas si loin...). Le remake américain vient donc à point pour sortir de l’ombre l’une des grandes références du cinéma fantastique contemporains, une œuvre à la sensibilité exacerbée, qui a su réinventer le mythe du vampire en normalisant sa tragédie dans le réalisme d’une bourgade dépressive de Suède.
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Dans l'absolu, le nouveau film du réalisateur de Cloverfield n'est pas indigne : l'histoire est émouvante, le décor (une petite ville du Nouveau-Mexique sous la neige), insolite, la photo, splendide. Le problème est que Laisse-moi entrer est le copié-collé presque intégral de Morse, sorti en France en janvier 2009. Et quand on aime le beau film de Tomas Alfredson, les rares libertés que s'est autorisées Matt Reeves ne passent pas. Ce remake hollywoodien se démarque de l'original suédois par une stupide surenchère gore, tout en édulcorant sa vision de l'adolescence. L'ambiguïté sexuelle de la petite vampirette a ainsi disparu, et la charmante Chloë Grace Moretz est bien trop mignonne pour susciter le moindre malaise...
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Tout en préservant l’essence de l’histoire originale, métaphore subtile de la préadolescence, le réalisateur a modifié le contexte (on est ici dans une banlieue grise de l’Amérique manichéenne et religieuse de Reagan). Il a également tiré le film davantage vers l’horreur, mais une horreur latente, rampante, façon « Shining ». Bref, il a su trouver la bonne distance entre le respect dû à l’œuvre d’Alfredson et la nécessité de se la réapproprier.