Première
par Frédéric Foubert
Alors que la filmo de Marco Bellocchio est célébrée en ce moment même à la Cinémathèque française (rétrospective jusqu’au 9 janvier), et que son tout premier film (Les Poings dans les poches, 1963), vient d’être édité en DVD, le maître italien, 77 ans, sort en toute discrétion, presque sur la pointe des pieds, l’un des très beaux films de cette fin d’année. Une adaptation d’un best-seller italien (Fais de beaux rêves, mon enfant, de Massimo Gramellini) racontant la longue enquête psychanalytique d’un journaliste traumatisé par la mort mystérieuse et brutale de sa maman alors qu’il était encore en culottes courtes, dans le Turin des années soixante. Entremêlant les époques, Bellocchio encapsule ici un demi-siècle d’histoire ritale (le foot, les curés, la corruption politique, la télé en bruit de fond) sans jamais hausser le ton, composant plutôt une mosaïque de vignettes spleenétiques et sépia, qui laissent les yeux embués et le cœur gros. C’est parfois un peu trop ouvertement sentimental, mais le regard triste du beau Valerio Mastandrea, héros hagard ressassant des souvenirs d’enfance mal digérés (géniales citations de Belphégor), excuse beaucoup de choses. Fais de beaux rêves est une ode envapée à l’amour maternel, quelque chose comme un opéra intime, qui permet de finir 2016 dans un cocon mélancolique et cotonneux. Et sur une conclusion qui nous convient très bien : pour faire de beaux rêves, ouvrir les yeux.