Quand on découvre Gibraltar, on comprend vite que c’est un film fait par des gens qui aiment très fort le cinéma américain des années 70… Tant mieux si vous avez ressenti ça. Que ce soit en termes de lumière, de filtres, de focales ou de montage, j’ai beaucoup pensé à Friedkin. Egalement au Pollack de La Firme et au Pakula de L’Affaire Pélican. Mais la grande référence, c’était le Zodiac de Fincher, et la question qu’il soulève : comment recréer une époque – en l’occurrence, les années 70 – à l’ère du numérique et des effets spéciaux ? Cet exercice-là m’intéressait vachement.Quand Fincher tourne Zodiac, il a en tête l’imaginaire des 70’s, Les Hommes du Président, L’Inspecteur Harry… En France, les réalisateurs ont biberonné à ce cinéma-là, mais ils doivent aussi dealer avec l’héritage du polar français. C’est pas trop lourd à porter ? Ça rend pas un peu schizo à la longue ? Pas vraiment. Moi, j’adore tous les cinémas, je vois tout, mais quand je regarde ma collection de blu-ray, il y a 90% de films américains, 5% de films coréens, et 5 % de films français. C’est un peu triste mais c’est comme ça. Il y a pourtant des réalisateurs français que j’adore, mais j’avoue que j’ai très peu de références ici en termes de mise en scène.Comment jugez-vous l’état du polar français aujourd’hui ? Pour être franc, je déteste le cinéma d’Olivier Marchal, de Frédéric Schoendoerffer. Je ne me retrouve pas là-dedans. Je trouve ça caricatural. Chaque fois qu’on voit des flics, ils sont en train d’ouvrir des bières. C’est pas la vraie vie, ça… Je suis content d’avoir trouvé avec Gilles Lellouche et Tahar Rahim des acteurs qui ont les mêmes références que moi. Pourquoi est-ce qu’on aime autant ces films américains ? Parce qu’ils sonnent vrai.Le film donne l’impression qu’il y a une guerre de générations en train de se mettre en place dans le cinéma français… Je ne suis pas en guerre. Je n’ai rien contre Olivier Marchal. Non, le vrai problème, c’est que certains metteurs en scène français veulent à tout prix mettre leurs fantasmes à l’image. Si on raconte une enquête dans un commissariat parisien, à quoi ça sert qu’elle se déroule dans un univers à la Matrix ? Moi, au contraire, ce qui m’intéressait avec Gibraltar, c’était de me documenter pour retranscrire la réalité du lieu et de l’époque.Il y une dimension politique et critique dans Gibraltar qui était absente de L’Assaut, votre précédent film… Mon ambition dans L’Assaut était de montrer qui se cachait derrière les casques du GIGN. Que c’étaient pas des Robocop, mais des pères de famille, des gens comme vous et moi. Le script de Gibraltar était à l’origine plus politique, mais il y a 2-3 choses que j’ai dégagées, comme tout ce qui concernait les relations de Marc Fiévet avec Charasse. Je voulais avant tout raconter une histoire humaine. Marc Fiévet, c’est pas Mesrine, il ne fait pas partie de notre histoire nationale. Le fait de changer le nom du personnage (Fiévet a été renommé Duval dans le film – ndlr) nous donnait beaucoup plus de liberté. Et débarrassait Gilles Lellouche de l’obligation du mimétisme. Ceci dit, ce qu’on raconte dans le film est vrai à 90%.Jouons si vous le voulez bien à imaginer le casting d’un hypothétique remake US de Gibraltar. Qui dans les rôles de Gilles Lellouche, Tahar Rahim et Riccardo Scamarcio ? Pour Gilles, il faut un family man, un mec un peu posé. Matt Damon serait bien. Michael Fassbender pour Tahar. Javier Bardem pour Riccardo. Et je veux bien mettre en scène, si vous voulez ! Interview Frédéric FoubertGibraltar de Julien Leclercq avec Gilles Lellouche, Tahar Rahim et Riccardo Scamarcio, déjà dans les salles Gilles Lellouche : "Les gens ne vont pas aller voir Gibraltar pour voir le "nouveau Gilles Lellouche""En vidéos : 5 films à voir avant Gibraltar
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