A l'occasion de la diffusion du film sur Arte, nous republions une interview de sa star.
Dallas Buyers Club, de Jean-Marc Vallée, raconte l’histoire vraie de Ron Woodroof qui, apprenant qu’il était séropositif, défia la loi américaine pour proposer aux victimes de la maladie des traitements alternatifs. Ce rôle a valu à Matthew McConaughey l'Oscar du meilleur acteur, en 2014, couronnant son irrésistible renaissance. Première l’avait rencontré peu de temps avant ce sacre hollywoodien. Confessions d’un acteur métamorphosé.
Propos recueillis par Mathieu Carratier
Affuté comme jamais
"J’ai perdu 22 kilos pour incarner Ron Woodroof. Les médias s’en sont gargarisés, inventant toutes sortes d’histoires, notamment que j’arrivais chaque jour sur le plateau en rampant tellement j’étais affaibli. Sauf que c’est complètement faux. J’étais suivi par un nutritionniste, tout était contrôlé. Et si j’ai perdu 40 % de ma masse musculaire, c’est comme si elle avait été redirigée vers mon cerveau. (Il désigne sa tête.) J’étais à fond là-haut, mon esprit était affûté comme jamais, ma conscience était décuplée. À présent que j’ai repris les kilos, cette effervescence mentale s’est atténuée. Tant mieux car ce n’est pas un état dans lequel j’aimerais être en permanence. Les gens qui m’entourent auraient fini par péter les plombs."
Renverser la vapeur
"Ça faisait un bon moment que j’essayais de monter Dallas Buyers Club. Les autres films que j’ai tournés ces deux dernières années (Killer Joe, Paperboy, Mud, Magic Mike) étaient venus à moi. À un moment donné, j’ai décidé de relancer ma carrière. Je voulais me repositionner et ma solution a été de ne pas travailler pendant un temps. J’ai dit non à des projets qui me plaisaient mais qui auraient été trop évidents. J’ai regardé mon compte en banque et j’ai constaté que le loyer était payé et que le frigo était plein. Tout allait bien. Mais j’étais quand même un peu inquiet à l’idée de disparaître de la circulation dans le sens où je ne savais pas combien de temps il allait me falloir pour renverser la vapeur. Et puis au bout d’un an et demi, deux ans, le téléphone s’est remis à sonner, les bons scripts ont recommencé à arriver. Aujourd’hui, je me fais plaisir comme ça ne m’était pas arrivé depuis longtemps. Je suis impatient d’aller au boulot le lundi matin, sensation agréable que j’avais perdue."
Une expérience hermétique
"Je faisais des repas normaux, très équilibrés. C’est juste la quantité qui était réduite. Je mangeais du poisson, des légumes, mais en petites portions. Le truc dingue c’est que plus mon esprit carburait, plus mon métabolisme s’accélérait. L’énergie que je mettais dans le personnage brûlait les calories. Je me suis stabilisé à 60 kilos, le poids qui me semblait juste. Tout à coup, j’avais besoin de trois heures de sommeil en moins par nuit, j’étais debout tous les jours à 4 h 30. Le soleil brillait mais je ne pouvais pas aller dehors car il fallait que je garde un teint pâle pour le film. Je restais donc enfermé à bosser, à me documenter... J’ai passé cinq mois replié sur moi-même ; une expérience assez hermétique. Heureusement, j’avais un sujet passionnant à étudier : Ron Woodroof. Je compulsais des tonnes d’informations, j’étais devenu insatiable."
Vers la consécration ?
"Une nomination aux Oscars serait évidemment formidable. Je sais que certaines personnes sont opposées à ce genre de récompenses mais je trouve normal de juger l’art. Sinon le journal intime que je tenais lorsque j’avais 13 ans aurait potentiellement autant de valeur que du Shakespeare... Je suis donc ravi et flatté que Dallas Buyers Club fasse partie des candidats aux nominations. J’adore cette histoire, ce personnage. J’ai vécu une expérience unique, j’ai bossé comme un acharné pour lui donner corps et je suis forcément touché que ce travail soit reconnu."
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