"C'est faux", affirme Mediapart, dénonçant "une rumeur émanant d'un compte complotiste".
Depuis plus d'une semaine, les cinéphiles français ne parlent que de ça : la liste de personnalités phares du cinéma qui seraient accusées d'agression sexuelle, et qui devrait être dévoilée dès le début du festival de Cannes. Dix noms d'hommes plus influents les uns que les autres, acteurs, réalisateurs et/ou producteurs, qui seraient coupables de violences sexuelles dans le milieu du cinéma français.
Cette rumeur a tellement enflé qu'Iris Knobloch, la présidente du festival, a officiellement réagi, expliquant que si des acteurs ou réalisateurs impliqués dans des oeuvres sélectionnées cette année étaient accusés publiquement lors de l'édition 2024, les organisateurs réagiraient "au cas par cas" :
#MeToo s'invite à Cannes 2024 ?"Nous sommes extrêmement attentifs à ce qui se passe aujourd'hui, nous suivons la situation de près. Si le cas d'une personne mise en cause se présentait, nous veillerions à prendre la bonne décision au cas par cas, en concertation avec le conseil d'administration et les parties prenantes. Mais on évoquerait aussi l'oeuvre afin de voir ce qui est le mieux pour elle. C'est elle la vraie star."
Oui mais voilà, à la veille de la cérémonie d'ouverture, Mediapart a officiellement publié un démenti. Un article gratuit, accessible à tous, dénonçant "une rumeur émanant d'un compte complotiste" :
"Depuis plusieurs jours, nous assistons, médusé·es, au parcours fou d’une prétendue « liste », voire d’une « liste noire » d’auteurs de violences sexistes et sexuelles que Mediapart s’apprêterait à révéler en ouverture du Festival de Cannes, mardi 14 mai.
C’est faux, évidemment. Disons-le d’emblée : Mediapart ne publie pas de « liste ». Quand nous révélons des faits à propos de violences sexistes et sexuelles, comme sur l’ensemble des sujets d’intérêt général que nous couvrons, nous publions des « enquêtes » portant sur des informations recoupées.
Celles-ci prennent souvent plusieurs mois, au minimum plusieurs semaines. Car le temps du recoupement des informations est incompressible, et long, tout comme celui du contradictoire (qui consiste à questionner les personnes ou les institutions mises en cause)."
Le compte en question serait celui de Zoé Sagan, sur X (ex-Twitter), qui a déjà posté par le passé des accusations similaires envers des personnalités françaises. "À la veille de l’ouverture du Festival de Cannes, le spectacle médiatique est pathétique", commente encore Mediapart dans cette réponse intitulée #MeToo : la force tranquille de l’information.
Car derrière cette "fake news" se cache une réalité sombre, les accusations d'agressions sexuelles se multipliant effectivement dans le milieu du cinéma français. Judith Godrèche est devenue l'une des porte-paroles emblématiques du mouvement de dénonciation, et elle n'est pas la seule à parler publiquement des comportements condamnables de la part de réalisateurs reconnus par la profession.
"Tout cela pourrait prêter à sourire, poursuit Mediapart. Simplement, en propageant cette rumeur, la presse contribue à se disqualifier. Par les temps qui courent, c’est une mauvaise nouvelle."
Le délégué général du 77e festival de Cannes, Thierry Frémaux, a lui aussi profité de la traditionnelle conférence de presse pré-événement pour démentir l'existence de cette liste, regrettant une polémique inventée de toutes pièces :
"On a précisément pris soin de faire en sorte que l'intérêt majeur de ce pour quoi nous sommes tous ici reste le cinéma. Comme il n'y a pas de polémiques, on les invente ou on les amplifie."
Iris Knobloff, ainsi que Camille Cottin, qui animera la cérémonie d'ouverture ce soir, ont de leur côté rappelé l'importance du mouvement de libération de la parole, #MeToo, expliquant que cette nouvelle édition du festival de Cannes marquerait notamment l'occasion de "prises de paroles de personnalités fortes, puissantes". Demain, il y aura notamment la projection, en ouverture d'Un Certain Regard, du court métrage de Judith Godrèche intitulé Moi aussi, qui offre à des victimes d'agressions sexuelles un medium pour s'exprimer.
Judith Godrèche a proposé des mesures contre les violences sexuelles au cinéma devant le Sénat
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