L’acteur-réalisateur raconte les coulisses de son épatant deuxième long, où il joue un ingénieur rêvant d’accomplir le premier vol spatial habité amateur face à Mathieu Kassovitz.
L’espace est une passion depuis toujours ?
Nicolas Giraud : J’ai une connaissance du domaine mais pas une passion. Ma seule passion c’est le cinéma ! Et L’Astronaute représente toutes les possibilités d’exprimer cette passion : le grand écran, le sound design… Mais je dois avouer que cette aventure a un peu surgi de nulle part en fait, je suis incapable de vous dire précisément pourquoi et comment. Je l’ai écrit bien avant même mon tout premier long métrage Du soleil dans mes yeux, qui est sorti en 2018. On était fin 2009 quand j’ai écrit 100 pages en quelques semaines et tout était déjà là sauf que le personnage que j’incarne n’était pas ingénieur aéronautique mais travaillait comme ouvrier dans une usine à métaux et cherchait l’alliage parfait pour construire sa fusée.
Pourquoi l’aviez vous mis de côté ?
Parce que je ne me sentais pas mûr pour le faire, encore trop dans ma vie d’acteur qui venait de décoller avec Nos retrouvailles de David Oelhoffen. Ce projet relevait plus du fantasme qu’autre chose à cette époque. C’est après Du soleil dans mes yeux que L’Astronaute a ressurgi. J’avais rencontré Christophe Rossignon (producteur de La Haine, Une hirondelle a fait le printemps, Au nom de la terre… NDLR), juste avant le tournage et il m’avait dit qu’il ne m’accompagnerait pas sur ce projet car il ne développait alors plus de premier long mais qu’on se retrouverait un jour. Et quand mon distributeur de Du soleil dans mes yeux fait faillite, par amitié, il m’invite à déjeuner. Dans la conversation, je lui parle de L’Astronaute et soudain tout devient possible. Car Christophe est, lui, un vrai et grand passionné d’aérospatiale et il me fait rencontrer Jean- François Clervoy, un ingénieur spationaute français qui a effectué trois missions spatiales pour le compte de la NASA. Or mon obsession était le réalisme. Je ne voulais absolument pas traiter ce sujet sous la forme d’un conte mais faire un film auquel je crois moi-même pour que les autres puissent y croire. Jean- François a tout de suite compris ce que je voulais raconter, nous a apporté son savoir. Puis ArianeGroup nous a rejoints. Et sans ArianeGroup, L’Astronaute n’aurait jamais eu exister. On n’aurait jamais eu les moyens d’avoir les décors, le matériel, ce site de Vernon où se fait l’assemblage du moteur Ariane V. Ce jour- là, on savait que c’était gagné
Le financement a été compliqué ?
Christophe le résumé très bien : « ça a été un film contre ». Personne n’en voulait ou plutôt personne n’y croyait. On nous demandait si on se prenait pour des Américains. On doutait de ma capacité de m’en emparer après seulement un premier long métrage derrière moi. Mais au fond le film a vécu le même parcours que mon personnage et cela n’a fait que renforcer mon envie d’aller au bout de cette aventure. Ca permet d’éprouver ton désir profond de faire ce film.
Mathieu Kassovitz joue l’astronaute à la retraite qui accompagne le personnage que vous incarnez dans sa folle aventure du premier volet spatial amateur. Il était présent dans votre esprit dès l’écriture ?
Pas du tout. Ma toute première idée pour ce personnage était John Malkovich car dans la première version, il s’agissait d’un ex- astronaute de la NASA de mère française, John parlant français. La présence d’un acteur américain me permettait de montrer que je ne voulais pas faire un film français mais un film tout court. Mais ça n’a pas pu se faire. C’est à ce moment- là que Christophe me parle de Mathieu Kassovitz et je l’avoue je l’envoie bouler ! (rires). Car j’ai alors une autre idée en tête : écrire pour John Travolta qui est pilote lui- même et passionné d’aérospatiale ! Son nom figure d’ailleurs au générique car on est vraiment passé à deux doigts que ça fonctionne. J’ai réussi à le contacter. Je lui ai envoyé le scénario qu’il a adoré, il a vu mon premier long, je suis allé le rencontrer aux Etats- Unis. Il m’a donné son accord. Tout était réglé. On devait tourner le 9 mars 2020… et là on s’est pris le COVID en pleine tête et lui a eu la douleur de perdre sa femme. Je sais donc très vite que le film ne se fera pas avec lui – on est resté proches et je sais que ce n’est que partie remise. C’est là que j’appelle Christophe et je lui dis qu’il n’y a au fond qu’un seul acteur qui m’intéresse : Matthieu Kassovitz ! Il croit que je me fous de sa gueule ! (rires) Mais il a aussi les yeux qui brillent car pour lui, depuis le début, c’est la meilleure idée. Alors j’ai réécrit le rôle pour Mathieu en passant donc d’un ex- astronaute de la NASA qui croyait à l’invisible à un ingénieur français 100% cartésien. Je suis allé chercher Mathieu pour ce qu’il représente mais surtout pour ce qu’il est : son côté incisif, saillant, sa rapidité. Il ma dit oui en deux heures et dès lors son implication a été totale. Il s’est totalement inscrit dans ce projet.
L'Astronaute. De Nicolas Giraud. Avec Nicolas Giraud, Mathieu Kassovitz, Hélène Vincent... Durée: 1h50. En salles depuis le 15 février 2023
Commentaires