Le film de Paul Thomas Anderson ne sera pas rentable, mais ce n’est pas notre argent. Et pour Warner Bros. ce pari peut tout de même être gagnant.
130 millions de dollars. Depuis l’annonce de l’énorme budget d’Une bataille après l’autre, le débat est lancé. Comment la Warner Bros. va-t-elle pouvoir rentrer dans ses frais avec un film de Paul Thomas Anderson qui mélange comédie d’action et satire politique, même avec Leonardo DiCaprio en tête d’affiche ?
Trois semaines après sa sortie, on sait déjà qu’il ne sera jamais rentable. Une bataille après l'autre a rapporté 140 millions de dollars au box-office mondial, et d’après Variety il devrait engendrer une perte de 100 millions de dollars à l’issue de son exploitation au cinéma.
Si on ajoute les 70 millions de dollars alloués au marketing, le PTA a coûté 200 millions à Warner Bros. Or, comme un studio récupère dans le meilleur des cas 50% des recettes générés par un film, on comprend vite que le seuil de rentabilité est inatteignable. Mais qui a vraiment cru qu’Une bataille après l’autre pourrait faire 400 millions au box-office ?!?
Ce blockbuster d’auteur s’inscrit dans la stratégie globale de Warner Bros. qui a connu de grands succès cette année, notamment avec le film Minecraft (1 milliard de dollars pour 150 millions de budget). Le studio sera bénéficiaire en 2025, et il pouvait donc s’offrir un tel film de prestige, susceptible de séduire la critique et de bien figurer dans la course aux Oscars.
Dans une réponse communiquée à Variety, Warner Bros. réfute d’ailleurs ces chiffres et affirme que "les films sortis par le studio, dont Une bataille après l’autre, ont été rentables financièrement en 2025, avec plus de 4 milliards de recettes à ce jour".
On peut techniquement parler de flop commercial pour Une bataille après l’autre, mais il est dangereux de qualifier ainsi une oeuvre artistique dont la qualité ne saurait être quantifiée à travers son box-office. De nombreux classiques du cinéma ont été des échecs financiers lors de leur sortie, comme La Horde Sauvage, Blade Runner ou Les fils de l’homme. Il ne faut pas confondre échec commercial et artistique.
Et les chiffres d’Une bataille après l’autre n’ont rien de déshonorant. 140 millions de recettes pour une libre adaptation de Thomas Pynchon de près de 3h, classée "R" aux Etats-Unis (interdit aux mineurs non accompagnés), c’est même une belle performance. Et de loin le meilleur score de la carrière de Paul Thomas Anderson, explosant son record de There Will be Blood (76 millions).
Dans le contexte actuel, même une star comme Leonardo DiCaprio ne peut pas faire des miracles au box-office. Son précédent film, Killers of the Flower Moon, avait lui terminé sa carrière à 155 millions de dollars. A de très rares exceptions près, c’est le plafond aujourd’hui pour ce type de films exigeants.
Les fans de cinémas s’intéressent de plus en plus au box-office, et à Première on les analyse toutes les semaines. Mais il faut savoir prendre du recul et ne pas crucifier un film ou un auteur sur l’autel des chiffres sous prétexte que le 7e art est aussi un business.
Une bataille après l’autre marquera son époque. C’est aussi avec ce genre de pari qu’un studio écrit son histoire. Et on ne peut que féliciter les dirigeants Michael De Luca et Pam Abdy, qui étaient sur la sellette il y a quelques mois, d’avoir osé ce coup de poker. Il redore le blason de Warner Bros., entaché notamment par sa politique pro-streaming qui a fait fuir Christopher Nolan chez Universal.
Si le film repart avec quelques statuettes de la prochaine cérémonie des Oscars, en mars prochain, leur pari sera déjà gagnant.







Commentaires