10 références pop de Glass Onion : Les Beatles, Tom Cruise, Lana del Rey...
Netflix

Rian Johnson s'amuse beaucoup dans cette suite.

Attention, spoilers ! Cet article mentionne plein de détails du film de Rian Johnson.

Glass Onion est le carton du moment sur Netflix. Mis en ligne juste avant Noël, ce "whodunit" fait réagir les spectateurs, qui s'amusent sur les réseaux sociaux de ses multiples clins d'oeil à de véritables personnalités. Des moqueries bien senties visent ainsi ouvertement Elon Musk, Lana del Rey, Tom Cruise ou Kanye West, et certaines stars sont carrément nommées (Jeremy Renner et Jared Leto, par exemple). D'autres ont accepté d'apparaître en caméo dans cette nouvelle enquête de Benoît Blanc (Daniel Craig) le temps de courtes scènes qui ont toujours du sens. Alors c'est parti pour 10 "easter eggs" qu'il ne fallait pas manquer dans Glass Onion.


 

1. Among Us et les conseils des "cerveaux"
C'est le plus évident, et il est donné dès le début du film : Benoît Blanc tente d'apprendre les règles d'Among Us, un jeu vidéo très populaire depuis le confinement dans lequel les gamers tentent de tuer leurs adversaires dans un lieu clos sans se faire repérer. Un concept qui colle évidemment comme un gant à l'enquête qu'il va ensuite devoir élucider !
A première vue, il est nul pour ce jeu, et ce malgré les conseils de quatre personnalités qui apparaissent en zoom pour l'aider : Angela Lansbury, Stephen Sondheim, Natasha Lyonne et Kareem Abdul-Jabaar. Elles n'ont pas été choisies par hasard, la première étant célèbre pour avoir joué Miss Marple et Jessica Fletcher, deux enquêtrices hors normes du cinéma et de la télévision ; l'auteur de West Side Story ayant co-écrit, avec Antony Perkins, un "murder mystery" qui a grandement inspiré Rian Johnson pour ses films, Les Invitations dangereuses (The Last of Sheila), en 1973 ; l'actrice de Poupée russe étant la star de la prochaine série du réalisateur, Poker Face, un "case-of-the-week" inspiré une fois encore par Arabesque ; et enfin l'ex-joueur de basket ayant co-écrit avec Anna Waterhouse un roman sur Mycroft Holmes, le frère de l'incontournable Sherlock, en 2015. D'emblée, cette unique scène pose les bases de ce "Glass Onion" qui sera bourré de références, quitte à en réunir plusieurs dans une même scène !

Le drôle d'hommage de Daniel Craig et Rian Johnson à Angela Lansbury dans A Couteaux tirés 2

2. "Glass Onion", Paul McCartney et les Beatles
Autre clin d'oeil qui arrive dès le début du film : à peine arrivés sur l'île du milliardaire Miles Bron (Edward Norton), celui-ci interprète un titre des Beatles à la guitare, soit disant l'un des instruments de Paul McCartney en personne. Avant de la jeter négligemment dans le sable, afin de montrer à quel point il est richissime et que rien ne compte à ses yeux. Il joue en fait "Blackbird", un morceau du White Album (le préféré de Benoît Blanc ?!), sorti en 1968 et dans lequel figure un morceau intitulé... "Glass Onion". Un titre écrit par John Lennon en réponse à toutes les lettres de fans qui cherchaient à découvrir des messages cachés dans les morceaux du groupe ! En voilà une idée qui colle parfaitement au concept du film, dites donc. En toute logique, cette chanson sera entendue dans le générique de fin, histoire de boucler la boucle.

En parlant du nom de cette suite, Rian Johnson a fait part de sa déception que les termes "à couteaux tirés" aient été imposés par Netflix dans le titre pour des raisons de marketing. Si son film est bien lié au premier volet -il y fait d'ailleurs beaucoup échos, lire plus bas le n°8), il aurait aimé qu'il s'intitule seulement Glass Onion, un nom évoquant le verre transparent, mais aussi l'oignon à éplucher pour y découvrir le coeur du mystère. Des éléments qui sont tous explicités à l'écran au cours de l'intrigue, puisqu'il s'agit aussi du nom du bar dans lequel le milliardaire aurait eu l'idée de son entreprise à succès, et de sa villa au design si particulier.


 

3. Un milliardaire de la tech' entre Elon Musk, Mark Zuckerberg et le gourou Tom Cruise
"- C'est tellement stupide que c'est génial.
- Non, c'est juste stupide !"

Benoît Blanc ne se laisse pas berner par le supposé "génie" de son hôte, dont il n'hésite pas à se moquer ouvertement devant tous. La performance ridiculement "bigger than life" d'Edward Norton dans le rôle de Miles Bron participe aussi à accentuer les similitudes entre son personnage et Elon Musk, le patron de Tesla, de SpaceX et de Twitter. Mais selon Johnson, qui rappelle que son film a été tourné à l'été 2021, donc avant le rachat du réseau social à l'oiseau bleu par ce dernier, Bron est en fait un mélange de plusieurs "milliardaires de la tech". Sa trahison envers son ancienne partenaire aurait-elle été inspirée par celles de Steve Jobs et Mark Zuckerberg, qui ont respectivement gagné beaucoup plus d'argent grâce à Apple et Facebook que leurs collaborateurs Steve Wozniak et Eduardo Saverin ? Sa richesse folle et sa manière de l'étendre dans tous les domaines a-t-elle été piquée à Jeff Bezos ? Le boss d'Amazon est célèbre pour ses investissements dans des sites culturels (IMDb, Audible...) ou des inventions liées aux nouvelles technologies (il a lui aussi fondé une société spécialisée dans les vols sub-orbitaux, Blue Origin, a racheté celle des créateurs de robots porteurs Kiva Systems, citée ici pour porter les bagages des invités...). On pourrait même voir en ce Miles Bron un certain Ted Sarandos, patron de Netflix, la société qui n'a pas hésité à débourser près d'un demi milliard de dollars pour s'offrir deux suites d'A couteaux tirés ! L'entreprise au N rouge "a dépensé sans compter" pour faire équipe avec Johnson et Craig, et voir un milliardaire afficher ainsi son argent au coeur du film est assez troublant. Sans oublier que l'enveloppe au coeur de l'intrigue est aussi rouge que son logo. Coïncidence ?

L'une des meilleures références au sujet de Bron est son look dans le flashback de la scène du bar, directement emprunté à celui de Tom Cruise dans Magnolia (1999). Avant même qu'il ne soit publiquement moqué pour sa défense de la scientologie et son comportement déchaîné sur le plateau d'Oprah Winfrey (ça, c'était en 2005), Paul Thomas Anderson lui avait offert un rôle de gourou dans ce film, capable de convaincre tout un public par ses discours endiablés sur scène. Y faire un clin d'oeil est une autre manière d'insister sur le fait qu'il "est dangereux de confondre le fait de dire n'importe quoi et de dire la vérité", comme le rappelle Blanc à un autre personnage, Birdie Jay (Kate Hudson).

 

4. L'ombre d'Alfred Hitchcock et de James Bond
Rian Johnson multiplie évidemment les références littéraires, cinématographiques et télévisuelles dans Glass Onion. En plus de citer ouvertement Agatha Christie et Arabesque, il emprunte à Alfred Hitchcock certaines idées pour accentuer le suspense (on pense notamment à son classique de 1958, Sueurs froides, devant le soin porté aux détails), mais s'il y a un film auquel on ne cesse de songer devant ce "whodunit", c'est finalement James Bond. La description du milliardaire et de sa villa reprend directement les codes des grands méchants affrontant 007. Avoir Daniel Craig dans l'ognon de verre face à un Edward Norton digne de Blofeld accentue encore cet effet. Tout comme le fait d'engager Dave Bautista, qu'il a affronté dans 007 Spectre, en 2015, dans un second rôle. Plus l'enquête avance et plus Craig se lâche en Benoît Blanc, arborant des tenues plus extravagantes les unes que les autres et s'amusant visiblement comme un fou à briser son image habituelle, d'espion à la carrure internationale, certes, mais trop lisse et sérieuse pour véritablement l'exciter. L'acteur l'incarnait depuis 2006 et cinéma et il n'a pas caché son envie de dire adieu à 007 ces dernières années. A peine a-t-il tiré sa révérence avec Mourir peut attendre, qu'il est déjà prêt à détourner son image, à jouer avec et à montrer qu'il est bien meilleur acteur quand il peut s'amuser dans un rôle ! Benoît Blanc deviendra-t-il aussi iconique que Bond dans sa carrière ? Le dépassera-t-il en popularité ? Tout est fait pour que la comparaison nous trotte dans la tête durant tout le film en tout cas.

Selon Dave Bautista, Daniel Craig n'était pas très heureux sur le tournage de James Bond

 

5. Le roi des comédies romantiques et autres caméos
Autre révélation de cette suite : si l'on ne savait rien ou presque de Benoît Blanc dans le premier A couteaux tirés, on apprend ici en une scène qu'il est gay. Il vit avec un homme, Philip, qui est joué là aussi par un acteur choisi pour ce qu'il représente : Hugh Grant, c'est LA star des comédies romantiques des années 1990/2000. L'acteur qui a fait craquer tout le monde avec Quatre mariages et un enterrement, Coup de foudre à Notting Hill, Le journal de Bridget Jones, Love Actually... Ce jeu des caméos ne s'arrête pas à lui, mais c'est le plus marquant, tant il a du sens en dehors de l'intrigue de Glass Onion. On peut noter aussi que le fait de voir apparaître Serena Williams en coach sportive personnelle de Bron, juste après qu'elle ait officiellement pris sa retraite est aussi un gros coup de la part de Johnson, qui fait écho à la réalité avec ce genre de blague meta. Par ailleurs, choisir un comédien aussi célèbre qu'Ethan Hawke pour lui offrir seulement quelques secondes d'écran (dans la peau de "l'homme efficace") et ne plus jamais en reparler au fil de l'intrigue est aussi une manière de jouer avec les attentes du public : il filmait en fait la série Moon Knight pas loin de l'équipe de Glass Onion, et c'est comme ça qu'il s'est vu proposer ce rôle en coup de vent.

Chaque apparition est pensée, jamais gratuite. Idem pour les mentions : Jared Leto ou Jeremy Renner, moqués ici pour leurs fabrication de produits improbables qu'ils vendent sur leur nom, sont deux personnalités problématiques, dont le comportement a été dénoncé à Hollywood. Seule Halle Berry, citée comme un juron par Benoît Blanc, apparait ici par surprise, juste parce que son nom sonne bien ! Sa mention a d'ailleurs beaucoup amusé l'actrice, qui y a fait référence sur Twitter.

 

6. Lana Del Rey, Joe Rogan et les sceptiques du Covid
En situant l'intrigue pendant le pic de l'épidémie de Covid, Rian Johnson choisit une période très particulière, qui lui permet d'aborder frontalement la question du complotisme. Parfois sous forme de blague : le masque-bijou qui ne protège de rien, porté par Kate Hudson, évoque évidemment celui de Lana Del Rey, porté publiquement en octobre 2020. Il est là pour faire sourire, même si cette mise en scène des personnages, masqués ou non lors de leur première scène en commun, montre rapidement quel est leur rapport à l'épidémie et donc au danger qu'ils représentent pour les autres. Arriver sans masque ou le laisser sous le nez, embrasser des convives ou rester à distance, porter un vrai masque médical ou un fait maison... cela en dit long sur leur perception du virus et leur rapport à autrui.

Dans le même esprit, certaines critiques sont encore plus frappantes : le personnage extravagant de Dave Bautista, le youtubeur Duke Cody, est ouvertement inspiré d'un vrai podcasteur, Joe Rogan. Extrêmement suivi sur les réseaux sociaux, c'est un masculiniste dont les propos provocants font régulièrement scandale, qui est notamment célèbre pour fait fumer du cannabis à Elon Musk dans l'une de ses émissions, et qui a aussi incité les adolescents américains à ne pas se faire vacciner dans ses vidéos. En faire le pantin du milliardaire de la tech', qui finit par se faire assassiner quand il comprend ce qui se passe et essaye de le faire chanter, prend encore plus de sens en connaissant son "modèle"

Glass Onion/Lana Del Rey
Netflix/Lana Del Rey

7. J.K. Rowling, Kanye West et les stars problématiques qui s'auto-grillent sur Twitter
Les références à Musk et Twitter sont nombreuses dans le film, mais pas seulement par le personnage de Miles Bron, donc. Chacun permet en fait au scénariste et réalisateur d'ouvertement critiquer un type particulier de personnes influentes de la société actuelle. Il touche même directement à la politique via celui de Kathryn Hahn, une gouverneure dont la campagne a été financée par Bron. Toute ressemblance entre elle et Donald Trump (entre autres !) n'est absolument pas fortuite.

Birdie Jay et ses déboires sur les réseaux sociaux peut aussi rappeler J.K. Rowling ou Ye, alias Kanye West, qui se sont auto-grillés auprès d'une partie de leur public. La première en partageant à plusieurs reprises des propos transphobes, ce qui a fini par diviser la "fanbase" de Harry Potter, et le second en écrivant des messages racistes qui ont fini par lui faire perdre le soutient de sa maison de disques, et des millions de dollars dans la foulée.

8. Des liens plus ou moins cachés avec le premier film
N'en déplaise à Rian Johnson qui aurait aimé que son film s'intitule simplement Glass Onion, il existe de nombreux liens entre cette suite et A couteaux tirés. La construction des deux enquêtes est très proche, tout d'abord : Benoît Blanc est engagé par une personne mystérieuse, puis il résout l'enquête pour laquelle il a été appelé très rapidement (avant même que le faux meurtre n'ait lieu dans cette deuxième histoire, en l'occurrence !), puis il parvient à démontrer que l'histoire est plus compliquée que prévu. Il fait alors équipe avec la véritable victime, à chaque fois une femme pauvre -qui a cependant des valeurs- plongée dans un monde de riches -qui eux, ne respectent rien : Ana de Armas jouait une infirmière dans le premier et Helen (Janelle Monae) est ici institutrice. Elles finiront par renverser le système sur les bons conseils de Blanc, et si la manière de faire est différente, la critique de fond sur la lutte des classes reste similaire. Il y a cette même manière de dire "fuck" dans les deux films : le personnage de Chris Evans se lâchait envers tous les membres de sa famille dans le premier ? Ici, c'est Helen qui se rebelle, fait des doigts d'honneur à son hôte avant de littéralement tout cramer.

Johnson s'amuse aussi à créer des parallèles entre ses deux films, en citant à chaque fois Jessica Fletcher, l'héroïne d'Arabesque ou en embauchant le même comédien, Noah Segan, pour jouer le policier Wagner et le squatteur de l'île, Derol. Il faut avoir l'oeil, car il est méconnaissable, mais c'est évidemment fait exprès ! Idem pour les caméos vocaux d'un autre grand copain qu'il engage sur tous ses projets, Joseph Gordon-Levitt : il double l'inspecteur Hardrock dans le premier et fait la voix de l'horloge ("Dong !") dans cette suite. Notez enfin un plan rigolo qui fait directement écho au titre des deux oeuvres : quand la lumière s'éteint, il manque un couteau de cuisine ("Knive out") exagérément gros durant un instant. Un élément qui est là seulement pour la blague, puisque personne ne sera finalement agressé avec cette arme. Comme la sculpture pleine de couteaux qui figurait symboliquement derrière les suspects du premier opus, en somme.

9. Et avec Star Wars ?
Des internautes se sont demandé si les tatouages de Sith du personnage de Dave Bautista étaient un clin d'oeil à un autre film de Johnson, Les Derniers Jedi. Ce dernier affirme que non : interrogé sur Twitter à ce sujet, il répond que c'était "100% une idée de Dave". Il reste cependant un énorme point commun entre ce blockbuster et Glass Onion : cette même manière de reprendre un genre très codifié pour mieux jouer avec, le détourner, voire littéralement l'exploser. Rian Johnson a beaucoup parlé de son souhait de faire évoluer la mythologie Star Wars avec son film (et non de la "casser" comme certains spectateurs ont pu lui reprocher). Ici, il s'attaque aux codes du "whodunit" de façon plus frontale.

10. De l'art et des mèmes
On a vu que Rian Johnson pouvait grâce à Glass Onion jouer avec toutes sortes de références artistiques, qu'elles soient cinématographiques ou musicales. Il s'attaque ici plus globalement à l'Art, avec un grand A, en se moquant du goût du milliardaire d'exposer ses oeuvres comme des trophées, de chercher à en mettre plein la vue à ses convives. Sans y conaître grand chose, finalement. Comme il se mélange dans les mots, il associe sans goût des tableaux et sculptures qui jurent une fois exposées ensemble, voire les accroche à l'envers, comme ce tableau de Mark Rothko. 
 

Une blague qui fait écho à une mésaventure véritablement arrivée au musée Kunstsammlung de Dusseldorf, dans lequel un tableau de Piet Mondrian était exposé à l'envers... depuis 77 ans. Toute l'intrigue autour de la Joconde rappelle aussi les récents coups médiatiques de militants écolos, qui s'en prennent à des oeuvres mondialement célèbres pour faire entendre leurs peurs concernant l'urgence climatique. S'ils savent qu'elles ne risquent rien en étant protégées, ils les visent tout de même pour se faire entendre.
Une fois encore, les oeuvres montrées dans le film ont été choisies avec soin, pour évoquer de véritables histoires montrant les travers de la société actuelle. Le fait qu'elles finissent explosées au sol ou brûlées n'est pas une manière de dire qu'il faut brûler l'art, mais plutôt qu'il appartient à de mauvaises personnes, à des gens qui ont assez d'argent pour s'offrir de telles oeuvres, mais sans comprendre à quel point elles sont inestimables. Leur perte est aussi importante aux yeux de Helen que la vie de sa soeur, que le milliardaire a voulu manipuler publiquement et qu'il a fini par tuer quand il a compris que son secret serait découvert.

Pour boucler la boucle avec les références aux réseaux sociaux, ce film -et sa promo- sont remplis de clins d'oeils à des "mèmes", dont les acteurs ont pleinement conscience. En témoigne cette photo partagée par Janelle Monae pile pour la diffusion du film sur Netflix, qui cite ouvertement l'image de la filette souriant malicieusement devant un incendie. Pendant tout Glass Onion, Johnson invite ainsi les spectateurs à "jouer" avec lui, à garder l'esprit en ébullition pour trouver les multiples "easter eggs" qui parsèment son film. Qu'ils soient simplement fun ou qu'ils aient un sens plus profond, il en a mis absolument partout !