Abdel Raouf Dafri, créateur de La Commune et co-scénariste d’Un Prophète et de Mesrine, adapte un thriller choral d’espionnage sur fond de société algérienne sous tension, et le dope à l’adrénaline.
Abdel Raouf Dafri et Frédéric Jardin avaient travaillé ensemble sur les deux dernières saisons de Braquo. L’attelage du scénariste et du réalisateur se reforme pour Arte et change de braquet pour composer un thriller politique à dominante d’espionnage, en pénétrant les petites affaires d’États en crise et en observant leurs répercussions dans différentes strates de la société. Alger Confidentiel est à voir dès ce soir en Prime time sur Arte.
Le sujet est moins inattendu : après avoir raconté l’Algérie d’hier dans Qu’un sang impur…, Dafri opte pour une vision plus contemporaine, imprégnée de la mémoire de la guerre d’indépendance. Adaptation d’un roman d’Oliver Bottini (qui cosigne le scénario), Alger Confidentiel se glisse dans les méandres d’une vente d’armes, où plusieurs parties sont à l’oeuvre, alors que survient une prise d’otages au Maghreb, qui met à mal l’équilibre diplomatique entre l’Allemagne, en plein damage control, et l’Algérie de Bouteflika, au bord de bouleversements majeurs. Dans ce bourbier vont notamment évoluer un inspecteur allemand et une juge d’instruction algérienne engagés dans une relation secrète, qui les expose du même coup à un conflit d’intérêts.
Baignant dans les codes du récit d’espionnage où tout un microcosme se retrouve mêlé de près ou de loin aux mêmes affaires, cette mini-série engendre des résonances politiques fortes. Prenant un recul nécessaire, le script plonge dans les recoins de tractations pas si respectables, jusque dans l’arrière-cuisine des lieux de pouvoir gagnés par la corruption. Finalement, la relation amoureuse interdite, vendue comme le noeud du récit, reste en retrait, servant les intérêts des forces en présence… comme ceux du scénariste. Un rouage, parmi d’autres, composant une intrigue gigogne, de plus en plus frénétique.
On n’est pas chez Dafri pour rien. À tel point que, dans son dernier acte, la série perd en mécanique de précision et en subtilité ce qu’elle gagne en punch et en force brute. La série monte dans les tours jusqu’à l’emballement, servie par la mise en scène nerveuse de Jardin qui, outre Braquo, a un long historique avec Engrenages et est bien rompu aux filatures et aux « défouraillages » en règle. Parce qu’au bout du compte, les deux compères finissent toujours par faire parler la poudre.
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