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Provocateur et indépendant, Im Sang-soo a toujours tourné des sujets originaux (Une femme coréenne, The President’s Last Bang). On peut donc s’étonner qu’il ait accepté une commande, qui plus est le remake d’un classique du cinéma coréen. Le principe reste le même (une servante sème le désordre), mais la version actualisée est sexuellement plus explicite et politiquement plus corrosive. (...) Autour du maître et de la servante, Im Sang-soo a inventé cinq autres personnages féminins. Deux sortent du lot, pour le meilleur et pour le pire. Le premier est celui de la vieille gouvernante, qui vit par procuration avant de prendre une décision touchante et courageuse lorsque Euny assume une liberté dont elle-même n’a jamais osé se saisir. Le second personnage – la belle-mère – est la gardienne d’un ordre qui résout tous les problèmes avec de l’argent. Hélas, le rôle, lourdement démonstratif, plombe le milieu du film qui, sans ce ventre mou, aurait triomphé, entre un début magistral et un épilogue tétanisant...
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Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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C'est une fable qu'on peut qualifier de sociale, façon Les Bonnes, de Genêt, ou de mythologique, puisque la jeune épouse s'appelle Héra et que son mari est aussi infidèle que Zeus...Ce thriller cruel, mis en scène en virtuose, confirme qu'en termes de « storytelling », le cinéma coréen n'est pas loin d'être le meilleur du monde...
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Drame flamboyant d’un érotisme subtil et discret magistralement joué.
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Spécimen rare, Im Sang-Soo donne à chaque nouvel opus l'impression de réinventer le langage mélo, les genres et sa propre position de cinéaste majeur.
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Question d'époque, ce remake d'un grand classique coréen, Hanyo, réalisé par Kim Ki-young en 1960, place cette fois la caméra du côté de la servante et non plus du maître. Cette plongée sociologique dans une Corée du Sud inconnue de nous donne une photo d'un monde étrange, froid sous la neige, et pourtant, pas si éloigné que ça, peut-être parce que la richesse uniformise les désirs à travers la planète ?
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Im Sang-soo soigne l'atmosphère, envoutante et oppressante. Ce huis clos surprend par sa sensualité et sa cruauté, mais aussi par sa satire de ces familles qui ont perdu pied avec la réalité, à vivre dans l'opulence, et des naïfs qui resteront des victimes toute leur vie. D'une rare élégance visuelle, cette fable contemporaine au suspense hitchcockien donne parfois le vertige.
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Qu'importe si on ne saisit pas le sens exact d'une préface et d'un épilogue énigmatiques. Entre les deux, il y a un festival d'idées à l'esthétique simple et efficace. Comme le discours, d'ailleurs. Aucun tabou, pas de faux-semblant. On appelle un chat un chat, et une Jeon Do-yeon (prix d'interprétation à Cannes, en 2007, pour Secret Sunshine), une beauté. Lee Jung-jae, son amant à l'écran, n'est pas mal non plus. Tout le monde devrait donc y trouver son compte.
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The Housemaid, hélas, est plus prévisible qu’un récent et très bon film sur une bonne poussée à bout (le chilien La Nana). La résolution du conflit est ici totalement hystérique et précipitée. Mais on est frappé par la beauté mortifère de son environnement olympien, une grande demeure saisie par des cadres léchés et une photo qui embaume les occupants (surtout la belle-mère). La symétrie y est aussi graphique que scénaristique, scindant la maisonnée en deux duos (l’épouse et sa mère, la bonne et une gouvernante plus âgée et cynique) sur le front d’une guerre domestique. Si le film frise parfois l’exercice de style affecté (se faire faire une fellation, c’est bien, la subir dans la position de L’Homme de Vitruve de De Vinci, c’est mieux), il ne ment pas sur l’érotisme promis et incarné par l’actrice Jeon Do-yeon dans le rôle titre.
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Le plus : La mise en scène sublime d’Im Sang-soo qui transforme une maison luxueuse en théâtre d’ombres et de lumières où des personnages se déchirent. Le suspense progressif et l’impression anxiogène se dégageant de l’histoire prennent aux tripes dès la brillante séquence d’ouverture. La performance subtile de Jean Do-youn emporte l’adhésion en faisant partager les épreuves d’une femme un brin simplette exploitée jusqu’à sombrer dans la folie.
Le moins : La démonstration n’est pas toujours légère. On peut aussi juger la réalisation maniérée si on n’entre pas dans l’univers du réalisateur. -
Le peu d'excitation suscité par le film vient davantage du bas de l'échelle sociale. Il y a une ambiguïté et une tension intéressantes du côté des domestiques - la jeune et une autre plus âgée - touchées jusque dans leur chair, leur corps de femme et de mère, par la soumission sociale. Surprend par exemple la façon déroutante dont la nouvelle venue, d'une naïveté confondante, offre ses services à ses maîtres dans un abandon physique total et passionné, comme si elle mettait littéralement son corps à leur disposition. Il faut voir l'énergie très sexuelle qu'elle déploie pour récurer une baignoire et le plaisir étrange qu'elle semble en tirer. Sa ferveur sera à peu près la même lorsqu'elle reniflera pour la première fois le sexe de son patron, déclarant raffoler de son odeur. La scène saisissante qui, dans la rue, ouvre The Housemaid, propose une première approche plus documentaire et abrupte de cette dévoration sociale : la future bonne assiste au suicide d'une jeune femme dans un quartier truffé de restos et d'échoppes dont les plats fumants paraissent obscènes en un pareil moment. C'est cette alternative-là - manger ou être bouffé par la rue - que la jeune femme quitte pour la retrouver finalement sous une autre forme, soit : baiser (avec un appétit féroce) ou être baisé. Dommage que ce trouble social, organique et presque cannibale, ne travaille pas le film plus en profondeur.
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Im Sangsoo a choisi de se démarquer de ses prédécesseurs, au premier chef de la démesure grotesque, du trouble charnel et de la sauvagerie émancipatrice du chef-d'œuvre de Kim Ki-young. Ce parti pris est loin d'être convaincant.
Sur le fond d'abord, puisqu'il fait de la jeune Euny (Jeon Do-youn, Prix d'interprétation à Cannes en 2007 pour Secret Sunshine, de Lee Chang-dong) une jeune fille simplette et généreuse, destinée à devenir la victime de la famille de la haute bourgeoisie où elle prend sa place. (...) Le film fait alors miroiter l'idée d'une vengeance qui ne viendra jamais. Il gagne ainsi en originalité par rapport à son modèle, mais aussi en manichéisme (les mauvais maîtres, la bonne servante) sans intérêt.
Par ailleurs, son parti pris maniériste le dessert considérablement : une mise en scène au cordeau, ampoulée, glaciale, observant les personnages avec la distanciation d'une leçon d'entomologie. En renonçant ainsi à l'enjeu charnel de l'aliénation sociale, le film se condamne à n'être qu'un brillant exercice de style. -
(...) Im Sang-Soo semble au contraire persévérer dans un esprit de sérieux et une suffisance qui rendent le film aussi grandiloquent que creux. (...) on a le désagréable sentiment d'un cinéaste qui, désormais sûr de son fait, met les pieds sous la table et se débouche une bonne bouteille de cynisme.