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Après avoir porté à l’écran La Promesse de l’aube de Romain Gary, Eric Barbier se confronte à une autre enfance, celle racontée par Gaël Faye dans Petit Pays. L’action du roman débute en 1992, au cœur des jeux d’un garçon de dix ans, Gabriel, élevé au Burundi entre un père français et une mère rwandaise. Le réalisateur retranscrit par de jolies scènes les saveurs d’un paradis perdu et parvient à traduire l’écriture fine de Gaël Faye sur le quotidien à Bujumbura en authentiques moments d’Histoire où la banalité s’inscrit en pointillés. Mais cette ode joyeuse à l’enfance va progressivement virer au cauchemar. Et c’est à hauteur d’enfant, presqu’éloignés du malheur que nous vivons, comme Gabriel le héros, le génocide rwandais, quand, accompagné de sa jeune sœur, il commence à entendre les assauts de la folie meurtrière en marche. Jean-Paul Rouve incarne leur père. Et il excelle dans un registre ambivalent où il donne des couleurs à un personnage assez taiseux. La réussite de Petit Pays doit énormément à son énergie. Face à lui, Isabelle Kabano interprète, avec une sensibilité rare, une mère complètement fissurée de l’intérieur. Prise en étau entre l’exil contraint et la vie auprès de ses enfants, elle va se consumer sous nos yeux devant l’impossible choix. Bref, Petit Pays c’est une claque aux films hollywoodiens sur les guerres africaines qui se sont gorgés des images de violence. Ici, La gifle est encore plus grande, quand le spectateur, comme le héros, réalise l’ampleur de l’horreur.