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Découvert l’année dernière dans la section Un Certain Regard du Festival de Cannes, alors que paradait au même moment Sans filtre de Ruben Ostlünd en compétition (avec le succès que l’on sait), cette comédie norvégienne affichait une même volonté de caricaturer frontalement les travers de nos sociétés occidentales. Là où le nihilisme et le cynisme du Suédois ne produisent que des tartes à la crème, Kristoffer Borgli (auteur d’un premier long inédit dans nos salles, Drib en 2017), plus empathique avec ses personnages, lui, explore un malaise bien plus profond et signe une insidieuse satire sur la représentation. Il n’est d’ailleurs ici question que d’apparence, donc de transformation possible, que, Signe (!) la jeune héroïne va expérimenter à l’extrême. Cette dernière va ainsi provoquer une maladie de peau pour attirer l’attention d’un entourage totalement envahi par l’aura de Thomas, son fiancé, artiste-designer égocentré et successfull. Signe devient dès lors un être paradoxal, à la fois ultra-visible et défigurée, objet de curiosité et bientôt de convoitise. « Sick of herself » peut-être mais surtout condamnée à un trop plein d’elle-même. Cette métamorphose ne produit que des effets indésirables qui lui renvoient, au sens le plus propre du terme, l’image de sa propre monstruosité. Borgli, toujours à bonne distance de son personnage, provoque du rire, sans chercher la facilité. On regrettera juste que son récit se révèle in fine un peu trop sage, le jeune cinéaste ayant pu aller encore plus loin dans cette entreprise jouissive à souhait de destruction voire de mystification.