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Un Festival de Cannes sans Naomi Kawase, c’est un peu comme une soupe miso sans eau. Ne reste qu’un morceau de fromage gluant et sans goût. On exagère à peine, tant la cinéaste japonaise qui a sa place quasi assurée dès lors qu’un métrage est prêt, apporte forcément à une sélection calme, sérénité et un surcroit de tendresse. D’aucuns trouvent ce cinéma minimaliste et animiste un tantinet précieux où à force de chercher l’indicible dans une feuille d’arbre après la pluie ou de laisser lentement les sentiments affleurer à la surface de l’écran, rien ne bouge plus vraiment. Vers la lumière et son titre programmatique, s’annonçait sur le papier et dans ses premières minutes, comme une subtile mise en abîme de son cinéma (et du cinéma général), doublée d’une réflexion sur le langage des images. On suit ici le travail d’une audio-descriptrice de film, chargée de mettre des mots sur les images à l’attention de spectateurs mal ou non-voyants. Et puis, arrive dans sa vie photographe dont la vue se détériore peu à peu. Comment décrire un sentiment et restituer une émotion sourde ? La prise en charge du visible pour quelqu’un n’entraîne-t-elle pas une autre forme d’aveuglement? Ce sont toutes ses considérations philosophiques passionnantes que tente de saisir le film. Mais foin de théorie ici, la fiction et ses mystères sont plus forts que tout et apportent une forme de réponse. Vers la lumière c’est donc avant tout une histoire d’amour entre deux êtres qui essaient tant bien que mal de faire l’expérience de l’altérité. Un bien beau film en somme.