David Gordon Green : « Les bagnoles, le cinéma, la musique, les filles... Tout était plus cool dans les années 1980 »
8 choses à savoir sur David Gordon Green
Ex - « nouveau Terrence Malick » reconverti dans la comédie sous pétard (Délire express, Baby-Sitter malgré lui), David Gordon Green revient à ses amours pastorales dans Prince of Texas, un road-movie au ralenti avec Paul Rudd et Emile Hirsch. Le moment ou jamais de faire le point sur une carrière inclassable.<strong>Propos recueillis par Frédéric Foubert</strong>
Il est schizo mais il assume
« Parce qu?ils ont besoin de se ?vendre? auprès des studios, les réalisateurs ont tendance à s?enfermer dans un genre. Qui financerait une comédie romantique signée Shyamalan ? Moi, j?ai envie de m?essayer à tous les types de films possibles. Plus ma carrière sera hétéroclite, plus elle aura du sens. Une fois que j?aurai tourné un film d?horreur, une comédie musicale et réalisé le remake de l?un de mes films, vous ne me demanderez plus si je préfère le drame ou la comédie. <em>Prince of Texas</em> évoque d?ailleurs ces deux facettes de ma personnalité. Paul Rudd incarne cette part de moi qui aime le cinéma indépendant et contemplatif et Emile Hirsch, mon côté mal élevé ! <em>(Rire.)</em> »
Il n'a rien contre le titre français de son film
« Le titre original du film est <em>Prince Avalanche</em>. On y perçoit les notions de noblesse, de nature, de catastrophe... Sauf qu?on m?a expliqué qu?on ne pouvait pas le distribuer sous ce titre en Europe car un prince hollandais, dont j?ai oublié le nom, est mort dans une avalanche, et que ça risquait de froisser certaines sensibilités. Cela dit, <em>Prince of Texas</em>, ça me va très bien. C?est comme un mélange de <em>Paris, Texas</em> et de <em>Kings of the Road</em>, qui sont mes deux films préférés de Wim Wenders. Et puis ça sonne toujours mieux que <em>Very Bad Trip</em>, non ? <em>(Rire.)</em> »
Il est très nostalgique des années 1980
« Si l?action de <em>Prince of Texas</em> se déroule en 1988, c?est parce que je voulais montrer des gens en train d?écrire ou de recevoir des lettres de rupture. Je trouve ça très romantique, mais c?est inenvisageable dans le monde d?aujourd?hui. Au-delà de ça, je suis ultra nostalgique des années 80. C?est la décennie pendant laquelle j?ai grandi, l?époque des films de John Hughes et de Tony Scott, de John Carpenter et de Brian De Palma. Les bagnoles, le cinéma, la musique, les coiffures des filles, tout était plus cool à l?époque. »
Il tourne beaucoup
« C?est très agréable d?avoir la chance de s?exprimer grâce au cinéma. Je suis assez mal à l?aise en société et les films me permettent de parler de moi et de collaborer avec les autres. Aujourd?hui, en tant que réalisateur, la recherche de la perfection m?intéresse de moins en moins. Je préfère tourner vite et beaucoup plutôt que de passer des années à concevoir le plan parfait. Si je me balade et que je passe devant un endroit qui me plaît, ma première pensée est toujours : « Trouvons des acteurs, bricolons un script et tournons un film, là, tout de suite ! »
Il est allé à la fac avec Jeff Nichols
« J?ai rencontré Jeff à la fin des années 90, à la North Carolina School of the Arts. Tous mes collaborateurs réguliers sont des copains de fac, comme Danny McBride et Jody Hill, avec qui je bosse sur la série Kenny Powers. Notre point commun ? On était des outsiders ne connaissant personne à Hollywood. Ne pas avoir de carte de visite ni de ?piston? nous a donné un immense appétit et une éthique de travail. Il n?y a pas de compétition entre nous, on s?entraide : Jeff m?a fait lire la première version de <em>Mud</em>, il m?a donné des conseils pendant le montage de <em>Délire express</em>. On vit également tous les deux à Austin... Certains cinéastes croient qu?un fi lm est l?oeuvre d?un seul homme, mais notre petite bande essaie de démontrer le contraire. »
Il adore Nicolas Cage
« Je suis parti faire des repérages pour Prince of Texas avec Nicolas Cage comme passager. On préparait Joe, que j?ai tourné dans la foulée (sortie en France début 2014). Pour ce film, j?avais besoin d?un acteur à la Robert Mitchum. Et comme Mitchum est mort, personne ne pouvait mieux assurer le job que Nicolas Cage. Qui d?autre que lui peut se vanter d?être une star de films d?action, lauréat d?un Oscar pour une grande performance dramatique (<em>Leaving Las Vegas</em>), et d?avoir tourné dans des comédies totalement hilarantes ? Bruce Willis a lui aussi quelques bons films sur son CV, mais Nic est unique. Nos discussions pendant qu?on roulait ? Le cinéma, les filles, la religion, la politique. Toujours dans cet ordre. »
Il regrette d'avoir taxé une clope à Sam Shepard
« Il y a quelques années, j?ai rendu visite à mon ami Andrew Dominik sur le plateau de <em>L?Assassinat de Jesse James...</em> Ils étaient en train de tourner la scène de l?attaque du train et j?ai eu l?occasion de rencontrer Sam Shepard. Forcément, j?étais très intimidé. Shepard me dit bonjour, allume une clope, m?en propose une. Je ne fume pas, mais j?ai accepté la cigarette qu?il me tendait. Je l?allume maladroitement, et là, il me dit : « T?es pas fumeur, en fait. Tu devrais pas. » « C?est vrai, c?est mauvais pour la santé », je réponds. Et lui : « Non, tu devrais pas parce que ça te donne l?air idiot. » J?ai plus jamais touché une cigarette de ma vie après ça ! <em>(Rire.)</em> Ça m?a marqué au point que j?ai repris la scène presque mot pour mot dans Prince of Texas. »
Terrence Malick l'inspire et le fait marrer
« Quand je tourne, j?ai constamment dans un coin de ma tête un conseil que Malick m?a donné : ?Après avoir fini une scène, tourne-là à nouveau, mais sans aucun dialogue.? On voit ça souvent dans ses films, comme quand Nick Nolte et John Travolta déambulent sur le bateau de <em>La Ligne rouge</em> et se regardent sans dire un mot. Terry est bien sûr un mentor et une immense source d?inspiration pour notre génération, mais on oublie trop souvent de préciser que c?est aussi quelqu?un de très drôle. J?adorerais qu?il fasse une comédie. Peu de gens savent qu?il a écrit <em>The Gravy Train</em>, l?un des films les plus tordants de tous les temps. C?est aussi un grand fan des <em>Blancs ne savent pas sauter</em>. »
Ex - « nouveau Terrence Malick » reconverti dans la comédie sous pétard (Délire express, Baby-Sitter malgré lui), David Gordon Green revient à ses amours pastorales dans Prince of Texas, un road-movie au ralenti avec Paul Rudd et Emile Hirsch. Le moment ou jamais de faire le point sur une carrière inclassable.Propos recueillis par Frédéric Foubert
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