Affiches Films à l'affiche mercredi 1er mars 2023
Warner/ Zinc0 UGC Distribution- Orange Studio

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
CREED III ★★★☆☆

De Michael B. Jordan

L’essentiel

Un chouette film de boxe dopé par des effets superhéroïques et porté par un duel d’acteurs épatants, mais qui met un peu trop facilement Rocky à l’écart.

"Things just ain't the same for gangstas"… C’est au son de The Watcher de Dr. Dre que démarre -très fort, très bien- Creed III : le son de l’odyssée clandestine du jeune Adonis, parti dans la nuit de L.A. accompagner son pote Damian mener un match de boxe crucial. Une odyssée qui deviendra un drame, qu’Adonis devra solder une fois devenu adulte et champion du monde des poids lourds. Non, les choses ne sont plus pareilles : la saga Rocky s’est définitivement déplacée des rues froides de Philadelphie au labyrinthe de Los Angeles et est devenue la saga Creed. Michael B. Jordan, qui réalise le film, a pleinement accompli la devise de son père de fiction (Apollo) peinte sur le mur de son gymnase : "Construis ton propre héritage". Désormais, Rocky Balboa est complètement hors champ, et ne jouera aucun rôle dans l’intrigue de Creed III

Inélégance ? Oui, un peu, quand même, tout comme la façon dont est traité le personnage de Damian : joué par le toujours épatant Jonathan Majors, la némésis d’Adonis varie au cours du film, assumant toutes les nuances entre le brave type et le machiavélique salopard au gré des twists du scénario, et prenant en fin de compte le parti des riches et des puissants contre les prolos et les vaincus. Creed Vs. Balboa, Creed vainqueur, en somme, et on n’est pas sûrs que ça nous plaise, au fond. Mais tout ceci n’empêche pas de prendre un très grand plaisir devant Creed III, où Jordan se montre digne de ses prédécesseurs. C’est un très bon film de boxe et si le cahier des charges est respecté (défaite/training montage/victoire), Jordan injecte quelques idées de mise en scène dignes d'un blockbuster de superhéros. Jordan a pris son job très au sérieux, et ça se sent : Creed III est sûrement le Creed le plus sérieux, le plus intense, le plus appliqué, mais on hésiterait presque à le considérer comme un Rocky. La dynastie est assurée, mais à quel prix ?

Sylvestre Picard

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

GOUTTE D’OR ★★★★☆

De Clément Cogitore

En début d’année dernière, ressortait pour ses quarante ans, Neige de Juliet Berto, plongée sauvage dans le Paris interlope du quartier de Barbès-Rochechouart. Ce Goutte d’or lui ressemble un peu, notamment dans cette façon qu’a Clément Cogitore (Ni le ciel, ni la terre) d’extraire du lieu choisi, toute l’énergie qu’il contient. Ramsès est un voyant-charlatan qui reçoit dans son cabinet une population bigarrée désireuse d’un peu de réconfort. Son commerce oblige un numéro constant d’équilibriste donc à un mouvement permanent. C’est là où la mise en scène de Cogitore impressionne, dans sa grande mobilité au sein d’un espace pourtant exigüe dont Ramsès parvient à ne pas rester prisonnier. C’est un rapport de force qui s’engage entre : dehors et dedans, jour et nuit, dissimulation et dévoilement... Au centre du cadre, un corps donc (Karim Leklou tellurique), agile comme un chat de gouttière. Puis la menace s’élargit, ce n’est plus une profession de bonimenteurs qui réclament son dû mais des gamins des rue livrés à eux-mêmes. Et ce film se révèle impressionnant de bout en bout.

Thomas Baurez

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PREMIÈRE A AIME

LES PETITES VICTOIRES ★★★☆☆

De Mélanie Auffret

En deux films seulement, Mélanie Auffret aura réussi à imposer sa patte singulière. Une manière de raconter le quotidien de ce qu’on appelle aujourd’hui « les territoires » avec une tendresse jamais mièvre. Son territoire à elle, c’est sa Bretagne natale. Et après Roxane, elle nous entraîne dans le petit village de Kerguen, symbole de la désertification rurale qui gangrène nos campagnes à travers le combat d’Alice, sa maire- institutrice (Julia Piaton, lumineuse) pour éviter la fermeture de son école où vient de s’inscrire… Emile, un sexagénaire (Michel Blanc, savoureux) bougon soudain désireux d'apprendre à lire et à écrire. Mélanie Auffret développe ici une galerie de personnages plongés dans des situations que la réalité rude entraîne sur le terrain de l’absurde mais sans jamais verser dans le pittoresque. Son geste militant passe donc par l’humour, par un vrai sens de l’émotion qui touchent directement au cœur car rien n’y est fabriqué ou forcé. Er c’est donc logiquement que cette comédie populaire et attachante vient de triompher au festival de l’Alpe d’Huez.

Thierry Cheze

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LE BARRAGE ★★★☆☆

De Ali Cherri

Ali Cherri, est un artiste plasticien d’origine libanaise. Ce Barrage est son premier long-métrage et porte en lui des préoccupations artistiques saillantes qui l’inscrit d’emblée dans une sorte d’étrangeté souveraine. La caméra offre au regard d’immense paysages écrasés de soleil, où la présence humaine apparaît d’abord comme une incongruité. L’action se passe près d’un barrage dans le Nord du Soudan. Un homme, Maher, se retrouve quotidiennement - et en secret - devant un étrange édifice qu’il bâtit un peu plus chaque jour. La spiritualité d’un quotidien à distance des fracas du monde (à la radio, on entend le peuple soudanais se soulever) n’empêche pas les inquiétudes. Et bientôt, c’est le visage de Maher qui devient le territoire du film. Les larmes qui pointent au bord des paupières semblent plus fortes que les eaux agitées du barrage. Troublant.

Thomas Baurez

EL AGUA ★★★☆☆

De Elena Lopez Riera

Une ambiance à la Phénomènes de Shyamalan imprègne ce premier long, chronique d’un été dans un village espagnol, dont les habitants les plus jeunes trompent l’ennui en attendant des lendemains meilleurs. Ailleurs. Car le personnage central de ce récit, le plus mystérieux, n’est autre que la rivière qui traverse ce village, dont une légende veut que cette rivière soit amoureuse de la plus jolie fille du coin qu’elle attire à elle et fait disparaître dans ses flots dès que le cœur de cette dernière s’emballe pour un autre. Ce qui est le cas ici d’Ana, 17 ans, à inquiète du pouvoir de cette rivière alors qu’elle vit son premier amour. Elena López Riera embrasse cette figure mythique dans un mélange parfait de réalisme et de mysticisme en nous plongeant dans la tête de sa jeune héroïne, perdue entre ce qu’elle voit, ce qu’elle ressent, ce qu’elle rêve et ce qu’elle cauchemarde. Pour un résultat envoûtant.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

THE SON ★★☆☆☆

De Florian Zeller

Le cap du deuxième long est difficile. Et ce postulat se révèle d’autant plus inévitable pour Florian Zeller qui, Oscarisé pour The Father, a choisi de continuer dans la même voie : l’adaptation en anglais d’un de ses succès de théâtre traitant de la famille. En l’occurrence l’histoire de parents séparés impuissants devant la dérive dépressive de leur ado. Un sujet fort devant lequel il est difficile de rester insensible. Sauf que là où la mise en scène de The Father épousait à merveille la perte de mémoire progressive de son personnage principal, elle paraît ici moins fluide, plus maladroite dans sa manière d’accompagner le jeu entre réalité et imaginaire qui fonctionnait sur scène. The son a cependant un atout majeur : Anthony Hopkins dans le rôle écrit sur mesure du père du père du jeune héros. Il n’a qu’une scène. Mais elle lui suffit à tuer le game, rendant soudain pâlichon le jeu d’Hugh Jackman.

Thierry Cheze

N’OUBLIE PAS LES FLEURS ★★☆☆☆

De Genki Kawamura

Genki Kawamura est un phénomène des lettres nipponnes avec plus d’un million d’exemplaires vendus de son Deux milliards de battements de cœur. Déjà auteur de plusieurs réalisations, il adapte ici son propre roman, N’oublie pas les fleurs, récit intimiste autour d’une femme atteinte de la maladie d’Alzheimer qui voit son espace mental et affectif se brouiller peu à peu. Ici les flashbacks n’en sont pas ou plutôt sont envisagés comme des bribes de souvenirs posées sur un présent sans avenir. « Est-ce que je finirai par oublier quelque chose d’aussi magnifique ? » se demande l’héroïne devant un feu d’artifice. Mais la mise en scène à la fois sobre et très directe de Kawamura ne parvient pas tout à fait à sortir son film d’une torpeur confortable qui le fait ressembler à tant d’autres avant lui. Dommage.

Thomas Baurez

SI TU ES UN HOMME ★★☆☆☆

De Simon Panay

Ce documentaire nous entraîne dans les mines d’or du Burkina- Faso dans les pas d’un gamin de 13 ans qui, pour gagner l’argent nécessaire à ses frais de scolarité, demande à son patron de ne plus travailler en surface mais de descendre dans les galeries où sa paye se trouvera forcément augmentée. Impossible évidemment de rester insensible face à un tel sujet. Impossible de ne pas s’attacher à son personnage central, petit soldat prêt à mourir dans l’espoir d’une vie meilleure, filmé en scope, donnant l’impression qu’ici le documentaire flirte volontairement avec la fiction. Mais il manque ici un petit quelque chose pour aller au- delà de ces sentiments- là. Sans doute parce qu’au fond ce qu’on y voit est conforme dans les moindres détails à ce qu’on pensait spontanément, l’extrême pauvreté ne pouvant conduire qu’à ce qu’on voit. Et ce film, pétri de qualités par ailleurs, ne transcende jamais vraiment le seuil du constat.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

EMPIRE OF LIGHT ★☆☆☆☆

De Sam Mendes

Le cinéma prend tellement au sérieux l’hypothèse de son imminente disparition qu’il enchaîne ces jours-ci les célébrations de son passé glorieux. Une tendance qui produit des films passionnants, de Babylon à The Fabelmans. Avec Empire of Light, Sam Mendes vient ajouter sa pierre à l’édifice. Retour pour lui à une veine plus feutrée, proche des Noces rebelles, ce film est d’abord la peinture d’une solitude, celle d’Hilary (Olivia Colman), souffrant de maladie mentale, étouffant dans la grisaille d’une cité balnéaire anglaise, au début des 80s. Elle travaille à l’Empire, le grand cinéma face à la mer. La mise en place du film est assez séduisante, avec ses employés pittoresques et son patron détestable (Colin Firth à contre-emploi), à l’extraordinaire décor, ce palace Art déco fantomatique, dont l’architecture fait écho au désarroi existentiel des personnages. Mais il y a aussi ici quelque chose de trop fabriqué  qui va vite torpiller le film, plombé par son intrigue à laquelle on ne croit jamais (Hilary tombe amoureuse d’un jeune collègue noir, sur fond de montée du racisme dans l’Angleterre de Thatcher) et des considérations lénifiantes sur la façon dont l’art peut panser nos plaies. Mendes veut nous dire que le cinéma peut nous réconcilier avec la vie, mais le fait dans une forme muséale et endormie.

Frédéric Foubert

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LA SYNDICALISTE ★☆☆☆☆

De Jean- Paul Salomé

Attention trompe-l’œil, malgré la concordance des titres cette Syndicaliste n’a rien à voir avec La Daronne, précédent opus de Salomé avec Huppert en dealeuse à Barbès. Le présent film se veut un thriller parano basé sur une histoire vraie, celle qui a vu une déléguée CFDT chez Areva, brutalement agressée à son domicile étouffant du même coup un scandale d’état. Brisons d’emblée le suspense, Salomé n’est ni Pakula, ni Fincher et cette plongée dans les affres d’un pouvoir forcément corrompu et d’une intimité blessée, est bien trop illustrative pour toucher la raison du spectateur. Aucun des interprètes, droits comme la justice, n’osent faire ce pas de côté qui verrait leur personnage offrir autre chose qu’un cliché. De la trop superbe maison au bord de l’eau aux intérieurs froids et bien rangés, rien ne respire vraiment dans ce monde aseptisé.

Thomas Baurez

HOLODOMOR, LA GRANDE FAMINE UKRAINIENNE ★☆☆☆☆

De George Mendeluk

George Mendeluk réalise un travail de mémoire notable avec ce drame historique revenant sur la grande famine survenue en Ukraine soviétique en 1932 et 1933, la politique génocidaire la moins représentée du XXe siècle. Mais cette évocation perd de sa puissance au fil d’un récit fictionnel, mélo autour d’un couple déchiré par le collectivisme meurtrier de Staline gangréné par le côté trop archétypal de ses personnages.

Lou Hupel

 

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Tove, de Zaida Bergroth