Les enfants vont bien de Nathan Ambrosioni
StudioCanal

Un film d’une puissance émotionnelle rare sur les conséquences d’une disparition volontaire sur ceux qui restent. Après Toni en famille, Camille Cottin y brille de nouveau devant la caméra de Nathan Ambrosioni.

D’emblée, il y eut une évidence. La compétition angoumoisine avait beau ne pas manquer de concurrents sérieux ,la première projection des Enfants vont bien avait plié le game. Tant il paraissait évident que le troisième long métrage de Nathan Ambrosioni repartirait de la cité charentaise avec le Valois de Diamant. Ce qui fut fait cinq jours plus tard, agrémenté d’une mention spéciale du jury pour les deux jeunes enfants, Manoâ Varvat et Nina Birman, qui font ici leurs premiers pas sur grand écran

Mais cette évidence ne vient pas de nulle part. Découvert en 2018 avec Les Drapeaux de papier, le jeune cinéaste (26 ans au compteur) ne cesse depuis de monter en puissance. Et deux ans après Toni en famille, Nathan Ambrosioni épate par la maturité de son écriture et son talent à signer des portraits de femmes d’une telle acuité.

Les enfants vont bien s’ouvre sur une visite à priori banale que Suzanne rend à sa sœur Jeanne. Sauf que le lendemain matin, Suzanne a disparu sans laisser d’adresse mais un simple petit mot pour indiquer à Jeanne qu’elle lui confie ses deux jeunes enfants. Où est partie sa sœur ? Pourquoi a-t-elle décidé de s’évaporer sans donner d’explication ? Et surtout comment gérer du jour au lendemain ces deux enfants alors que Jeanne n’a jamais été mère et n’éprouve spontanément aucun instinct maternel ?

Les enfants vont bien avec Camille Cottin
StudioCanal

Voici toutes les questions qui se bousculent instantanément dans la tête de Jeanne, à la fois KO debout et dans l’obligation d’agir au plus vite, en s’appuyant sur son ex Nicole, dont le désir de maternité non partagée avait participé à la rupture. Transcendant le sujet des disparitions volontaires qui fut le déclic pour imaginer cette histoire, Nathan Ambrosioni signe un grand film sur la famille, les liens qui unit ses membres et peuvent à tout moment s’étioler voire se rompre. Un film d’une sensibilité infinie sans cris, ni heurts où les douleurs, les angoisses sont d’abord intériorisées et muettes, pour ne pas affoler encore plus les deux jeunes enfants.

A tous les niveaux, Ambrosioni franchit un cap avec ce nouveau long métrage, dont la maîtrise de la conduite du récit épouse le calme tranquille de sa mise en scène. On le sent ici très inspiré par le cinéma d’Edward Yang et Kore-eda Hirokazu et particulièrement par la manière dont l’un comme l’autre dans Yi Yi ou Nobody knows ont mis en scène l’enfance. Des influences parfaitement digérées. Et comme eux, il filme Manoâ Varvat et Nina Birman à hauteur d’enfant, ne les surplombe jamais de son regard d’adulte et obtient énormément de ses jeunes interprètes qui ne jouent pas sur leur seule nature.

Les enfants vont bien - Juliette Armanet
StudioCanal

Si le film touche aussi directement au cœur, c’est parce qu’il marche constamment sur ses deux jambes : le monde des adultes et le monde des enfants, chacun miné par ses propres soucis, ses propres angoisses qui, de temps à autres, se rejoignent. Mais on le doit aussi à la sensibilité avec laquelle ses interprètes adultes s’emparent de cette histoire et de ces personnages.

Juliette Armanet (Suzanne) Monia Chokri (Nicole) mais aussi et surtout Camille Cottin (Jeanne) à qui Ambrosioni offre encore un rôle majeur après Toni en famille, confirmant qu’elle s’épanouit comme jamais dans son jeu sous sa direction. Les Enfants vont bien confirme la place essentielle qu’elle a prise depuis quelques années dans le cinéma français. On voit mal comment la nomination aux César dont elle avait été injustement privée pour Toni en famille lui échapperait cette fois-ci.

De Nathan Ambrosioni. Avec Camille Cottin, Monia Chokri, Juliette Armanet... Durée 1h51. Sortie le 3 décembre 2025