Le chef d'oeuvre de David Lynch semble s'inspirer du classique de Victor Fleming.
À l'heure du confinement général, l'envie de danser vous démange ? Première vous propose de (re)voir quelques scènes dansantes cultes du cinéma... Aujourd'hui, retour sur la scène dansée la plus énigmatique du 7e art.
Mulholland Drive est truffé de références. Du Mépris de Jean-Luc Godard au Boulevard du crépuscule de Billy Wilder, le chef d’oeuvre de David Lynch s’inspire des plus grands classiques du 7e art. Sorti en 2001, le thriller fantastique raconte l’histoire de Rita (Laura Herring), une femme qui devient amnésique à la suite d’un accident de voiture sur la route de Mulholland Drive. Elle fait la rencontre de Betty Elms (Naomi Watts), une actrice en devenir qui vient juste de débarquer à Los Angeles. Aidée par celle-ci, Rita (Laura Harring) tente de retrouver la mémoire ainsi que son identité.
D’emblée, le film s’ouvre sur un pré-générique des plus énigmatiques : plusieurs couples dansent le Jitterbug - une danse associée au swing, popularisée aux États-Unis au début du 20e siècle - sur un fond violet sur lequel se découpent leurs ombres. Soudain, la silhouette blanche de Betty apparaît, entourée de deux personnes âgées. Betty sourit, triomphante, et semble saluer une foule. Cette scène ultra-rythmée et hypnotique semble être un flashback du concours de danse qu’a gagné Betty lorsqu’elle vivait encore au Canada. Cette même victoire qui l’a conduite à tenter sa chance en tant qu’actrice à Hollywood. La caméra filme ensuite les draps rouges d’un lit où quelqu’un semble dormir. Le film commence.
Cette séquence rappelle une scène coupée au montage d’un autre classique hollywoodien : Le Magicien d’Oz de Victor Fleming (1939). Dans un premier montage du film, la "Méchante Sorcière de l’Ouest" jette un sort sur l'Homme de Fer Blanc pour le transformer en ruche d’abeilles et envoie une horde d'insectes volants appelés "Jitterbugs" s’attaquer aux héros. Pour éviter leurs piqûres, Dorothy et ses amis se mettent alors à danser frénétiquement le Jitterbug tout en chantant. La scène de six minutes, qui a nécessité au total six semaines de tournage et coûté 80 000 dollars, a finalement été supprimée pour raccourcir la durée du film. (à partir d'1:17)
Il y a fort à parier que David Lynch se soit inspiré de cette séquence pour Mulholland Drive, compte tenu des très nombreuses références au Magicien d’Oz dans le film. Tout comme Dorothy qui rêve d’un autre monde - un monde fantastique et haut en couleur, où elle parvient à combattre le mal et à gagner l’admiration de tous les habitants du pays d’Oz -, la scène du Jitterbug de Mulholland Drive est suivie du rêve merveilleux de Betty (ou plutôt Diane), qui dure les trois quarts du film. Un rêve dans lequel la jeune femme est lavée de toute culpabilité (dans la réalité, elle a tué son amante, Camilla) et où ses talents d’actrice sont reconnus de tous à Hollywood (dans la réalité, elle vit dans l’ombre de son amante, qui décroche un rôle prestigieux à sa place). Betty / Diane accomplit donc son rêve hollywoodien et retrouve son innocence à travers ce songe, tout comme Dorothy échappe à son quotidien de fermière dans le sien. La danse du Jitterbug fonctionne comme un miroir entre les deux personnages.
Mulholland Drive de David Lynch aurait dû être une série adaptée de Twin Peaks
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