Canal + diffuse ce soir la captation du deuxième seul en scène de l’acteur- réalisateur de Guy aux Folies Bergères. Une grande réussite. Voici pourquoi
Un spectacle riche
Après le Molière remporté pour son premier seul en scène en 2016, le succès des aventures de Catherine et Liliane sur Canal + et son César du meilleur comédien obtenu pour Guy, la tentation aurait pu être grande pour Alex Lutz de se reposer confortablement sur ses lauriers. De gérer ces acquis en mode « bon père de famille ». De reprendre des bouts de son premier spectacle, faire intervenir au fil des sketches les personnages de Catherine et Guy Jamet. Bref, de donner à son public ce qu’il aurait pu prétendument attendre. Sa logique est ici strictement inverse. Avec son nouveau seul en scène, Alex Lutz s’évertue au contraire à brouiller les pistes, à mêler les genres. Il y joue tout à la fois avec les étrangetés de la langue française (mais pourquoi diable dit- on « pas piqué des hannetons » ?...), le comique de situation (un grand moment autour des discours de mariage…), l’absurde (la création du rire…), l’actualité (les relations homme- femme…), son propre quotidien (sa jeunesse, sa vie en couple…la poésie (en faisant débarquer en ouverture et en clôture du spectacle un cheval qu’il fait évoluer la scène des Folies Bergères…)… Et fait même surgir au milieu de cet inventaire à la Prévert un personnage de grand- mère dénoncée et arrêtée pendant la seconde guerre mondiale. Soudain, le rire se fait alors tendre, poignant, grinçant… Sans cesse surprenant.
Un spectacle maîtrisé
A mélanger ainsi les genres, on peut vite se perdre. Pas Lutz dont la conduite fluide de son récit ne verse jamais dans l’empilement de sketches. Il n’est jamais dans l’obsession de l’efficacité ou de la vanne qui tue. Pas plus qu’il n’interpelle le public pour en humilier quelques-uns afin de rire d’eux tous les autres, stratagème employé à peu de frais par bien trop de ses collègues prétendument humoristes. Avec ce seul en scène, il se situe exactement aux antipodes. Il déstabilise son public, lui offre des tunnels de poésie ou de moments suspendus comme autant de ruptures totalement inattendues. Mais en tenant toujours fermement la barre
Un spectacle virtuose
Last but not least, ce seul en scène frappe par la manière dont Alex Lutz incarne les différents personnages qu’il a imaginés avec son camarade Tom Dingler. Notamment sa capacité de traduire physiquement l’absurdité des situations comme un Jim Carrey ou un Will Ferrell et par là- même de se situer donc au croisement de la comédie anglo- saxonne et d’un humour très français porté par un arrière- fond social. Alex Lutz n’est pas un comique qui essaie tant bien que mal de jouer. Mais un acteur qui joue la comédie avec la même subtilité que le drame. Une nuance de taille
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